«Si Ottawa disait oui à CNOOC, ce serait un signe de maturité de sa relation avec Beijing» - Raymond Chrétien, de Fasken Martineau

Publié le 03/11/2012 à 00:00

«Si Ottawa disait oui à CNOOC, ce serait un signe de maturité de sa relation avec Beijing» - Raymond Chrétien, de Fasken Martineau

Publié le 03/11/2012 à 00:00

Ottawa annoncera d'ici le 11 novembre s'il autorise ou non le rachat de la pétrolière albertaine Nexen par la société d'État chinoise CNOOC. Pourquoi la presse, les gouvernements et les investisseurs à l'étranger accordent-ils tant d'importance à cette transaction ?

Elle est fondamentale. Premièrement, le Canada devra investir 630 milliards de dollars d'ici 2020 pour développer ses ressources énergétiques. Le pays ne peut y arriver sans l'apport de capitaux étrangers. L'offre d'achat de 15 G$ de Nexen par CNOOC s'inscrit dans cette stratégie d'attraction d'investissements étrangers. Deuxièment, cette transaction place le Canada dans une situation délicate à l'égard des États-Unis, notre principal partenaire économique, qui ne voient pas d'un bon oeil cette offre d'achat. Ottawa devra tenir compte de sa relation avec ces deux géants lorsqu'il tranchera. Troisièmement, ce rachat soulève des questions de sécurité nationale, comme le soulignaient les services secrets canadiens. Elle pourrait par exemple permettre à Beijing d'obtenir des informations stratégiques sur nos ressources naturelles ou de transférer des technologies en Chine.

Si Ottawa la refuse, quelles seraient les conséquences sur les relations entre le Canada et la Chine ?

Après le rejet de l'offre d'achat de la canadienne Progress Energy Resources par la malaisienne Petronas, le 19 octobre, dire non à CNOOC enverrait certainement un message qui risquerait de refroidir les ardeurs des investisseurs étrangers. Ce pourrait être vu comme un geste de fermeture. Le gouvernement chinois s'en souviendrait ! Cela pourrait prendre du temps avant que la Chine ne songe à réaliser d'autres projets d'envergure au pays. Il y aurait aussi un refroidissement des relations diplomatiques. L'ambassadeur canadien à Beijing le sentirait rapidement. Enfin, le Canada se priverait d'un marché important pour exporter son pétrole.

Et quelles seraient les retombées positives d'un feu vert ?

Nous indiquerions à la planète que nous sommes ouverts aux investisseurs. Cela aiderait sans doute à faire avancer l'idée d'amorcer un jour des négociations de libre-échange entre le Canada et la Chine. Cela enverrait aussi un signal clair aux États-Unis que, s'ils ne veulent pas de nos ressources [l'administration Obama a suspendu le projet d'oléoduc Keystone XL de TransCanada entre l'Alberta et le Texas], nous pouvons les vendre ailleurs. Enfin, un oui à cette transaction serait un signe de maturité de la relation entre le Canada et la Chine. Un signe que, même si la Chine est dirigée par un gouvernement communiste et que les règles commerciales y sont différentes, le Canada peut faire la part des choses.

CV

Nom : Raymond Chrétien

Titre : Associé et conseiller stratégique chez Fasken Martineau

ÂGE : 70 ans

Ex-ambassadeur du Canada en France, aux États-Unis, en Belgique, au Mexique et au Congo, il est spécialisé en droit des sociétés et en droit commercial, en relations gouvernementales et en règles d'éthique, de même qu'en affaires autochtones.

15 G$

Montant, en dollars canadiens, que la société d'État chinoise China National Offshore Oil Corporation (CNOOC) offre pour acheter la pétrolière albertaine Nexen.

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