Capitalisme 3.0


Édition du 24 Mai 2014

Capitalisme 3.0


Édition du 24 Mai 2014

Par Diane Bérard

1. Vendre l'impact et non la cause

Les entrepreneurs sociaux démarrent avec une prise contre eux : leur rôle est mal compris. Étant donné qu'ils sont associés au «bien», on confine ces entrepreneurs au carcan des dons. C'est ce qu'on appelle «le piège de la charité». «Nous avons toujours présumé que l'impact social ne se mesure pas, commente Sir Ronald Cohen, un pionnier britannique de l'investissement social. C'est pourquoi nous nous sommes toujours fiés à la philanthropie pour régler ces enjeux. Or, l'impact social se mesure. En liant performance sociale et rendement financier, les entreprises sociales auront accès au même financement que leurs homologues traditionnelles.»

Le défi est de taille. Comment faire comprendre que vous êtes une vraie entreprise, qu'il existe un vrai marché, alors que vous vendez aux pauvres ? La solution : vendre l'impact et non la cause.

L'entrepreneur néerlandais Maurits Groen permet à ses clients d'augmenter leurs revenus annuels de 30 % à 40 %. Son entreprise vend la lampe solaire WakaWaka. Celle-ci remplace l'éclairage au kérosène, un carburant polluant, dangereux et toxique. Près de 300 000 enfants meurent chaque année à cause de feux de kérosène. De plus, le kérosène coûte cher et représente 20 % du revenu des familles africaines. La lampe WakaWaka coûte moins cher que le kérosène. Elle permet donc à ceux qui s'éclairaient avec ce carburant de travailler deux à trois heures de plus par jour. On l'emploie dans les hôpitaux, les écoles, les entreprises et les foyers. Voilà un impact mesurable. «Mon marché cible compte 1,5 milliard de consommateurs répartis en Afrique et en Asie. Des consommateurs insatisfaits qui voudraient bien un produit de remplacement au kérosène», explique le fondateur de WakaWaka.

Maurits Groen n'en est pas à sa première entreprise sociale. Il en a démarré cinq depuis 30 ans. Pourquoi a-t-il choisi cette formule ? «J'ai plus d'impact en ayant une entreprise à but lucratif qu'une fondation uniquement, car je ne dépends pas de donneurs. Je peux aller plus loin, plus vite. WakaWaka a été profitable dès la première année. Et je me sens mieux en exploitant une entreprise sociale qu'une entreprise traditionnelle. WakaWaka contribue à solutionner 6 à 8 buts du millénaire des Nations Unies.»

L'effet MoneyMaker : 158 000 entreprises en 20 ans

La pompe à eau manuelle créée par la société africaine KickStart a contribué, quant à elle, à la création de 158 000 entreprises en 20 ans. Chaque année, ces microentreprises agricoles génèrent 130 M $ en revenus et salaires pour ses utilisateurs, leurs familles et leurs employés. Ces agriculteurs ont quitté la subsistance pour embrasser l'entrepreneuriat. Avant d'acheter une pompe, ces familles tiraient un revenu annuel de 125 $ de leurs activités agricoles. Aujourd'hui, ce revenu est passé à 822 $. Mais il a fallu convaincre ces agriculteurs d'investir leurs maigres revenus dans la pompe.

Le premier bon coup marketing des fondateurs, l'Américain Martin Fisher et le Britannique Nick Moon, a consisté à nommer leur pompe MoneyMaker. Le ton est donné : KickStart ne fait pas la charité, elle enrichit ses clients. D'ailleurs, une campagne marketing sur le thème «Farming is my business» appuie l'idée que les acheteurs de ce produit sont des gens d'affaires. Le deuxième bon coup, recruter une armada de vendeurs. Plus de 200 représentants sillonnent les lieux publics du Kenya, du Mali et de la Tanzanie pour effectuer des démonstrations. Comme les dégustations dans les supermarchés. Il reste un détail. En marketing, il faut créer un buzz. KickStart organise des compétitions de pompage. Qui tirera le plus d'eau le plus rapidement avec la pompe MoneyMaker ? Attroupements garantis.

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