Quand maman se lance en affaires

Publié le 02/07/2009 à 14:02

Quand maman se lance en affaires

Publié le 02/07/2009 à 14:02

Par lesaffaires.com

Diana Parada, co-fondatrice de Maman Kangourou, fait partie d'un nouveau type d'entrepreneurs au Québec: les mamantrepreneures.


 Quand Sandra Wilson a fondé Robeez, elle ne s'attendait sûrement pas à ce que son entreprise affiche un chiffre d'affaires annuel de plus de 15 M$ US. Mme Wilson a vendu son entreprise de fabrication de chaussons en cuir pour tout-petits fondée il y a 15 ans dans le sous-sol de sa résidence de Colombie-Britannique, à l'américaine Stride Rite en 2006, mais son histoire à succès est une incitation pour bien des mères à se lancer dans les affaires. De fait, les femmes qui s'inspirent de leur maternité pour démarrer une entreprise, les " mamanentrepreneures ", sont de plus en plus nombreuses au pays. Les exemples abondent : Bébé Chic (vêtements pour les 0-6 ans) à Montréal, Age Design (mobilier pour enfants) à Verchères, Organickidz (biberons en acier inoxydable) à Calgary, ou Tiny Hands Talk (cours de langage des signes) à Edmonton."

Aujourd'hui, au Canada, trois PME sur cinq sont créées par des femmes, dont 80 % sont mères ", affirme Kathryn Bechthold, qui a lancé le magazine Mompreneur il y a trois ans. L'entreprise de cette mère de deux jeunes enfants organise des expositions commerciales réservées aux mères entrepreneuses à Toronto, Edmonton, Calgary et Vancouver.

Concilier travail et famille

Le plus souvent, les mamanentrepreneures se lancent après avoir décelé un besoin pour leur poupon. Elles élaborent un produit ou un service pour y répondre, le testent elles-mêmes au quotidien et demandent à leurs copines d'en faire autant. Puis, elles créent leur entreprise.

Josée-Mélanie Lupien, cofondatrice d'Oddbuttons, résume bien ce qui pousse les mères à devenir entrepreneures. " Le désir de me réorienter vers un travail correspondant à mes valeurs et offrant des horaires flexibles pour profiter au maximum de ma jeune famille m'a poussée vers un modèle d'entreprise qui me permettait de travailler de chez moi sans nécessiter de gros investissement financier au démarrage ", dit celle qui fabrique des coussins et des couvertures pour bébé distribués par Internet et dans des boutiques spécialisées.

De fait, la conciliation travail-famille est au coeur du phénomène. " Les temps changent, mais les mesures de conciliation offertes par les employeurs aux salariées à temps plein n'évoluent pas assez vite au goût de bien des femmes ", constate Mme Bechthold.

" Quand les mères décident de devenir entrepreneures, elles font un choix de vie : être avec leur famille tout en exerçant leur créativité ", ajoute-t-elle.

Nicole Beaudoin, pdg du Réseau des femmes d'affaires du Québec, nuance ce facteur. " Ce n'est pas seulement une question de conciliation travail-famille. Les mères qui démarrent leur entreprise à l'âge de 45 ans, alors que leurs enfants sont grands, ont été bien traitées avant cela. Mais elles n'ont pas nécessairement pu exprimer leur créativité. Dans une grande entreprise, on évolue dans un cadre très rigide. Les femmes se lancent pour se réaliser à titre personnel ", dit-elle.

Des professionnelles accomplies

Les mamantrepreneures sont surtout des femmes qui avaient une carrière avant de devenir mères, estime Nicole Beaudoin.

Les Canadiennes ont en moyenne 28 ans quand naît leur premier bébé, et les mères de près de 10 % des enfants de moins de 4 ans sont dans la quarantaine, selon Statistique Canada.

Les mamantrepreneures sont des professionnelles accomplies occupant des postes qui exigent de longues heures de travail. Des contraintes qu'elles jugent incompatibles avec leur situation. En créant leur emploi, elles espèrent passer plus de temps avec leur enfant.

Mais cet espoir est souvent déçu par les exigences liées à la création d'une entreprise. Car qui dit horaire flexible ne dit pas nécessairement moins de temps passé à travailler. Les mamantrepreneures travaillent tout le temps et partout, dans les cafés, sur les bancs de parc ou les gradins d'aréna.

" Elles travaillent bien souvent plus que si elles occupaient un emploi de 9 à 5, mais elles ont le choix de leur horaire. Elles peuvent travailler le samedi ou le soir, quand les enfants sont couchés ", explique Nicole Beaudoin.

