La décision est tombée alors qu'une cinquantaine de personnes, dont plusieurs qui affirment que Jones les a flouées, manifestaient devant le palais de justice.

Le syndic Gilles Robillard, associé chez RSM Richter, doit maintenant déterminer combien d'argent il reste dans les coffres de la Corporation Earl Jones, s'il y en a.

"On est en train de reculer en arrière dans le temps parce qu'il semblerait que l'argent n'a pas disparu dans la dernière année, mais bien avant ça, a indiqué M. Robillard. C'est un grand travail parce qu'il y avait quand même plusieurs comptes de banque. On ne passe pas à travers 20 ans de comptabilité ou de transactions en trois semaines."

L'avocat de faillite Neil Stein a précisé qu'il y aurait une rencontre avec les créanciers d'ici une vingtaine de jours. D'ici là, cinq enquêteurs seront nommés.

L'une des victimes alléguées, Mary-Sue Gibson, a brièvement témoigné lors de l'audience de mercredi.

"J'espère pouvoir reprendre les rênes de ma vie d'ici quelques mois, et retrouver d'une manière ou d'une autre un semblant de vie normale", a plus tard déclaré la dame qui dit avoir perdu un million $, avec son conjoint, en faisant confiance à Earl Jones.

"Même chose pour ma famille, a-t-elle ajouté. Ç'a été un énorme bouleversement pour notre famille. Beaucoup d'émotions."

Jones n'était pas lui-même en cour, mercredi.

L'homme de 67 ans a été accusé de quatre chefs de fraude et de quatre autres de vol, mardi. Il a été remis en liberté sous certaines conditions. Un proche a notamment déposé une caution de 30 000 $.

Des accusations supplémentaires pourraient toutefois s'ajouter.

Earl Jones doit revenir le 28 septembre en Chambre criminelle. Mais on se penchera dès le 19 août sur la possibilité de le placer en faillite personnelle.

Selon l'Autorité des marchés financiers (AMF), le présumé fraudeur a soutiré au moins 50 millions $ à des investisseurs.

La Cour supérieure a donné lundi le feu vert à la nomination d'un curateur intérimaire, a dit M. Stein, ajoutant que deux résidences de Jones de même que ses comptes de banque sont en cours de saisie.

Il semble toutefois qu'il en possède deux autres aux Etats-Unis.

M. Robillard a précisé qu'il y avait moins de 50 000 $ au total dans 60 comptes de la Corporation Earl Jones, mais plusieurs documents sont manquants. Il ne s'attend pas à trouver beaucoup d'argent.

"De deux choses l'une: soit l'argent a été volé et dort quelque part, soit il a été perdu ou dépensé", a dit M. Robillard.

"Il offrait des intérêts de 10 à 12 pour cent, a-t-il souligné. Alors, s'il n'investissait pas l'argent et n'engrangeait donc aucun profit, il grugeait constamment le capital."

Jones et son épouse dépensaient entre 60 000 $ et 70 000 $ par mois, en déplacements en avion, chambres d'hôtel ou repas somptueux, a affirmé M. Robillard. Mais des oeuvres caritatives bénéficiaient aussi de cet argent.

Une cinquantaine de personnes manifestaient devant le palais de justice de Montréal, mercredi, en faveur de règles plus strictes pour les conseillers financiers et de peines plus sévères pour ceux qui y dérogeraient.

D'autres qui ont assisté à l'audience ont trouvé l'expérience éprouvante sur le plan émotif.

"Je n'avais encore jamais été capable de pleurer, a confié Ginny Nelles, dont la famille, qui considérait Jones comme un ami, craint d'avoir perdu près de 1,5 million $. Mais quand Mme Gibson s'est levée, toutes ces émotions me sont revenues d'un coup. Elle a beaucoup de dignité."

"Je pense que nous avons un long combat devant nous."