Mathieu Pellerin rêve du jour où les meubles écolos seront aussi connus que les tomates bio. Mais pour l'instant, il fait oeuvre de pionnier au royaume du prêt-à-jeter.
" Le meuble est un domaine basé sur la consommation rapide. Les gens changent d'armoire de salle de bain pour être à la dernière mode, sans calculer le coût environnemental d'une telle attitude ", déplore-t-il.
Diplômé de l'École nationale du meuble et de l'ébénisterie, le jeune homme de 33 ans a ouvert son atelier en 2008, rue Masson, à Mont-réal : Matpel, ébénisterie écologique. Pour éviter la tentation de s'écarter de sa mission, il l'a inscrite dans le nom de son entreprise. Une façon de ne pas dévier de l'objectif qu'il s'est fixé en se lançant en affaires : teinter de vert l'in- dustrie québécoise du meuble.
L'ébéniste s'inspire de l'esprit des meubles d'antan, qu'on se passait d'une génération à l'autre. " Mes meubles sont plutôt modernes, mais ils sont solides, durables. Leur esthétique est simple, si bien qu'on n'a pas le réflexe de s'en débarrasser. "
Limiter ses transports
Soucieux de son empreinte environnementale, l'ébéniste évite le plus possible d'utiliser des bois exotiques, qui viennent de loin et qui émettent des GES durant leur voyage. " En analysant le cycle de vie de mes produits, j'ai compris que c'est le transport qui est le plus nocif pour l'environnement ", note-t-il.
Il privilégie donc plutôt des essences locales, cultivées au Québec ou dans le nord-est des États-Unis, comme l'érable, le chêne, le noyer et le cèdre. Il opte également pour des produits FSC (Forest Stewardship Council), une certification qui garantit la gestion durable de la forêt d'où vient le bois.
Contreplaqués sans formaldéhyde ni composés organiques volatils (COV), laques et vernis à l'eau, teintures biodégradables et colle écologique font également partie de la palette de l'ébéniste écolo. De plus, quand le projet est sur les planches à dessin, il tente de minimiser le gaspillage de ressources. " Ma philosophie est de rendre chaque projet un peu plus vert qu'il ne l'était au départ. "
Mathieu Pellerin n'a pas choisi l'ébénisterie écologique pour l'argent. Son travail aurait été beaucoup plus payant s'il avait travaillé dans une grande entreprise à produire des armoires en série. Il agit plutôt par conviction, même si ce n'est pas toujours à son avantage. Ainsi, il lui arrive parfois de rogner sur ses profits pour acheter du bois certifié FSC pour des clients, même si ceux-ci ne l'avaient pas exigé.
Même si les fins de mois ne sont pas toujours faciles, pas question de changer de voie. Pour Mathieu Pellerin, l'écologie ne se réduit pas à une marque de commerce. C'est un mode de vie. À preuve, il se déplace à vélo et garde des horaires flexibles pour passer du temps avec ses deux enfants. Même chose avec ses employés. " Je pense qu'il faut qu'il y ait une pérennité dans ce qu'on entreprend ", soutient-il. Il espère bien que, grâce à son travail, il réussira à mettre ce concept sous les projecteurs.
