Vous avez la trouille et ça fait rire Warren Buffett

Publié le 23/02/2016 à 11:45

Vous avez la trouille et ça fait rire Warren Buffett

Publié le 23/02/2016 à 11:45

Warren Buffett. (Photo: Bloomberg)

Je me demande sur qui les chroniqueurs boursiers pourraient s’appuyer si Warren Buffett n’était pas né. Ils seraient tels des chrétiens sans Jésus.

Mais je comprends ces disciples. L’Oracle d’Omaha fait non seulement des miracles en Bourse, mais il est aussi un homme d’esprit, humble malgré sa fortune. Ses lettres destinées aux actionnaires de Berkshire Hathaway sont un réconfortant mélange de bon sens et de sagesse, servi dans une prose parfois pince-sans-rire. Avec son visage jovial, on voudrait que ce soit notre grand-papa. Il est tout le contraire du stéréotype du financier cupide prêt à vendre sa mère.

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Bref, ils sont chanceux d’avoir Warren Buffett, les chroniqueurs boursiers. J’aimerais pouvoir en dire autant, mais les voix importantes en finances personnelles passent souvent pour des « casseux de party », des curés ou des granos. Alors je vais emprunter Warren Buffett à mes collègues un instant.

Réfléchissons une minute à cette parole du patriarche de l’investissement valeur, citée ce week-end par nos blogueurs les Investigateurs Financiers dans leur dernier billet.

« La plupart des gens sont intéressés aux actions quand tout le monde l’est. Le meilleur temps pour l’être est quand personne ne l’est. Vous ne pouvez pas acheter ce qui est populaire et bien faire. »

Fermez les yeux. Pensez-y.

***

Tous les mois, l’Institut des fonds d’investissement du Canada (IFIC) publie des statistiques sur les ventes dans l’industrie canadienne des fonds communs de placement (FCP). Leurs communiqués attirent rarement mon attention, mais les données du mois de janvier publiées vendredi sont révélatrices.

Il faut savoir que janvier et février sont des mois importants pour l’industrie en raison de la « saison des REER ». Par contre, en période d’instabilité boursière et d’incertitude économique, comme en ce moment, les ventes de l’industrie déclinent.

Dans les circonstances, les statistiques de janvier publiées par l’IFIC sont doublement intéressantes. Elles nous permettent de saisir l’humeur de l’épargnant moyen.

Eh bien, on ne peut pas dire qu’il brille par son enthousiasme. En janvier 2015, l’année dernière donc, les ventes nettes de l’industrie des fonds communs s’élevaient à 5,36 milliards de dollars. Autrement dit, les Canadiens ont injecté 5,36 milliards de plus que ce qu’ils ont retiré des fonds communs. Un bon mois.

On ne peut pas en dire autant de 2016. En fait, les épargnants ont retiré plus de billes en janvier que ce qu’ils ont déposé dans les FCP, et ce en pleine saison des REER. Le montant net des rachats monte à 80 millions de dollars. N’eût été des fonds monétaires, un refuge quand les marchés boursiers sèment la crainte, la situation aurait été pire.

En un mot, janvier a été catastrophique pour l’industrie des fonds communs. C’est comme si les ventes baissaient dans les magasins entre octobre et décembre, juste avant Noël.

Mais où les gens dirigent-ils leurs épargnes? Préfèrent-ils les fonds négociés en bourse (FNB)? Ce serait normal qu’ils veuillent réduire les coûts reliés à leurs placements dans un marché baissier. À cet égard, les FNB sont nettement plus avantageux que les FCP, gangrénés par les frais de gestion.

Même ce n’est pas la réponse. La situation est moins dramatique du côté des FNB, mais le mois le janvier n’a pas été fameux pour eux non plus. Les ventes nettes se sont élevées à 144 millions de dollars en janvier, une dégringolade monumentale comparée à décembre, où les ventes nettes se sont chiffrées à 2,3 milliards de dollars.

En fait, les Canadiens sont assis sur une montagne de liquidités. Selon un rapport de CIBC Marché des capitaux publié à la fin janvier, 75 milliards de dollars dormiraient dans les comptes d’épargne, un montant record.

On a pas la tête à investir en Bourse, c’est clair.

Selon les résultats d’un sondage réalisé en février pour le compte de la Banque CIBC (une entité différente que la banque d’affaires citée plus haut), 50% des Canadiens n’envisagent pas de contribuer à leur REER pour l’année fiscale 2015 (la date limite pour les cotisations est le 29 février à minuit). Beaucoup affirment ne pas avoir les fonds nécessaires, d’autres préfèrent rembourser leurs dettes ou encore rénover leur maison. Certains affirment opter pour le CELI, mais je doute que ce soit par l’intermédiaire des actions, si je me fie aux données des sociétés de fonds communs et de fonds négociés en Bourse.

***

On peut toujours se demander que seraient les chroniqueurs boursiers sans Warren Buffett. Mais il y a une question plus intéressante encore:

Que serait Warren Buffett sans l’épargnant moyen?

Sur ce, je vous laisse sur cette autre citation de l’Oracle, tirée encore de la chronique des Investigateurs Financiers:

« Deux maladies très contagieuses, la peur et l’avidité, surviendront constamment dans le monde de l’investissement. L’occurrence de ces épidémies demeurera imprévisible. Nous tentons simplement d’être craintifs lorsque les autres sont avides, et avides lorsque les autres sont craintifs. »

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À propos de ce blogue

Les finances personnelles, ça consiste à gérer son argent au jour le jour en fonction d’objectifs plus ou moins éloignés. En regardant du bon angle, on constate qu’il s’agit d’un instrument pour réaliser ses ambitions et ses rêves. C’est avec humanité et une pointe d’humour que Daniel Germain compte aborder les finances personnelles dans ce blogue, dont l’objectif est de vous informer et de vous faire réagir. Daniel Germain assume la direction du magazine de finances personnelles Les Affaires Plus depuis 2002 et a développé de vastes connaissances sur le sujet.