La Caisse pouvait-elle faire plus?
Certains ont laissé entendre que la Caisse de dépôt n'avait pas fait assez dans ce dossier et que l'échec du sauvetage d'Osisko lui était en partie imputable.
C'est être injuste envers la Caisse.
De concert avec la direction d'Osisko, elle a en effet fait montre d'une grande créativité pour tenter de préserver le siège social. La bouchée était simplement trop importante.
Pour s'assurer de la conservation du siège social à Montréal, il fallait obligatoirement qu'un groupe d'actionnaires contrôle 50% +1 de la société. Avec une capitalisation boursière de plus de 3 G$, c'était plus de 1,5 G$ qu'il fallait trouver chez des investisseurs non-minier (une minière ne viendrait pas sous les 50% et la faire entrer à plus de 50% signifiait la disparition automatique du siège social…). Or, quel avantage pouvait bien avoir un investisseur ordinaire à entrer à prime au capital d'Osisko? Aucun.
Il aurait fallu que la Caisse y aille d'un investissement dépassant nettement le milliard de dollars. Une entrée à prime, avec de nombreux risques de recul subséquent, qu'il n'aurait pas été sage de faire porter au patrimoine des déposants.
Pour mettre en oeuvre le deuxième objectif de sa mission (développement économique), la Caisse serait alors allée à l'encontre du premier (rendement).
Alors, où en est-on?
Vraisemblablement de retour à cette proposition qui consiste à donner plus de pouvoir aux conseils d'administration pour bloquer une offre d'achat lorsqu'ils considèrent que celle-ci n'est pas dans l'intérêt des parties prenantes (actionnaires, employés, créanciers, milieu).
Au lendemain du dépôt du rapport Séguin, le ministre des finances, Nicolas Marceau, se proposait d'introduire une disposition du genre dans la loi québécoise. Le mécanisme aurait cependant été optionnel, les huit sociétés publiques constituées en vertu de la loi du Québec (Metro, Cominar, Richelieu, Rona, Amaya, Semafo, Uni-Sélect et Canam) ayant la possibilité de l'incorporer à leurs statuts ou non.
La balle est donc aujourd'hui dans trois camps:
-celui du Parti libéral, dont on ne connaît pas trop la position sur le sujet, mais qui devra décider s'il permet aux CA de bloquer des OPA au motif qu'elles sont inadéquates;
-le camp des huit sociétés québécoises, qui devront accepter d'incorporer ce mécanisme à leurs statuts;
-le camps, enfin, des 17 sociétés québécoises incorporées en vertu de la loi canadienne (SNC, Dollarama, Gildan, CAE, etc.), qui devront faire pression pour que le cadre réglementaire soit aussi amendé dans le reste du Canada.
Il ne s'agit pas de dire que les conseils d'administration devraient bloquer toutes les OPA. Seulement se donner les moyens de mieux apprécier le pour et le contre. Et permettre que des organisations comme celle d'Osisko, qui croyait pouvoir bâtir plus de valeur pour les actionnaires à long terme que ce qu'ils reçoivent aujourd'hui, puissent pouvoir mener leur plan de match à terme.
Intéressant débat à venir, qui devrait bientôt permettre de voir si le cœur nationaliste de Québec inc. bat encore avec autant de force que jadis.
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