Un marché en pleine réorganisation

Publié le 07/09/2013 à 00:00

Un marché en pleine réorganisation

Publié le 07/09/2013 à 00:00

Demande de la Chine en berne, situation économique en Europe, loi 1 au Québec et redevances minières en question. Les causes sont nombreuses, mais la conséquence est générale : l'activité dans les secteurs des mines et des infrastructures publiques est ralentie. Les ingénieurs sont les premiers à en souffrir. Certains, mis à pied, ont parfois de la difficulté à retrouver un emploi.

Thibault, ingénieur qui a accepté de témoigner sous le couvert de l'anonymat, a fait les frais de la baisse de l'activité minière. Faute de projet, sa firme de génie l'a congédié dans l'attente d'une reprise. Depuis, les propositions d'emploi ne se bousculent pas. Dans une autre firme de génie, Noémie, logisticienne qui souhaite aussi garder l'anonymat, vient d'être licenciée, les projets miniers du carnet de commandes tardant à être lancés.

Le constat est unanime : les contrats rentrent au compte-gouttes, voire plus du tout, surtout dans le domaine minier. Si bien que les firmes, dont l'activité est fortement dépendante du secteur minier en particulier, mais aussi des infrastructures publiques, ont dû procéder à des «ajustements d'effectif». SNC- Lavalin aurait licencié une cinquantaine de personnes en août et s'apprêterait à en remercier d'autres, selon des sources à l'interne. Toutefois, l'entreprise a refusé de confirmer l'information, indiquant que sa politique interne ne lui permettait pas de «commenter la situation de ses employés, qu'ils soient congédiés ou en poste».

BBA, qui travaille beaucoup dans les secteurs des mines et de la métallurgie, a, en mars dernier, mis à pied temporairement 125 personnes, dont la majorité est composée d'ingénieurs. Elle compte aujourd'hui 725 employés.

Chez Génivar, dont les activités sont plus diversifiées (les projets d'infrastructures publiques représentent environ 35 % de son activité et les mines 5 %), 5 % du personnel a dû être licencié depuis le début de l'année. La moyenne en temps normal est plutôt de 3 %. Ses effectifs s'élèvent aujourd'hui à 4 650 personnes au Canada.

Des explications mondiales et locales

«Le ralentissement dans le secteur minier s'est amorcé au deuxième trimestre 2012, constate Isabelle Adjahi, directrice des communications et des relations avec les investisseurs de Génivar. Le mouvement a été brutal et plus long qu'on ne le pensait.»

Même constat chez BBA où «on voyait les problèmes au loin dès l'été 2012». «L'essoufflement s'est concrétisé à l'automne dernier et au début de l'hiver. On constatait que les projets avaient plus de mal à se financer», explique Éric Gemme, chef de la direction financière et des services corporatifs.

Les raisons de ce ralentissement de l'activité sont diverses et pas seulement québécoises, selon les firmes de génie. Dans le secteur minier, la diminution de la demande chinoise explique en grande partie la baisse des cours de plusieurs métaux comme le fer et l'or. «Si bien que des projets ficelés en fonction de cours plus hauts ont dû être suspendus et annulés, car ils n'étaient plus rentables dans les nouvelles conditions», dit M. Gemme.

À cela s'ajoutent des facteurs locaux, comme les discussions sur les redevances minières et l'avenir du Plan Nord. Des raisons qui, selon BBA, «sont des facteurs aggravants dans une atmosphère d'incertitude».

Sur le plan des projets d'infrastructures commandés par les municipalités et le gouvernement, «c'est surtout un ralentissement des procédures d'octroi des contrats» qui explique l'immobilisme actuel, selon Isabelle Adjahi.

La Ville de Montréal a d'ailleurs fait savoir au début d'août que 52 % de ses travaux ne pourraient pas être effectués en 2013 à cause des délais qu'entraîne la vérification de la probité des entreprises. En effet, la loi 1, qui vise à s'assurer de l'intégrité des entreprises répondant aux appels d'offres avant d'accorder des contrats de 40 millions et plus, impose des étapes supplémentaires au processus habituel.

Mais ce n'est pas l'unique explication. «Il y a une crise de confiance présentement au Québec, souligne le président de l'Ordre des ingénieurs du Québec, Daniel Lebel. Le travail mené par la commission Charbonneau est nécessaire. Le système est à revoir. Et c'est en train de se faire. Nous sommes dans une phase de transition, ça va repartir.»

Des perspectives incertaines

En effet, le marché est en pleine réorganisation. Pendant que les acteurs désignés du doigt tentent de montrer patte blanche pour continuer à décrocher des contrats gouvernementaux, des firmes habituellement étrangères à ces projets commencent à s'y intéresser. Il en est ainsi de Hatch Mott MacDonald qui se fraye une place dans les secteurs du transport et du génie civil au Québec.

BBA pour sa part a été approchée pour soumissionner aux appels d'offres des projets d'infrastructures publiques - un domaine dans lequel elle n'est aujourd'hui pas présente - afin de prendre la relève. Une occasion que la firme étudie actuellement. «On regarde cela d'un oeil attentif, mais il y a des efforts à faire de notre part si on veut aller dans ce secteur. On ne veut pas plonger la tête la première», dit Éric Gemme.

La voie pourrait néanmoins sembler intéressante, car les prévisions de reprise, si elles sont bonnes dans les infrastructures publiques dès que la transition sera achevée, du point de vue des observateurs, semblent moins rapides dans le secteur minier, de l'aveu même d'Éric Gemme. Ce dernier ne voit pas de «déblocage dans les prochains trimestres».

3 189

Au terme de l'année 2012-2013, 3 189 étudiants ont terminé leur baccalauréat en génie au Québec, dépassant de peu les résultats de 2011-2012, alors que 3 146 étudiants avaient reçu leur diplôme.

15

En comparaison de l'année 2011-2012, le nombre de finissants en génie civil et dans les spécialités liées à la construction a augmenté de 15 %. Pour une première fois en plusieurs années, leur nombre dépasse celui des finissants en génie mécanique.

30

Le nombre d'heures travaillées dans le domaine du génie civil et de la voirie devrait baisser de 17 % en 2013 par rapport à 2012, avec une prévision de 30 millions d'heures travaillées, comparativement à 36,3 M en 2012 et à 35,3 M en 2011.

Sources : Réseau des ingénieurs du Québec et Commission de la construction du Québec

À la une

Vendre en Mai?

EXPERT INVITÉ. Doit-on se fier à l'adage «vendre en mai et s'en aller»?

La Bourse de Toronto en hausse en fin de matinée

Mis à jour il y a 21 minutes | lesaffaires.com, AFP et Presse canadienne

REVUE DES MARCHÉS. Wall Street a ouvert dans le vert après une bonne semaine.

Les nouvelles du marché du lundi 29 avril

Mis à jour à 09:06 | Refinitiv

Domino's Pizza dépasse les attentes au T1 avec son programme de fidélisation.