Pour Raymond Brousseau, collectionner c'est partager


Édition du 12 Avril 2014

Pour Raymond Brousseau, collectionner c'est partager


Édition du 12 Avril 2014

Un igloo avec une tête de morse

Étudiant, il s'est mis à visiter une petite galerie d'art africain. Un jour, le propriétaire lui a montré une sculpture inuit, un igloo avec une tête de morse, de l'inédit. Il a craqué.

«Deux, trois mois plus tard, je suis retourné sur les lieux... J'ai racheté et ainsi de suite. J'étais étudiant et je travaillais comme aide-arpenteur à 5 $ par jour. Une sculpture équivalait au salaire d'une semaine», se souvient l'homme, qui a calmé un peu ses ardeurs quand il est devenu mari et père.

Après avoir enseigné les mathématiques, Raymond Brousseau s'est taillé une place comme comme cinéaste à l'ONF. En 1976, avec sa famille, il a coupé les ponts avec sa vie d'artiste et s'est installé à Québec, où il est devenu marchand d'art. Il a commencé à vendre des antiquités et des sculptures inuites accumulées au fil des ans.

«Je suis tombé dans le péché, j'ai acheté des pièces exceptionnelles en quantité.»

L'art inuit l'a passionné au point d'y consacrer un musée, tout près du Château Frontenac ; le premier du pays. Un beau succès de foule, gonflé par la visite de l'ancien président français Jacques Chirac, qui a suscité l'intérêt des Européens. Le Muséum de Lyon a présenté une exposition majeure en 2003, laquelle a dû être prolongée de deux mois en raison de son succès.

«M. Chirac est revenu en privé voir ce que je cachais derrière, et je lui ai dit qu'il était anormal que l'exposition ne soit pas à Paris. Deux semaines plus tard, il m'écrivait pour m'informer qu'il y aurait une exposition au Musée de l'Homme», dit celui qui a été fait chevalier de l'Ordre national du Mérite en France (2005) et chevalier de l'Ordre national du Québec en 2008.

«Mon musée à Québec a duré cinq ans (1999-2005), et j'ai dû y perdre au moins 500 chemises ! On n'avait aucune aide, et ce n'était absolument pas rentable», se souvient M. Brousseau.

Des collections qui voyagent

Il vient un jour où les collections deviennent un poids, remarque celui qui a aussi collectionné les appelants (canards de bois pour la chasse), les traîneaux de bois, les toupies et les cartes géographiques anciennes.

«On les déplace d'un entrepôt à l'autre, sans but. Puis, on développe des affinités, on voit un lieu et on se dit que c'est à lui que ça appartient.»

Les traîneaux de bois fabriqués par les grands-pères ont été exposés au Rockefeller Center de New York et ont amené M. Brousseau sur le plateau de Good Morning America, à côté de Liberace. Puis, ils ont été son premier don au Musée québécois de culture populaire de Trois-Rivières, suivis par les appelants. M. Brousseau pensait en avoir quelque 150 dans des caisses. Il en a découvert 400 !

Ensuite, il y a eu une petite toile de Riopelle donnée au MNBAQ, avant la collection d'art inuit.

«La collection est une merveilleuse maladie. Si la source est grande, il n'y a pas de limites, considère M. Brousseau avec l'espoir que sa générosité soit imitée plus souvent. Je n'ai pas d'argent à donner, car je l'ai investi dans la pierre et le bois ; mais c'est ma façon de laisser ma marque. Il paraît que la salle d'art inuit [qui porte son nom] est celle qui a le plus de succès au musée. Des gens viennent me féliciter après l'avoir visitée. C'est merveilleux !»

Il existe toujours une galerie Brousseau pour l'art inuit à Québec ; elle est exploitée par le fils. Le père continue de collectionner quelques oeuvres, mais ce qui l'occupe désormais, c'est la peinture. En 2009, un voyage en Chine l'a plongé dans un «dynamisme fou, énervant de créativité». De retour au pays, l'artiste en lui a refait surface.

«Je mets mon énergie dans la création parce que j'ai des années de création à rattraper. La peinture, c'est une extase», raconte le peintre, qui a exposé ses lumineuses abstractions à la Galerie A de Québec en 2010 et qui se prépare pour le Musée d'art contemporain de Baie-Saint-Paul. Elle aura lieu du 28 juin au 15 octobre.

À la une

Compétitivité: Biden pourrait aider nos entreprises

26/04/2024 | François Normand

ANALYSE. S'il est réélu, Biden veut porter le taux d'impôt des sociétés de 21 à 28%, alors qu'il est de 15% au Canada.

Et si les Américains changeaient d’avis?

26/04/2024 | John Plassard

EXPERT INVITÉ. Environ 4 électeurs sur 10 âgés de 18 à 34 ans déclarent qu’ils pourraient changer leur vote.

L’inflation rebondit en mars aux États-Unis

Mis à jour le 26/04/2024 | AFP

L’inflation est repartie à la hausse en mars aux États-Unis, à 2,7% sur un an contre 2,5% en février.