«Nous sommes les jokers de la direction» - Robert Wong, directeur du Creative Lab de Google

Publié le 31/12/2012 à 00:00, mis à jour le 31/12/2012 à 11:14

«Nous sommes les jokers de la direction» - Robert Wong, directeur du Creative Lab de Google

Publié le 31/12/2012 à 00:00, mis à jour le 31/12/2012 à 11:14

Par Diane Bérard

D.B. - On a beaucoup écrit sur la gestion des créatifs. Quelle est formule la plus efficace ?

R.W. - Des créatifs doivent être gérés par un créatif. Mais je n'aime pas beaucoup le mot créatif. On l'emploie trop et souvent mal. Je préfère «artistes». La créativité devrait être présente dans tous les services de l'entreprise. Google Creative Lab, quant à lui, se distingue parce qu'il recrute des artistes. Les artistes manquent par nature d'assurance. Pour créer, il leur faut un environnement sécurisant. Or, le monde des affaires les déstabilise. On y travaille de façon linéaire, ce qui ne leur ressemble pas. C'est pourquoi des artistes doivent être gérés par un artiste qui comprend leur processus créatif. Mais cet artiste doit compter un «protecteur» parmi les membres de la direction. Quelqu'un qui voit loin et estime essentiel de préparer l'avenir. Entre l'artiste gestionnaire et le protecteur se noue un pacte : l'un et l'autre savent que quelque chose de concret doit sortir de ce service, mais que cela ne se produira pas de manière orthodoxe.

D.B. - On dit que la création doit déranger (disrupt). Qu'en pensez-vous ?

R.W. - Déranger quoi ? Qui ? Ça sonne académique, artificiel et surtout nombriliste. La création n'est pas un processus tourné vers l'intérieur. Comme si les entreprises devaient se déranger elles-mêmes pour progresser. Le conseil d'administration, les modes, les tendances ne sont pas de bonnes sources d'inspiration pour la création et l'innovation. Il n'y a qu'un point de départ valable : les clients. Qu'aiment-ils ? Quelles sont les choses qui les irritent et dont ils souhaitent se débarrasser ? Que leur manque-t-il ?

D.B. - Les grandes entreprises peuvent-elles demeurer créatives ?

R.W. - Bien sûr, elles n'ont qu'à se prendre pour des start-ups ! Vous connaissez la blague : 7 personnes produisent comme 7, 10 personnes produisent comme 7 et 4 personnes produisent comme 7 ! Donnez peu de ressources et de temps à vos employés, ils créeront. Je le sais, c'est ce que Google fait avec le Creative Lab. Nous disposons d'équipes minuscules, d'échéances ridicules et n'avons pas de budget ! Et, lorsqu'on parvient à produire quelque chose, alors seulement Google nous accorde de vraies ressources.

D.B. - Vous prônez «l'inconfort sain». De quoi s'agit-il ?

R.W. - Pensez à ces moments où vous êtes heureuse. Vous avez bien travaillé et vous êtes satisfaite du résultat. Et puis, quelque chose vous chicote. Vous vous sentez à la fois bien et moins bien. Cultivez cette ambiguïté, elle vous poussera à toujours être en mouvement.

*******************************************************

Chaque semaine dans le journal Les Affaires, notre journaliste Diane Bérard réalise une entrevue avec une personne bien en vue ou une star montante de la scène économique mondiale. Pour la période des Fêtes, nous publions 10 des meilleurs entretiens menés par notre reporter.

À la une

Pierre Fitzgibbon: «Dans la filière batterie, on est rendu trop loin pour reculer»

00:00 | Les Affaires

Le superministre a rencontré «Les Affaires» en table éditoriale afin de préciser sa vision de la filière batterie.

Table éditoriale avec le PDG de Northvolt: des batteries «made in Québec» avec du contenu d'ailleurs

En table éditoriale avec «Les Affaires», Paolo Cerruti affirme qu'il faudra être patient.

Le coup de poker de la filière batterie

BILLET. À vous de juger si nous avons des chances de remporter la mise ou de perdre gros dans la partie.