Elles sont expertes dans la rentabilisation du temps. " Les mamantrepreneures sont une race d'entrepreneurs à part. Quand on veut être à la fois mère de famille et chef d'entreprise, l'agenda devient très serré et chaque instant doit être consacré à des choses qui comptent ", dit Kathryn Bechthold.

À cet égard, les nouvelles technologies leur facilitent grandement la vie. " Il existe tellement d'outils, cela donne confiance aux femmes ", constate Zoonie Nguyen, fondatrice de Talentelle, un organisme montréalais qui offre de la formation aux créatrices d'entreprise.

Les blogues et les réseaux sociaux pour se faire connaître, Audacity pour monter des vidéos promotionnelles, SurveyMonkey pour sonder le marché... les outils accessibles sont une des locomotives du phénomène.

Au Québec, la multiplication des mamantrepreneures s'explique aussi par les longs congés de maternité dont bénéficient toutes les femmes, qu'elles soient salariées ou travailleuses autonomes. Une année qui laisse le temps à plusieurs de prendre conscience de leurs aspirations et de leur créativité et de peaufiner leur projet d'entreprise.

Les services de garde étant très coûteux ailleurs au Canada, on peut penser que les mères estiment qu'il n'est pas rentable de retourner travailler à l'extérieur et préfèrent créer leur propre emploi.

Enfin, des sources de financement réservées aux femmes expliquent la croissance du phénomène. L'an dernier, Québec a presque doublé le nombre d'organismes régionaux de soutien à l'entrepreneuriat féminin, le portant à 11 et le dotant d'une enveloppe de 5,7 millions de dollars à investir d'ici le 31 mars 2010.

DIANA PARADA, COFONDATRICE DE MAMAN KANGOUROU ET MÈRE DE DEUX ENFANTS (9 ET 6 ANS)

En 2003, Diana Parada et Catalina Gonzalez se cousent des porte-bébés inspirés des modèles traditionnels de leur pays d'origine, la Colombie. Devant l'intérêt d'autres parents pour leur porte-bébé et cherchant à concilier " maternage et vie professionnelle ", elles créent leur entreprise. En 2007, Maman Kangourou ouvre, à Montréal, la boutique Maman Kangourou, qui organise des ateliers pour les parents et leurs enfants et distribue des produits favorisant l'achat local.

> Entreprise : Maman Kangourou, créée en septembre 2003, à Gatineau (http://www.mamankangourou.com/).

> Effectif : 50 emplois dont 35 indirects.

> Produits : Porte-bébés en tissu et autres produits de puériculture naturels et équitables.

> Financement : Les deux associées se sont lancées avec 800 $ et une carte de crédit. Elles ont par la suite reçu le soutien de plusieurs partenaires, dont le CLD de Gatineau, la CDEC de Côte-des-Neiges et la Banque de développement du Canada.

> Rentabilité : Après 10 mois d'exploitation, le chiffre d'affaires a atteint 74 000 $. Il a ensuite doublé ou triplé chaque année jusqu'en 2008, année où l'activité a été freinée par le ralentissement économique et la concurrence.

> Difficultés : Travailler en français quand on est hispanophone, trouver des fournisseurs de tissus au Québec et... concilier travail et famille !

> Succès : Avoir diversifié l'entreprise pour qu'elle soit plus stable financièrement. Lauréate, en 2004, de trois prix au Concours québécois en entrepreneuriat.

> Un conseil aux aspirantes : La seule façon de se faire connaître est de passer à l'action grâce à un plan d'affaires. " Mes enfants ne m'ont jamais empêchée de réussir. Il faut juste avoir de la persévérance, de la patience et de la créativité pour tout concilier ", dit Mme Parada.

JOSÉE-MÉLANIE LUPIEN, COFONDATRICE D'ODDBUTTONS ET MÈRE DE DEUX ENFANTS (2 ET 5 ANS)

Suivant son mari en Colombie-Britannique, Mme Lupien, qui possède un baccalauréat en administration, cherche un emploi dans le domaine de la gestion touristique. En vain. Elle décide alors de réaliser un vieux rêve : démarrer une entreprise avec son ami d'enfance, Sébastien Lepitre, en accord avec leurs valeurs de consommation responsable.

> Entreprise : Oddbuttons, créée en 2008 à Victoria, en Colombie-Britannique et déménagée en juin 2009 à Sutton, dans les Cantons-de-l'Est (http://www.oddbuttons.com/).

> Effectif : Les deux fondateurs.

> Produits : Couvertures et coussins pour bébé, faits de matériaux recyclés ou naturels, voire biologiques.

