Pour une révolution dans le régime des prêts et bourses

Publié le 06/03/2010 à 00:00

Pour une révolution dans le régime des prêts et bourses

Publié le 06/03/2010 à 00:00

"La pire décision, c'est la décision qu'on n'a pas prise ", dit Jean de Grandpré, qui a été le premier président de BCE, dans l'entrevue qu'il nous a accordée et que vous pourrez lire dans la section Urgence Leadership, à la page 28.

On peut appliquer son observation à l'inexcusable inaction de différents gouvernements québécois sur la question des droits de scolarité universitaires. De 1994 à 2007, les droits étaient gelés à 1 668 $ au Québec, tandis qu'ils passaient en moyenne de 2 000 à 4 300 $ ailleurs au Canada. En chemin, les universités québécoises ont ajouté ce qu'on appelle poliment des " frais afférents ", qui s'élèvent aujourd'hui à 600 $, mais les universités des autres provinces appliquent aussi des frais semblables.

Dans les faits, en gelant une partie substantielle du financement de nos universités, Québec les a lentement asphyxiées. Par électoralisme ou par manque de vision, les politiciens québécois ont remis à plus tard les décisions qui s'imposaient.

La facture risque maintenant d'exploser. Depuis 2007, les droits augmentent de 50 $ par semestre, mais ce n'est pas suffisant pour combler l'énorme manque à gagner des universités. Les signataires du Pacte pour un financement concurrentiel des universités - parmi lesquels figurent de nombreuses personnalités qui sont ou qui ont été associées au milieu universitaire -, l'évaluent à 500 millions de dollars par an. Or, les finances publiques sont dans un état lamentable et le gouvernement devra sabrer les dépenses. Il se tournera donc vers les étudiants, qui devront payer pour l'incurie d'hier.

Certains peuvent payer davantage, surtout si leur carrière future leur garantit des revenus supérieurs. Cependant, c'est loin d'être le cas pour tous. Après tout, le chemin parcouru depuis la Révolution tranquille, il serait tragique d'assister à une baisse des inscriptions universitaires parce que des jeunes n'auraient plus les moyens de se payer des études supérieures. Revenir en arrière ? C'est hors de question. Pour être concurrentiels dans cette économie du savoir, nous devons compter sur des compétences spécialisées.

Voici donc le dilemme. Les droits devront augmenter, sans quoi les universités vont sombrer dans la médiocrité. D'un autre côté, il est impensable que les étudiants démunis désertent les salles de cours. Il faudra donc donner un coup de main à ceux qui en ont besoin, et régénérer le régime des prêts et bourses, qui ne suffit déjà pas à la tâche.

Comment ? Une fois de plus, oubliez le gouvernement. Les signataires du Pacte suggèrent que 30 % des droits supplémentaires versés aux universités viennent gonfler les fonds disponibles pour les bourses, et que le capital soit géré localement. Amasser davantage d'argent en amont pour donner plus en aval ? Il faudrait garantir ce retour de fonds.

Et si on trouvait d'autres façons de renflouer les coffres ? Je suggère deux pistes.

La première ne sera pas instantanément populaire, j'en conviens. On souligne de plus en plus que les entreprises québécoises pâtiront du manque de ressources spécialisées, techniques et universitaires. Il est temps de joindre le geste à la parole, d'être conséquent. Compte tenu de la nécessité de maintenir la santé financière des universités et de leurs étudiants, les entreprises pourraient être mises à contribution sous forme d'une taxe ou d'un impôt spécial, récurrent, destiné entièrement aux bourses étudiantes. Ce serait logique, puisque notre prospérité dépend d'une relève bien outillée.

En même temps, on pourrait inciter les citoyens à contribuer à ce fonds, sous forme de contributions déductibles du calcul du revenu, comme le sont les contributions aux partis politiques.

À la limite, les sommes pourraient être gérées par un organisme indépendant pour assurer qu'on n'aille pas y piger pour rénover le système de climatisation ou pour moderniser les gymnases. Il faudrait aussi s'assurer que les bourses soient attribuées en fonction des besoins des étudiants, et non pas de leur choix de carrière. L'université utilitariste, non merci.

C'est vrai que nous sommes surtaxés, siphonnés... Mais nous n'avons pas su, ou voulu, prendre les décisions qui s'imposaient quand c'était le moment. Pour assurer notre avenir, nous devons maintenant réagir, sans décourager les jeunes qui ont le seul désavantage d'être arrivés sur les bancs universitaires plus tard que leurs aînés.

De mon blogue

www.lesaffaires.com/rene-vezina

Dans la vie, on n'a rien pour rien

Le taux de diplomation universitaire au Québec demeure l'un des plus faibles au Canada, bien que les droits de scolarité y soient moins élevés qu'ailleurs.

Vos réactions

" Je crois qu'on devrait tout faire pour inciter le peu d'étudiants qui réussissent à se rendre jusqu'au niveau universitaire, à y rester. Nous aurons besoin de travailleurs qualifiés dans quelques années pour faire vivre les baby-boomers retraités. "

- D. Gagnon

" Ce qui nous fait mal, c'est de dépenser une fortune pour les étudiants qui vont éventuellement s'exiler. Combien de médecins, d'infirmiers, d'ingénieurs, d'informaticiens ont profité d'une éducation supérieure pour aller payer de l'impôt en Ontario et partout ailleurs ? "

- 4Wire

" Certains étudiants peinent vraiment pour vivre, et les programmes de prêts et bourses devront en tenir compte. Il faudrait aussi augmenter les frais de garderies, de 7 à 10 $ par jour. Et ce commentaire vient d'un parent qui envoie deux enfants à la garderie ! "

- Nararro

rene.vezina@transcontinental.ca

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