Debbie Travis, une marque à succès bâtie à Montréal

Publié le 22/06/2009 à 18:52

Debbie Travis, une marque à succès bâtie à Montréal

Publié le 22/06/2009 à 18:52

Par lesaffaires.com

Hans Rosenstein, mari et associé de Debbie Travis, croit que sa célèbre épouse est devenue une marque à part entière quelque part au tournant de 2002.


Ce tournant a eu lieu lorsqu'elle animait l'émission de téléréalité de décoration Facelift, sur les ondes de la télévision canadienne. Elle y transformait l'intérieur d'une maison devant ses occupants ébahis. Ce n'était pas la première émission de la Montréalaise d'origine britannique, mais ce fut un moment charnière, celui où une personnalité incarne plus d'une chose, souligne le président de The Debbie Travis Group. « Une marque doit avoir une identité claire, ce n'est pas qu'une question de notoriété. Jim Carrey est un comédien célèbre, mais il n'est pas une marque. Dans cette émission, Debbie faisait bien plus que redécorer une maison : elle mettait du bonheur dans la vie des gens. »

Femme d'affaires et auteure à succès, Debbie Travis dégage une passion communicative pour l'art de vivre, qui a fait d'elle la Martha Stewart canadienne. Il faut ajouter à cela une dose d'Oprah Winfrey ? pour l'humanisme ?, qu'elle expose dans son dernier livre, consacré à sa vie de femme d'affaires, d'épouse, de mère et d'amie, intitulé Not Guilty.

« Je suis une survivante », lance-t-elle, lors de notre rencontre dans ses bureaux de Westmount, où son entreprise est installée depuis les débuts, il y a 15 ans. Une quinzaine d'employés travaillent dans un décor debbie-travisien où les teintes pâles et l'ameublement de bon goût sont parfaitement agencés. « Aimer ce qu'on fait, c'est la clé du succès, dit-elle. Moi, j'aime peindre, j'aime jouer avec la peinture. »

Debbie Travis a bâti son petit empire sur un excellent sens du timing et un grand esprit de décision. « Just make a decision » est le mantra de cette unilingue anglaise qui a atterri à Montréal par accident, il y a 25 ans, pour y suivre son mari, un Montréalais rencontré quelques semaines plus tôt au Festival de Cannes, où elle faisait la promotion de ses productions télé et lui, de sa maison de distribution de films. « Il est le gars des chiffres, je suis la créatrice », dit-elle.

Grande, dotée d'une forte personnalité, elle affiche une confiance à toute épreuve, seule façon de réussir dans ce métier difficile, dit-elle. « Qu'on ait des doutes ou pas, on doit se dire qu'on est la meilleure. »

Animée par cette foi, la jeune quinquagénaire a écrit neuf bouquins, fondé avec son mari deux maisons de production (une à Montréal et l'autre à Toronto), produit et animé une dizaine de séries d'émissions de télé, et lancé le studio Debbie Travis Design, qui crée une vaste gamme de produits pour la maison distribuée par Canadian Tire, qui en a vendu pour près de 100 millions de dollars depuis quatre ans. « Debbie est la locomotive de notre entreprise », dit son mari.

Self-made woman

Née dans le Lancashire, en Angleterre, décrocheuse à 16 ans, Debbie Travis dit avoir acquis sa confiance en déambulant, comme mannequin, devant des gens d'affaires à moitié soûls après un lunch trop arrosé. Un excellent entraînement pour la vie, dit-elle, si on sait l'utiliser. « On pleure un bon coup quand on se fait dire qu'on est trop grosse ou trop ceci ou cela, puis on revient et on continue de défiler. J'ai appris à me débrouiller et, surtout, à encaisser la critique et à aller de l'avant. »

Elle passe rapidement derrière la caméra et fait ses classes à la BBC au début des années 1980, comme productrice pigiste. Elle reste convaincue, encore aujourd'hui, qu'il faut commencer au bas de l'échelle et gravir les échelons un à un pour comprendre quelque chose à la vie. « Les jeunes aujourd'hui ne veulent pas assez, se désole-t-elle. Ils croient que leurs diplômes suffisent pour obtenir un gros poste. Chez nous, certains commencent comme réceptionnistes et finissent producteurs délégués. Je crois à ce modèle. »

Montréal lui a offert l'occasion de se réinventer. « Le Canada a été pour moi une chance, car je n'y connaissais personne. Je n'avais pas d'inhibitions. Je n'aurais pas pu lancer notre première émission de décoration en Grande-Bretagne, j'aurais eu peur d'être ridiculisée. Ici, je me suis dit : Je peux transformer des murs en oeuvres d'art, et j'ai vendu cette idée. Il faut ouvrir des portes, au risque de se tromper. »

Mais elle ne s'est pas trompée. En 1993, tandis que son mari ferme sa maison de distribution, moribonde, pour se lancer dans la production, elle lance une vidéo d'essai, en français et en anglais, fruit de ses expériences en décoration dans les maisons de ses amis et clients montréalais. En un an, elle en a vendu 150 000 exemplaires dans le monde. Cette vidéo donnera naissance à une série, Debbie Travis' Painted House, en ondes durant sept ans dans plus de 80 pays.

