Theratechnologies déploie sa stratégie de commercialisation internationale

Publié le 01/10/2011 à 00:00

Theratechnologies déploie sa stratégie de commercialisation internationale

Publié le 01/10/2011 à 00:00

Par François Normand

La pharmaceutique Theratechnologies (Tor., TH) déploie sa stratégie de commercialisation de ses médicaments en confiant leur distribution à d'autres pharmaceutiques. Une stratégie qui n'est pas sans risque.

"Nous n'avons pas de contrôle sur la commercialisation", admet son président et chef de la direction, John-Michel T. Huss. Avec des revenus de 31,9 millions de dollars canadiens, Theratechnologies est un petit acteur dans l'industrie.

De plus, la PME de Montréal ne commercialise pour l'instant qu'un seul médicament, Egrifta (tésamoréline pour injection). Il réduit l'excès de graisse abdominale chez les patients infectés par le VIH et qui sont atteints de lipodystrophie. Aux États-Unis, plus de 200 000 Américains en sont atteints.

Pour commercialiser son médicament dans le monde, Theratechnologies s'appuie sur trois distributeurs bien implantés dans leurs marchés. Elle réalise des revenus de redevances sur les ventes de ces partenaires.

Il s'agit de l'américaine EMD Serono, membre du groupe Merck, de l'espagnole Ferrer Internacional, présente dans les secteurs de la pharmaceutique et de l'alimentation, et de la française Sanofi. Les trois prennent en charge les demandes d'approbation du médicament et sa commercialisation.

Pour l'instant, Egrifta n'est vendu qu'aux États-Unis, où il est distribué depuis le début de l'année par EMD Serono (qui produit le médicament Rebif, contre des formes récurrentes de la sclérose en plaques). Theratechnologies ne divulgue aucune information sur ses revenus de redevances.

Pooya Hemami, analyste du secteur de la santé chez Valeurs mobilières Desjardins, estime toutefois que Theratechnologies devrait recevoir un montant représentant de 13 à 14 % des ventes d'Egrifta que Serono fera sur le marché américain. "À long terme, les redevances ne devraient pas excéder 25 %", dit-il.

Theratechnologies reçoit aussi parfois des paiements d'étape (milestone payments), comme en novembre 2010, alors que Serono lui a versé 25 millions de dollars canadiens (M$) en raison de l'homologation d'Egrifta aux États-Unis. Ce paiement explique la forte hausse des revenus de l'entreprise l'an dernier, soit 31,9 M$ par rapport à 17,5 M$ en 2009.

En attente d'approbation en Europe

Par ailleurs, Egrifta est en processus d'approbation en Europe. "Sa commercialisation pourrait être autorisée d'ici la fin de 2011 ou au début de 2012", dit M. Huss.

Le distributeur est déjà trouvé pour ce marché européen : Ferrer Internacional, une entreprise expérimentée qui compte à son actif plus de 400 dossiers d'enregistrement de médicament en cours en Europe.

Si Egrifta est approuvé, l'entreprise vendra aussi le médicament en Russie, en Corée du Sud, à Taïwan, en Thaïlande et dans certains pays d'Asie centrale.

Pour sa part, Sanofi, qui a réalisé des revenus de 30,7 milliards d'euros en 2010 (42,2 milliards de dollars), commercialisera Egrifta en Amérique latine, en Afrique et au Moyen-Orient.

Ainsi, avec ces trois partenaires, Theratechnologies est bien positionnée pour vendre Egrifta dans le monde, d'autant plus qu'elle est à ce jour la seule à produire ce type de médicament, selon John-Michel T. Huss.

"Sur le marché américain, ils n'ont aucun concurrent", confirme Neil Maruoka, analyste du secteur de la santé chez Canaccord Genuity.

Par ailleurs, pour accroître sa visibilité aux États-Unis, son unique marché pour l'instant, Theratechnologies s'est aussi inscrite à la Bourse Nasdaq en juin dernier, sous le symbole THER. Cela fait d'elle l'une des rares pharmaceutiques québécoises cotées en Bourse aux États-Unis.

Nouvelle fonction pour Egrifta

Theratechnologies essaie de mettre au point une nouvelle application à la molécule active de son médicament, la tésamoréline. Elle estime ainsi que la tésamoréline peut également traiter l'atrophie musculaire liée à la maladie pulmonaire obstructive chronique (MPOC), qui touche 200 millions de personnes dans le monde. Les tests sont en phase II. Si les essais cliniques étaient concluants, Theratechnologies viserait en priorité le marché chinois, saturé de fumeurs et de pollution. De 2010 à 2020, le nombre de personnes atteintes de MPOC en Chine pourrait passer de 46 à 56 millions.

LES RISQUES DE THERATECHNOLOGIES

Risque d'approbation

En novembre 2010, la Food and Drug Administration a donné son feu vert à la commercialisation d'Egrifta aux États-Unis. Sans cette homologation, Theratechnologies aurait investi pour rien en R-D et les investisseurs, déçus, auraient sans doute vendu l'action. Actuellement, le médicament est en processus d'approbation au Canada et en Europe. Si les analystes ont plutôt confiance qu'ils obtiendront une réponse positive, rien n'est gagné d'avance, prévient Pooya Hemami, analyste du secteur de la santé chez Valeurs mobilières Desjardins. "Parfois, un médicament est autorisé aux États-Unis et refusé en Europe", dit-il.

Risque commercial

Theratechnologies ne vend pas directement Egrifta. Un distributeur le fait aux États-Unis et deux autres sont partenaires advenant une approbation du médicament dans d'autres pays. De mauvaises stratégies commerciales ou l'émergence d'un produit concurrent à Egrifta réduiraient le potentiel de vente du médicament. Aux États-Unis, l'industrie des biotechnologies - dont les produits préviennent, diagnostiquent ou traitent les maladies - génère des revenus annuels supérieurs à 70 milliards de dollars américains (G$ US), selon TheMedica, un site consacré à l'industrie. Elle compte plus de 1 500 entreprises dont les dépenses en R-D sont de 19 G$ US par an.

Risque pour la santé

Comme tout fabricant de médicaments, Theratechnologies court le risque qu'Egrifta cause des effets secondaires non décelés à l'origine. En 2004, Merck, Sharp et Dohme-Chibret (MSD) avaient dû retirer du marché le Vioxx, un anti-inflammatoire. Des études avaient montré qu'il augmentait les risques cardiovasculaires, notamment d'infarctus.

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