Acheteurs, c'est l'heure!


Édition de Avril 2014

Acheteurs, c'est l'heure!


Édition de Avril 2014

Bulle, mythe ou réalité ?

Si le ministre Flaherty craint la formation d'une bulle, le reste du monde économique considère déjà le marché canadien comme dopé à l'EPO. Un premier rapport publié en mai 2013 par l'OCDE évaluait qu'au pays de Stephen Harper, le marché immobilier était le 3e plus surévalué du monde, après ceux de la Belgique et la Norvège. En novembre, c'était au tour de l'agence de notation Fitch d'ajouter son grain de sel, estimant que l'immobilier canadien était surévalué de 21 %. Au Québec, la surévaluation serait encore pire, à 26 %. Puis, la Deutsche Bank a surenchéri, annonçant en décembre que l'immobilier au Canada remportait la palme du marché le plus surévalué du monde, avec des prix trop élevés de 60 %.

À l'inverse, la plupart des économistes canadiens rejettent la thèse de la bulle. «Des discours alarmistes, on en entend depuis des années. Pourtant, leur pronostic ne se réalise pas, car ces analyses ne tiennent pas compte des particularités de notre marché, où les contrôles sont plus serrés qu'ailleurs», soutient Hélène Bégin. Par exemple, l'assurance prêt hypothécaire est obligatoire si les acheteurs ne disposent pas d'une mise de fonds équivalente à 20 % du prix de vente de la propriété. Autre singularité : les prêteurs évaluent la capacité des emprunteurs en fonction du taux de référence, et non en fonction du taux hypothécaire réellement consenti par les institutions financières, qui est beaucoup plus bas. «Les emprunteurs sont donc moins vulnérables aux hausses de taux d'intérêt», affirme David L'Heureux, analyste de marché à la Société canadienne d'hypothèques et de logement (SCHL).

Cependant, la principale lacune de ces scénarios apocalyptiques, c'est qu'ils ne tiennent pas compte des taux d'intérêt extrêmement bas qui ont cours actuellement. «Les études le démontrent : les versements hypothécaires respectent la capacité de payer des ménages», explique Daniel Gill, professeur d'urbanisme à l'Université de Montréal et spécialiste de l'habitation. La preuve : le taux de défaut de paiement des hypothèques se situe sous la barre du 0,5 %, selon l'Association des banquiers canadiens.

Donc, la plupart des économistes ne voient pas un effondrement de prix dans leur boule de cristal. «Ce que nous traversons en ce moment, c'est un assainissement du marché», affirme David L'Heureux. Même l'agence Fitch anticipe un «atterrissage en douceur», en raison des mesures proactives prises par le ministre Flaherty. «Les bases du marché restent solides. L'économie se porte bien, le solde migratoire est positif et les taux d'intérêt se maintiennent à des niveaux extrêmement bas», dit David L'Heureux.

Une débâcle à l'américaine à l'image de celle de 2008 évoquée par quelques observateurs semble aussi peu probable que le retour de John Lennon dans les Beatles. «Le Canada n'a jamais suivi la folie des prêts hypothécaires à haut risque», rappelle Paul Cardinal. Pour ces raisons, les acteurs du milieu ne prévoient pas de catastrophe. La SCHL prévoit une croissance du prix moyen de 0,3 % dans le marché de la revente au Québec, avec une légère baisse des prix dans le secteur de la copropriété, mais une légère augmentation dans ceux de l'unifamiliale et du plex. Desjardins s'attend à une baisse des valeurs de l'ordre de 5 à 10 % dans le marché de la copropriété, mais à la stabilité dans celui de l'unifamiliale. La FCIQ envisage une hausse des prix de 1 % dans l'unifamiliale et des prix stables dans la copropriété. Qui aura raison ? Les paris sont ouverts.

Contre-offensive des acheteurs

Dans un marché assoupli, les ménages en quête d'une propriété pourraient profiter d'un contexte favorable en 2014. Yann Lanneau et Marie Servy, un couple qui loue un logement dans le quartier Saint-Roch, à Québec, se frottent les mains. Depuis qu'ils magasinent leur future maison en banlieue, ils constatent qu'ils ont l'embarras du choix. «Les propriétés restent longtemps sur le marché. On sent que la pression est du côté des vendeurs», observe Yann, qui travaille en marketing.

Pourtant, il y a plus d'un an, ces trentenaires d'origine française, parents d'un petit garçon de trois ans, avaient tenté de naviguer dans un marché encore sous haute tension. Reluquant une belle propriété, ils avaient dû y renoncer, car plusieurs acheteurs bataillaient pour l'acquérir. Marie et Yann ont alors pris une pause. «Aujourd'hui, les probabilités d'une surenchère me paraissent peu probables. On remarque déjà quelques ajustements de prix à la baisse», dit Marie, qui travaille dans le commerce de détail.

Pour Hélène Bégin, 2014 sera une excellente période pour les acheteurs. «Avant la hausse probable des taux d'intérêt, qui s'amorcerait à partir du 3e trimestre, le marché actuel présente des occasions. C'est le moment d'en profiter avant qu'on ne retombe dans un cycle haussier», dit cette économiste. Paul Cardinal, de la FCIQ, abonde dans ce sens. «Les acheteurs ont un meilleur pouvoir de négociation, ils ont un plus grand éventail de choix et ils profitent de plus de souplesse en matière de temps, en raison de l'augmentation du délai de vente», dit cet analyste de marché. Acheteurs, à vous de jouer !

Claude Charron, propriétaire de six agences immobilières RE/MAX sur la Rive-Nord de Montréal, tempère toutefois les attentes. «Bien que le marché soit détendu, oubliez les deals ! Les propriétaires ne sont pas en mode liquidation», affirme ce courtier. Avant d'entamer les recherches, cet expert suggère aux acheteurs de bien cerner leurs besoins et de respecter leur budget. «Faites attention au tape-à-l'oeil. Inutile de s'endetter davantage pour acquérir une maison avec un bain à remous extérieur que vous n'utiliserez pas», prévient-il.

Localisation, localisation, localisation. En immobilier, on répète ce mot comme un mantra. Devant la surabondance des copropriétés, Richard Côté, président de l'Ordre des évaluateurs agréés du Québec, recommande l'achat d'une propriété bien située. «Méfiez-vous des condos qui sont situés trop loin en périphérie, comme à Val-Bélair, dans la région de Québec. Ils risquent de perdre beaucoup de valeur», dit-il. Le cas d'Otterburn Park, cité plus haut, à plus de 30 minutes de Montréal, en est un bel exemple.

Repli défensif chez les vendeurs

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