« On ne pensait pas que ça allait remporter un tel succès. J'ai été invitée sur de nombreux plateaux d'émissions, dont celui d'Oprah. Tout est question de hasard dans la vie. Quand j'ai lancé Painting, il n'y avait pas d'émission de décoration à la télé, les gens faisaient repeindre leur maison tous les 15 ans, on n'utilisait pas de pochoirs. Toute cette industrie a explosé, et j'ai été chanceuse de me trouver là. »

Les 360 couleurs de Debbie

L'association avec Canadian Tire, en 2005, est aussi arrivée au bon moment.

Si les pères de famille étaient toujours heureux d'aller faire un tour chez le géant canadien de la quincaillerie, « les femmes ne voyaient pas Canadian Tire comme une destination magasinage », dit Mme Travis.

Sa mission : attirer madame Tout-le-monde dans les magasins, grâce à des produits d de décoration à la fois stylisés, abordables et d de bonne qualité. « Je me suis dit : Wow ! quel fantastique défi ! »

« Nous avons eu des discussions avec d'autres détaillants, dit Hans Rosenstein, mais notre choix s'est arrêté sur Canadian Tire, et ç'a été le bon choix. »

Une équipe composée de trois employés et de nombreux collaborateurs travaille au Debbie Travis Studio, à Toronto, et court les salons de décoration de Paris et de Milan à la recherche de tentures, d'accessoires, de vaisselle et autres objets décoratifs qui cadreront avec une marque « qui doit inspirer confiance », dit Mme Travis. Présentement, sur son site Internet, Canadian Tire offre plus de 400 articles sous la marque de la Montréalaise.

Le résultat est probant : 45 % de plus de femmes ont fréquenté les Canadian Tire au cours des quatre dernières années. Le détaillant vient de renouveler le contrat pour cinq ans.

Mais pourquoi acheter de la peinture de marque Debbie Travis (manufacturée par la canadienne CIL, récemment achetée par Akzo Nobel en 2008) plutôt que d'une autre, hormis que le pot soit plus joli que celui de la concurrence ? « En achetant ma peinture, dit Debbie, le client achète aussi des idées, une façon de te concevoir la décoration. »

La marque de peinture se différencie de ses concurrentes à plusieurs égards. D'abord, au lieu d'offrir l'embarras du choix parmi 3 000 couleurs, l'équipe de Debbie Travis a décidé de n'en produire que 360, classées selon quatre humeurs : calme, dramatique, joyeuse hume ou nostalgique. « Choisissez d'abord ou no l'ambiance, puis la nuance », dit le slogan l'ambia du groupe.

Autre différence : les échantillons de couleurs. Au lieu d'être présentés en languette, chacune comportant une demi-douzaine de rectangles minuscules, ceux de Mme Travis forment soit un grand carré monochrome, de sorte que la couleur soit plus facile à visualiser sur les murs, soit une palette et son décor.

Hans Rosenstein est fier des résultats du groupe, notamment du fait que les ventes des produits Debbie Travis soient toujours en croissance après quatre ans. « Plusieurs marques sont éphémères. Je crois à la longévité et à la croissance soutenue, et non pas au feu d'artifice. »

Debbie Travis à la conquête du monde

 Fort de son succès chez Canadian Tire, le groupe veut conclure des ententes de distribution avec d'autres détaillants, hors du pays. La commercialisation pourrait rapidement devenir la principale source de revenus de l'entreprise, devant les productions télévisuelles.

« Grâce à ses émissions de télé, Debbie est connue à travers le monde, dit son mari, et on veut utiliser cette notoriété pour étendre la marque en Europe, en Amérique latine et en Asie. On sera présent dans au moins quatre pays dès 2010 avec le même genre de produits que ceux offerts chez Canadian Tire. En fait, on y serait déjà s'il n'y avait pas eu la récession. »

Cette récession, dit le couple, a jeté un grand froid sur le monde des affaires. « Le goût du risque a complètement disparu, se désole Hans Rosenstein. Et quand on est trop prudent, on n'avance pas. »

Parlant d'avancer, le prochain défi sera de créer une véritable communauté Debbie Travis sur Internet, dont le modèle commercial reste à définir. Keep moving, comme disent les deux époux.

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