Bernanke mérite une statue

Publié le 15/09/2012 à 00:00, mis à jour le 13/09/2012 à 09:09

Bernanke mérite une statue

Publié le 15/09/2012 à 00:00, mis à jour le 13/09/2012 à 09:09

Tout personnage public doit s'attendre à recevoir sa part de critiques et de commentaires plus ou moins justifiés. C'est normal et cela fait partie de nos sociétés démocratiques où tout le monde a le droit de parole.

Internet a grandement facilité ce phénomène, donnant l'équivalent d'un micro à tous les citoyens.

Cela dit, je n'en reviens tout simplement pas des commentaires, voire des injures dont fait l'objet Ben Bernanke, grand patron de la Réserve fédérale, la banque centrale américaine.

Je l'ai observé sur mon propre blogue, sur les blogues de collègues et concurrents ici au Québec et également sur de nombreuses tribunes aux États-Unis.

« Il est pire qu'insignifiant ; il est incompétent. » ; « C'est un clown. » ; « Il mérite bien son surnom de Bugs Benny. »

Et ce n'est qu'un petit échantillon de commentaires provenant des deux côtés de la frontière.

Je ne connais pas personnellement M. Bernanke. Toutefois, lorsque je prends connaissance de sa feuille de route et surtout de ses décisions depuis 2006 lorsqu'il a été nommé à la présidence de la Fed, je ne peux que lui témoigner un très grand respect. Ce n'est pas que je sois nécessairement d'accord avec chacune de ses décisions. Mais, en constatant les circonstances exceptionnelles dans lesquelles il s'est retrouvé et la pression qui pesait sur lui, je me dis que Ben Bernanke s'approche davantage du niveau de héros que de celui de zéro que semblent lui accoler bien des gens.

Un certain 18 septembre 2008

Peut-être n'a-t-on pas saisi jusqu'à quel point les circonstances étaient exceptionnelles, ou peut-être l'a-t-on oublié...

C'était il y a quatre ans, dans l'après-midi du 18 septembre 2008, trois jours après la faillite de Lehman Brothers. Ben Bernanke et Henry Paulson, secrétaire au Trésor, avaient rassemblé un groupe de sénateurs et de représentants des deux partis - républicains et démocratesdu gouvernement américain. Après avoir remercié les sénateurs de leur présence, M. Paulson leur a demandé de bien écouter ce que M. Bernanke avait à dire. Peu enclin à l'hyperbole, ce dernier a parlé calmement :

« Toute ma vie adulte, j'ai étudié la grande dépression et ses causes. Le crédit a la capacité de bâtir une économie moderne. L'absence de crédit peut la détruire. Rapidement et complètement. Si nous n'agissons pas de façon audacieuse, et immédiatement, nous revivrons la Crise des années 1930. Mais cette fois, elle sera bien pire. D'ici 24 à 48 heures, nous assisterons à un effondrement total de notre système financier. Nos plus importantes institutions financières s'écrouleront. Des milliers d'entreprises feront faillite. Des millions de gens perdront leur emploi. Si nous n'agissons pas maintenant, nous n'aurons pas d'économie lundi. »

Le président de la Fed a alors fait une pause pendant que sénateurs et représentants étaient sans voix. Ils n'avaient jamais entendu une évaluation aussi noire, pratiquement apocalyptique de la situation.

Après le choc, ils lui ont demandé ce qu'ils devaient faire. C'est ce qui a mené à l'adoption du programme TARP (« Troubled Asset Relief Program ») créé pour acheter la dette illiquide des institutions financières, de façon à permettre aux banques de prêter de nouveau.

Des remerciements de Warren Buffett

L'adoption du programme TARP est un rare acte de courage politique, car, comme le disait un sénateur, les électeurs s'y opposaient à 15 000 contre un !

C'est en grande partie en raison de la réputation de M. Bernanke, de sa compétence et de sa grande crédibilité que les politiciens ont décidé de mettre leurs différends politiques de côté et de travailler ensemble pour résoudre cette crise.

Le célèbre investisseur Warren Buffett a vécu cette crise, aux premières loges lui aussi, étant sollicité de toutes parts. « Il n'y avait aucune possibilité de se cacher. Une puissance économique destructrice jamais vue pendant des générations avait été déclenchée », a-t-il écrit dans une lettre publiée dans le New York Times, en novembre 2010. Dans cette lettre, il remercie publiquement Ben Bernanke et Henry Paulson.

M. Buffett sait que l'économie et le système financier étaient au bord de l'écroulement total il y a quatre ans. C'est dans ces moments qu'on reconnaît les vrais leaders, entre autres dans leur capacité à rallier des décideurs d'opinions et d'intérêts opposés.

M. Bernanke a su faire cela avec brio. Avec le grand luxe du recul, on peut certes analyser et critiquer ses décisions. On peut également se plaindre que la reprise économique a été faible depuis et que la création d'emplois est décevante. C'est vrai. Mais il faut surtout se rappeler que, si on a une économie fonctionnelle aujourd'hui, c'est grâce aux interventions audacieuses de Ben Bernanke.

Juste pour cela et aussi pour faire une grimace à ses critiques, on devrait lui ériger une statue, dans toutes les capitales des pays industrialisés. Il l'a bien méritée !

DE MON BLOGUE

Élections

Attaquer les épargnants Plusieurs lecteurs m'ont transmis leurs réactions à l'égard de certaines promesses qui, selon eux, n'ont pas été beaucoup abordées dans les médias, comme l'intention du Parti québécois et de la Coalition avenir Québec d'augmenter les impôts payés sur les dividendes et les gains en capital. Le PQ veut réduire de moitié les crédits d'impôt sur les dividendes et taxer les gains en capital à 75%, au lieu de 50% actuellement. La CAQ souhaite aussi augmenter l'imposition sur les gains en capital. C'est une attaque vicieuse contre les épargnants. En effet, avec des taux d'intérêt déprimés, de plus en plus d'épargnants n'ont pas d'autres choix que de se tourner vers les titres offrant des dividendes élevés. Ils pourraient avoir la désagréable surprise de verser une partie de leurs revenus supplémentaires à l'État.

Vos réactions

« Ce n'est pas évident d'être capitaliste au Québec par les temps qui courent. » - Rejean Pesant

« Il devrait y avoir une échelle d'impôt pour le dividende en fonction du nombre d'actions que l'on possède. » - trudelpi9

« Le Québec est une société qui est mal à l'aise avec l'investissement et la richesse. » - ww

bernard.mooney@tc.tc

blogue > www.lesaffaires.com/bernard-mooney

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