Lassonde résiste à plusieurs vents de face aux États-Unis

Publié le 14/02/2023 à 13:30

Lassonde résiste à plusieurs vents de face aux États-Unis

Publié le 14/02/2023 à 13:30

Par François Normand

«Il y a eu une tempête parfaite aux États-Unis», explique à Les Affaires Nathalie Lassonde, cheffe de la direction chez Lassonde. (Photo: courtoisie)

Désintérêt pour les jus sucrés, guerre de prix, pénurie de main-d’œuvre, inflation… Le producteur de jus, de boissons et d’aliments Industries Lassonde affronte plusieurs vents de face aux États-Unis. Pour leur résister et demeurer compétitive, l’entreprise familiale contrattaque en misant sur l’innovation, l’automatisation et la spécialisation.

«Il y a eu une tempête parfaite aux États-Unis», explique à Les Affaires Nathalie Lassonde, cheffe de la direction chez Lassonde.

Elle évoque l’inflation, le prix des matières premières ainsi que leur accessibilité, les coûts de transport, sans parler de la pénurie de main-d’œuvre.

Uniquement dans l’industrie de l’alimentation et des boissons, il manque 1,5 million de travailleurs au sud de la frontière, souligne le magazine Forbes.

Lassonde à sept usines aux États-Unis, situées dans l’État de Washington (2 établissements), au Michigan, en Californie, en Arkansas, en Caroline du Nord et au New Jersey. Dans ce dernier établissement, le manque de bras a même provoqué une baisse de la production.

«La pénurie de main-d’œuvre a eu un impact sur la quantité de produits qu’on peut offrir», admet Nathalie Lassonde.

Pour diminuer l’effet de la pénurie de main-d’œuvre sur son usine du New Jersey et sur celles ailleurs aux États-Unis, Lassonde automatise davantage leurs procédés de production.

On parle ici «de millions de dollars» en investissement en capital.

L’enjeu est de taille pour la société, qui a 24 usines et bureaux (dont six usines aux États-Unis) et qui commercialise 27 marques par l’entremise de quatre filiales (A. Lassonde, Lassonde Pappas and Company, Spécialités Lassonde et Sun-Rype Products).

 

Baisse des revenus aux États-Unis en 2021

Actuellement, Lassonde réalise environ 50% de ses revenus aux États-Unis, en plus d’y être le deuxième producteur de jus et de boissons de fruits vendus en tablettes sèches derrière Refresco.

Le marché américain est aussi la principale source de croissance de l’entreprise de Rougemont, en Montérégie.

Entre 2011 (année où elle fait son entrée aux États-Unis, en achetant le producteur de jus Clement Pappas) et 2021, ses revenus ont progressé de 382%, comparativement à 64% au Canada sur la même période, selon une analyse de Les Affaires.

Toutefois, signe que le marché américain est plus difficile, les revenus de Lassonde y ont diminué en 2021 (l'année financière se termine le 31 décembre).

Ils sont passés de 1,149 milliard de dollars canadiens (G$) à 1,019 G$, en baisse de 11%, et ce, dans un contexte où le huard s’est apprécié par rapport à la devise américaine durant cette année.

En revanche, ses revenus ont progressé de 5,3% au Canada, à 868,7 millions de dollars (M$).

Malgré tout, les revenus totaux de Lassonde ont diminué de 4,4% en 2021, pour s’établir à 1,892 G$, soit un premier recul de ses ventes globales au cours des cinq dernières années.

En revanche, ils seraient en hausse à 2,1 G$, et ce, sur la période de 12 mois allant du 1er octobre 2021 au 1er octobre 2022, selon les chiffres fournis par Lassonde, mais sans la ventilation pour les États-Unis.

Au moment de mettre l'article en ligne, l’entreprise n’avait pas encore publié son rapport annuel de 2022, pour son année financière se terminant le 31 décembre.

La marge bénéficiaire est demeurée stable entre 2018 et 2021.

En revanche, le titre a fondu de 57% depuis cinq ans à la Bourse de Toronto, à 112 $ (ce mardi 14 février). La dernière acquisition de l’entreprise — le marché récompense généralement les acquisitions — remonte à octobre 2019.

Les investissements en automatisation augmenteront la productivité de Lassonde. L’entreprise pourra ainsi mieux résister à la guerre de prix que lui mène Refresco.

Cela dit, Nathalie Lassonde estime que la focalisation sur des segments clés de marché est la meilleure stratégie pour contrattaquer. «C’est vraiment de trouver le créneau dans lequel il y a peut-être un peu moins de compétition.»

Par exemple, Lassonde se concentre davantage sur les produits de tablettes sèches que sur les produits réfrigérés. De plus, comme ces produits affichent des coûts de production inférieurs, ils réduisent les effets de la guerre de prix sur les revenus de l’entreprise.

Pour se démarquer, Lassonde mise aussi sur la diversification des formats de contenants de jus (200 mililitres, un litre, etc.) et le type de clients.

Par exemple, aux États-Unis, l'entreprise fabrique à la fois des jus de marques privées pour les détaillants et ses propres jus (par exemple, Apple & Eve et Old Orchard) qu'elle vend aussi aux détaillants.

Cela dit, Lassonde vend plus de marques privées aux États-Unis. En revanche, au Canada, elle vend davantage ses marques maisons ou dites nationales.

 

La guerre au sucre

Lassonde est confronté à un autre vent de face majeur aux États-Unis: le désintérêt des consommateurs pour les produits sucrés.

Certains analystes parlent même de «guerre au sucre», c’est-à-dire l’appel — notamment des médecins — à diminuer la consommation de sucre afin de réduire l’obésité et les maladies cardiovasculaires.

Les boissons gazeuses ont d’abord été pointées du doigt en raison de leur forte teneur en sucre. Depuis quelques années, c’est au tour des jus de fruits — qui contiennent aussi du sucre – d’être dans le collimateur des spécialistes et des consommateurs.

Cette tendance lourde est problématique pour les producteurs de jus comme Lassonde. En revanche, l’entreprise de Rougemont s’est adaptée et continue de le faire constamment, souligne Nathalie Lassonde.

«Tout est dans l’innovation», dit-elle. Elle donne les exemples des marques Simple Drop (de l’eau aromatisée avec du jus, qui ne contient pratiquement pas de sucre) et HydraFruit (des jus contenant 60% moins de sucre que les jus réguliers de Lassonde).

Reste à voir, toutefois, si toutes les stratégies mentionnées par Nathalie Lassonde (innovation, automatisation, spécialisation) permettront de relancer durablement les ventes de la société aux États-Unis.

Des revenus qui pourraient du reste être aussi tirés par le haut par une nouvelle acquisition. Nathalie Lassonde rappelle que l’entreprise «garde toujours un œil» sur des acquisitions potentielles.

Autant d’ingrédients qui pourraient bientôt « donner leurs fruits » en matière de croissance des revenus, sans parler de la valeur du titre.

Depuis le début de l’année, l’action est en légère hausse de 1%.

 

 

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