> Financement : Les économies et le crédit du couple. Prochaine étape, la recherche de subventions et d'un microprêt pour renforcer le marketing.

> Rentabilité : D'ici trois ans, selon les deux cofondateurs.

> Difficultés : Démarrer une entreprise offrant des produits design en plein marasme économique, alors que les consommateurs renoncent aux achats impulsifs. " Mais cela nous oblige à cibler plus efficacement notre marché ", dit Mme Lupien.

> Succès : Avoir figuré sur la première page du site d'artisanat design Etsy.com.

> Un conseil aux aspirantes : Connaissez les limites de ce que vous pouvez demander aux membres de votre famille, tous concernés par votre entreprise. Sont-ils prêts à sacrifier certaines activités en famille ? Votre conjoint prendra-t-il le relais les soirs et les fins de semaine ?

NAOMI GOLDAPPLE, FONDATRICE DE MAMAN, BÉBÉ ET CAFÉ ET MÈRE DE TROIS ENFANTS (1, 5 ET 7 ANS)

Mme Goldapple a travaillé pendant cinq ans pour IBM, à Toronto, qui l'avait recrutée alors qu'elle terminait son MBA. Elle accepte ensuite le poste de directrice, commerce électronique, de Royal LePage Commercial, toujours à Toronto. Six mois plus tard, la bulle techno éclate et son équipe est réduite. Elle décide que le moment est venu d'avoir un enfant. Pendant son congé, elle regrette de ne trouver aucun endroit qui la sorte de son isolement. Elle imagine alors un lieu de rencontre qui réponde aux besoins des jeunes parents, réalise une étude de marché et de nombreux groupes de discussion et, à son arrivée à Montréal, elle lance son entreprise.

> Entreprise : Maman, Bébé et Café, créée en janvier 2007, à Montréal (http://www.php.mamanbebecafe.com/).

> Effectif : De 7 à 9 employés, selon la saison.

> Produit : Lieu de rencontre pour les parents et leurs jeunes enfants offrant des activités sportives et créatives, des collations et un service de halte-garderie.

> Financement : Apport personnel, petit prêt d'entreprise garanti par le gouvernement fédéral, subvention SAJE du gouvernement provincial.

> Rentabilité : La microentreprise a été rentable dès ses débuts.

> Difficultés : L'objectif de chiffre d'affaires a été atteint dès la première année, mais les coûts ont dépassé le budget.

> Succès : Avoir redonné le sourire à des mères submergées par leur nouveau rôle. Lauréate, en 2007, du Concours québécois en entrepreneuriat et du Défi de l'entrepreneuriat au féminin de Montréal. Finaliste, en 2008, du Prix Femmes d'affaires du Québec.

> Un conseil aux aspirantes : Ayez assez de liquidités pour résister aux baisses saisonnières. Soyez professionnelle, prenez-vous au sérieux et attribuez-vous un vrai salaire dans votre plan d'affaires.

Après avoir exploité son café pendant trois ans, Mme Goldapple a malheureusement choisi de le fermer, les locaux ne répondant plus à ses besoins.

SANDRA WILSON, FONDATRICE DE ROBEEZ ET MÈRE D'UN ADOLESCENT DE 16 ANS.

En 1994, Mme Wilson perd son emploi au service d'une compagnie aérienne. Elle profite de l'occasion pour coudre des chaussons en cuir souple à son fils Robert, âgé de 18 mois. Le bébé adore, et Mme Wilson décide d'en fabriquer 20 paires qu'elle présente au Salon du cadeau de Vancouver en 1994. Succès immédiat. Mme Wilson baptise sa petite entreprise Robeez en l'honneur de son fils.

> Entreprise : Robeez, créée en 1994 à Vancouver, en Colombie-Britannique, revendue en septembre 2006 au groupe américain Stride Rite (http://www.robeez.com/).

> Effectif : Environ 400 employés.

> Produits : Chaussons et chaussures à semelle souple pour enfants de 0 à 4 ans, distribués sur Internet et dans plus de 4 500 magasins sur quatre continents.

> Rentabilité : Il lui a fallu six ans pour égaler le salaire qu'elle gagnait lorsqu'elle était employée. En 2001, les ventes atteignent 1,2 million de dollars et doublent l'année suivante. Aujourd'hui, elles dépassent 15 millions de dollars américains.

> Succès : Être à la maison tant que son fils était petit tout en créant son propre emploi. Lauréate du prix de l'entrepreneure canadienne de l'année de l'École de gestion Rotman de l'Université de Toronto, en 2004.

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