Petite révolution tranquille chez Énergir

Publié le 15/03/2021 à 16:33

Petite révolution tranquille chez Énergir

Publié le 15/03/2021 à 16:33

Par François Normand
Une flamme de gaz naturel.

Énergir veut que sont réseau contienne au moins 10% de gaz vert en 2030 et au moins 50% en 2050. (Photo: 123RF)

Sans tambour ni trompette, Énergir est en train d’amorcer une petite révolution tranquille qui va transformer le modèle d’affaires du producteur et du distributeur d’énergie grâce à sa planification stratégique Vision 2030-2050.

Cette stratégie s’appuie sur cinq grandes orientations: accélérer l’efficacité énergétique, injecter au moins 10% de gaz vert dans son réseau gazier, développer une «complémentarité forte» avec l’électricité, favoriser de nouvelles sources de croissance puis dépolluer davantage l’industrie et le transport avec du gaz naturel.

Énergir a été fondée en 1957, mais son nom a évolué au fil des décennies.

La société s’est d’abord appelée la Corporation du gaz naturel du Québec, de 1957 à 1969. Puis, dans les décennies suivantes, elle est devenue Gaz Métropolitain (de 1969 à 2003), Gaz Métro (de 2003 à 2017) et puis Énergir (depuis 2017).

Ces changements de nom ne sont pas cosmétiques.

Ils marquent souvent un changement de cap de cette société.

Par contre, Énergir a connu sa première transformation majeure au début des années 2000, et ce, sous la gouverne de l’ancienne présidente et chef de la direction, Sophie Brochu (aujourd’hui PDG d’Hydro-Québec).

Uniquement alors distributeur de gaz naturel, l’entreprise a fait son entrée dans la production et la distribution d'électricité au Vermont, grâce à deux acquisitions: Green Mountain Power et Central Vermont Public Service (CVPS).

Aujourd’hui, la société québécoise est présente dans les secteurs du gaz naturel (incluant un peu de gaz naturel renouvelable), en plus d’être active dans la production et la distribution d’énergie hydroélectrique, éolienne, solaire, sans parler du «cow power».

Pour comprendre la nouvelle Vision 2030-2050 d’Énergir, nous avons interviewé le président et chef de la direction, Éric Lachance, et la vice-présidente exécutive, Stéphanie Trudeau.

 

#1 - Accélérer l’efficacité énergétique

L’entreprise s’est fixé l’objectif de réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES) de sa clientèle d’un million de tonnes (équivalents CO2), entre octobre 2020 et septembre 2030.

Pour mettre les choses en perspective, les rejets totaux du Québec se sont élevées 78,6 millions de tonnes éq. CO2 en 2017 (les données les plus récentes), selon l’Inventaire québécois des émissions de gaz à effet de serre (GES), publié par le gouvernement du Québec.

La réduction d’un million de tonnes planifiée par Énergir en 10 ans pour ses clients représente donc 1,3% des émissions totales de la province en 2017, ce qui est un niveau ambitieux.

Dans son Rapport sur la résilience climatique, l’entreprise souligne que les économies qu’elle réalisera d’ici 2030 seront équivalentes à celles qu’elle a déjà réalisées entre 2000 et 2020 (1,1 million de tonnes évitées).

 

#2 - Injecter au moins 10% de gaz vert dans le réseau gazier

En vertu d’une réglementation adoptée par le gouvernement du Québec, Énergir devra avoir un minimum de 5% de gaz naturel renouvelable (GNR) dans son réseau en 2025, alors que cette quantité s’élève à environ 1% à l’heure actuelle.

«Nous nous fixons l’objectif d’atteindre un minimum 10% en 2030, et au moins 50% en 2050», souligne Éric Lachance.

Le GNR est entre autres produit à l’aide de résidus organiques tels que des restes de table. Ce carburant réduit donc les émissions de GES en empêchant que des déchets soient enfouis et qu'ils produisent à terme du méthane - un GES plus néfaste que le CO2 pour le climat - si les émanations ne sont pas captées.

 

La vice-présidente exécutive, Stéphanie Trudeau, et le président et chef de la direction, Éric Lachance. (Photo: courtoisie)

 

#3 - Développer une complémentarité forte avec l’électricité

Énergir tient compte de deux tendances à propos de cette orientation.

Comme la consommation de gaz naturel classique et de produits pétroliers est appelée à diminuer en raison de la décarbonisation de l’économie, il faudra davantage d’électricité pour répondre à la demande énergétique dans les secteurs du bâtiment, du transport et de l'industrie manufacturière.

Hydro-Québec ne pourra pas répondre seule à cette demande supplémentaire, en particulier lors des périodes de pointe. C’est la raison pour laquelle Énergir veut non seulement accroître sa production d’électricité, mais aussi mieux se coordonner avec Hydro-Québec.

Au Québec, c’est dans l’éolien que la société peut mettre plus facilement de la nouvelle production en service, souligne Stéphane Trudeau. «Il y a encore beaucoup de potentiel.»

Énergir est partenaire dans les parcs éoliens de la Seigneurie de Beaupré, dans la région de la Capitale-Nationale, au nord de Québec.

Aux États-Unis, l’entreprise voit notamment des occasions dans le solaire. Au Vermont, sa filiale Green Mountain Power produit déjà de l’énergie solaire. Pour accroître sa production d’électricité et se diversifier dans d’autres États américains, Énergir misera sur des acquisitions et de la croissance interne, explique Éric Lachance.

Comme plusieurs producteurs d’énergie renouvelable, Énergir voit aussi d’un très bon œil le plan de 2 000 milliards de dollars américains de l’administration Biden pour lutter contre les changements climatiques.

Dans le secteur de l’électricité, Washington veut favoriser la production d’énergie renouvelable afin que l’industrie soit carboneutre d’ici 2035.

 

#4 - Favoriser de nouvelles sources de croissance

Depuis une vingtaine d’années, Énergir a multiplié ses sources de revenus, et elle compte le faire davantage dans les prochaines années, notamment dans les services, explique Éric Lachance.

«Nous pourrions offrir des outils de gestion intelligente de l’énergie», dit-il.

Cette diversification des sources de revenus pourrait aussi impliquer de développer une filière de l’hydrogène vert.

Ce carburant pourrait être injecté dans le réseau gazier d’Énergir, permettant ainsi d’accélérer par exemple la décarbonisation des procédés qui nécessitent du gaz naturel, comme la chauffe dans l’industrie.

En mars 2020, GRTgaz, le gestionnaire du réseau gazier en France, a procédé avec succès aux toutes premières injections de cet hydrogène issu de l'électricité d'origine renouvelable dans son réseau.

 

#5 - Dépolluer l’industrie et le transport avec du gaz naturel

Même si la consommation de gaz naturel classique diminuera, cette source d’énergie sera encore utile pour remplacer d’autres combustibles fossiles plus émissifs de GES comme du mazout ou du charbon, et ce, lorsque l’électrification est trop dispendieuse ou impossible d’un point de vue technologique.

Cela dit, Énergir ne fera pas que de distribuer du gaz naturel classique comme elle le fait depuis des décennies.

C’est la raison pour laquelle l’entreprise a mis en place l’initiative visant à s’approvisionner directement auprès de producteurs de gaz qui font preuve de transparence et qui ont adopté les meilleures pratiques ESG, explique Stéphanie Trudeau.

«Actuellement, 15% du gaz dans notre réseau est responsable. En 2030, on veut que ce soit 100%», dit-elle.

 

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