Une réforme de la gouvernance s'impose dans les hôpitaux


Édition du 22 Février 2014

Une réforme de la gouvernance s'impose dans les hôpitaux


Édition du 22 Février 2014

Pas de vérification interne

Malgré sa taille imposante, le CHUM n'a pas de service de vérification interne. C'est aussi le cas pour la presque totalité des centres de services de santé du Québec. Ceux-ci s'exposent alors à des fraudes et à d'autres malversations qui pourraient leur coûter très cher. Dans la même veine, les hôpitaux gèrent très peu les risques autres que ceux qui sont associés aux soins (risques financiers, technologiques, liés à la protection des actifs, aux ressources humaines, à la réputation, etc.).

Certains des manquements associés au CHUM résultent d'une mauvaise gestion de sa gouvernance, mais d'autres faiblesses découlent de la structure même de la gouvernance imposée par la loi. Plusieurs aspects de cette structure devraient être améliorés.

Les CA des établissements de santé comptent trop de membres (de 18 à 21, selon la loi) ; le CHUM en a 20, parmi lesquels neuf sont délégués par des groupes d'intérêt (médecins, infirmières, personnel non clinique, université, fondation, usagers). Certains de ces délégués se voient comme des représentants de leur groupe d'intérêt et non comme des mandataires de l'hôpital, et se comportent en conséquence.

Le fait que le CHUM a un comité exécutif et que certains membres du CA représentent des employés amène la direction à ne communiquer l'information sensible et certains documents qu'aux membres du comité exécutif. Il en résulte deux catégories d'administrateurs, les bien informés et les autres, ce qui crée une source de tension au sein du CA. C'est un vice de structure. Les accompagnateurs recommandent que l'on réévalue la pertinence de maintenir le comité exécutif. La tendance en gouvernance est d'éliminer les comités exécutifs.

On demande beaucoup aux administrateurs d'un centre de services de santé, et il a sûrement été frustrant pour les administrateurs du CHUM de s'être fait dire par le ministre Réjean Hébert qu'ils avaient mal accompli leur travail. Ces administrateurs ne sont pas payés, même s'ils exercent des fonctions aussi importantes que celles des administrateurs de sociétés d'État commerciales qui, eux, sont rémunérés.

Le président du conseil d'un établissement de santé, qui n'a pas de rémunération, endosse de très importantes responsabilités et il doit travailler en tandem avec le directeur général. Dans le cas du CHUM, le président du conseil doit s'assurer de l'efficacité d'un CA qui gère un hôpital doté d'un budget de 900 millions de dollars, qui emploie 12 000 personnes et qui mène à terme un projet immobilier de 2 milliards de dollars. Il faut s'ennuyer, être naïf ou être à la recherche d'une grande visibilité pour accepter une telle tâche sans rémunération et l'assumer correctement.

Il importe que Québec revoie la gouvernance de ses établissements de santé. Sans cela, il exposera les contribuables à des risques qui pourraient leur coûter très cher.

À propos de ce blogue

Tour à tour rédacteur en chef et éditeur du journal Les Affaires pendant quelque 25 ans, Jean-Paul Gagné en est l’éditeur émérite depuis 2007. En plus de publier un commentaire hebdomadaire dans le journal et de tenir un blogue dans LesAffaires.com, il participe à l’organisation d’événements et représente le journal dans les milieux d’affaires. Il est aussi appelé à commenter l’actualité dans d’autres médias et à prononcer des conférences. Jean-Paul Gagné a consacré sa vie professionnelle au journalisme économique. Avant son entrée aux journal Les Affaires, qu’il a contribué à relancer pour en faire la principale publication économique du Québec, il a passé une douzaine d’années au quotidien Le Soleil, où il était journaliste économique et cadre à la rédaction. Jean-Paul Gagné est diplômé en économie et en administration. Il a reçu de nombreuses marques de reconnaissance, dont les prix Hermès et Gloire de l’Escolle de l’Université Laval, le prix Carrière en journalisme économique de la Caisse de dépôt et placement et Merrill Lynch et le Prix du livre d’affaires remis par Coop HEC Montréal et PricewaterhouseCoopers. Il siège au conseil d’administration d’organismes sans but lucratif.

Jean-Paul Gagné

Blogues similaires

Apprendre à tourner la page

Édition du 20 Janvier 2021 | Olivier Schmouker

CHRONIQUE. J’ ai une grande nouvelle que j’ai annoncée déjà il y a quelques jours sur notre site web.