Les minières ont un dream pour former les Autochtones

Publié le 13/10/2012 à 00:00, mis à jour le 11/10/2012 à 09:51

Les minières ont un dream pour former les Autochtones

Publié le 13/10/2012 à 00:00, mis à jour le 11/10/2012 à 09:51

Pas facile d'attirer, de former et de retenir la main-d'oeuvre autochtone dans le secteur minier. Le nombre de membres des Premières Nations expérimentés dans l'exploitation minière, surtout souterraine, est limité. Et le taux de roulement, lui, est élevé.

Pourtant, nombreuses sont les minières qui misent sur ces bassins de main-d'oeuvre pour la réussite de leurs projets. Elles s'y sont souvent engagées dans le cadre d'ententes sur les répercussions et avantages (ERA) signées avec les communautés autochtones.

Une nouvelle piste de solution vient d'être tracée. Il s'agit du modèle «DREAM» dont l'acronyme veut dire : Développement Rétention Emploi Autochtone Minier.

L'originalité de ce programme - que le Comité sectoriel de la main-d'oeuvre de l'industrie minière (CSMO-Mines) a mis deux ans à créer en partenariat avec l'industrie et les Premières Nations - réside dans le fait qu'il transmet aux étudiants non seulement des savoirs et des savoir-faire, «mais aussi des savoir-être» , a expliqué Michel Bélanger, directeur général de l'organisme, lors d'une conférence sur les partenariats autochtones organisée par le Groupe Les Affaires, le 27 septembre à Montréal.

«DREAM est plus qu'une formation technique. Il permet aussi à l'employé d'être plus responsable, plus autonome et mieux intégré au sein de l'entreprise», a-t-il ajouté.

On l'aura deviné, la démarche va plus loin que l'embauche d'un diplômé. Mais elle facilite son intégration durable à l'industrie. «DREAM n'a pas été conçu comme un programme pour répondre aux besoins urgents en main-d'oeuvre, concède M. Bélanger en entrevue à Les Affaires. Mais nous croyons qu'il sera plus durable, car au bout du compte, ce sont l'individu, l'entreprise et la communauté qui y gagneront. On aura un employé autochtone qui fera carrière dans les mines et servira de modèle de réussite pour sa communauté.»

Apprendre l'essentiel des mines

Après deux rencontres et une visite de la mine, les étudiants autochtones reçoivent une première formation de 240 heures, qui s'appelle l'«Essentiel des mines».

«C'est ici que l'Autochtone se familiarisera avec le travail dans les mines. Il acquerra des connaissances, mais aussi des compétences de vie, comme apprendre à apprendre, ouvrir un compte bancaire, être à l'heure, se faire confiance, être responsable par rapport à sa famille, etc.», précise M. Bélanger, sans manquer de souligner que la formation sera donnée par deux formateurs, l'un, autochtone et l'autre, de la minière. Parallèlement à cette démarche, l'étudiant mettra les enseignements en pratique dans la communauté et dans la mine, pendant 120 heures de plus.

Viennent ensuite trois autres formations, d'un total de 28 heures, en santé, sécurité, règlements, produits dangereux, etc.

En fin de compte, ce sont environ quatre mois de formation qui mènent à une certification délivrée par le Conseil des ressources humaines de l'industrie minière du Canada.

Dans un deuxième temps, l'entreprise proposera un stage de six mois rémunéré au finissant, pour lui permettre de se frotter à plusieurs milieux et tâches. Au terme du stage, il pourra être dirigé vers le Programme d'apprentissage en milieu de travail (PAMT), qui mène à un métier spécifique et à une certification professionnelle. Si ce métier figure dans le registre des compétences du gouvernement québécois, le PAMT sera subventionné par un organisme provincial, le Fonds de développement et de reconnaissance des compétences de la main-d'oeuvre (FDRCMO). Sinon, il sera aux frais de la minière. Une autre possibilité se présente après le stage : une formation menant à un diplôme de secondaire V, et payée par le CSMO. Ensuite, l'embauche devient permanente.

Diversité culturelle

Mais là ne s'arrête pas l'engagement de la minière. Il faudra ensuite qu'elle offre une formation de cinq heures en «gestion de la diversité culturelle» à ses superviseurs, qui apprendront à mieux comprendre les traits culturels des Autochtones. Un exemple ? «Ne pas s'offusquer lorsqu'un Autochtone ne vous regarde pas dans les yeux ; et être plus précis quand on lui demande une tâche. Ne pas dire 'fais-en le plus possible', mais dire 'fais-en douze '», mentionne M. Bélanger. Dans le cadre d'une autre démarche, la minière offrira une «formation culturelle en travail minier» de cinq heures à 40 % de ses employés. Ces deux formations ont été bâties par l'Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue, précise M. Bélanger.

L'entreprise minière devra finalement élaborer une politique d'intégration culturelle, avec le soutien du CSMO. Ainsi, elle deviendra «un employeur de choix», dit M. Bélanger.

Combien ça coûte ?

La minière n'a qu'à payer pour 180 heures de formation, plus 1 000 $ au Fonds de développement et de reconnaissance des compétences de la main-d'oeuvre du Québec. Le CSMO, lui, forme les formateurs, leur fournit le matériel pédagogique et le soutien nécessaire à l'application du cursus. Il fournit le personnel qui suivra tous les processus du DREAM.

Pour l'instant, aucune minière actuellement en exploitation n'est engagée dans cette démarche. Des pourparlers ont été entamés avec Osisko, Tata Steel, Goldcorp, Métanor, Alexis minerals et Machine Roger, notamment.

«Les minières ont leur programme fait sur mesure», ajoute M. Bélanger. «Mais nous espérons que DREAM intéressera les nouvelles minières qui s'établiront bientôt au Québec», précise-t-il, alors qu'il en dénombre 26 dans les prochaines années.

Chez Goldcorp, le responsable des ressources humaines, Daniel Duguay, juge très favorablement le modèle DREAM. «C'est une façon novatrice d'envisager le développement des compétences chez les Autochtones. Le modèle est viable, il tient la route. Nous ne l'utiliserons pas à l'étape de la construction de la mine, mais nous allons l'examiner de près pour plus tard», a-t-il dit.

Quant aux Autochtones, ils l'examinent. Des contacts ont été établis avec le Cree Human Ressources Development, de même qu'avec la Commission de développement des ressources humaines des Premières Nations du Québec, qui représente les nations non conventionnées et l'Administration régionale de Kativik, au Nunavik.

55,5 %

Taux de rétention des travailleurs autochtones permanents à la mine Raglan, au Nunavik

Source : XStrata Nickel Mine Raglan, 2011

58 %

Pourcentage des minières préoccupées par l'intégration de leur main-d'oeuvre autochtone

33 %

Pourcentage des entreprises qui ont une politique d'intégration

Source : CSMO Mines

suzanne.dansereau@tc.tc

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