L'emballage de vos produits est-il vraiment écoresponsable?


Édition du 15 Juin 2022

L'emballage de vos produits est-il vraiment écoresponsable?


Édition du 15 Juin 2022

Par Claudine Hébert

Des matières peuvent faussement identifiées comme recyclables. (Photo: 123RF)

INDUSTRIE DE L'EMBALLAGE. Ce n’est pas parce qu’un fournisseur d’emballage promet des matières dites écoresponsables qu’il faut le croire sur parole. Les entreprises ne doivent pas négliger de faire leurs devoirs.

C’est l’avertissement que sert le vice-président à la stratégie de marque de l’agence Pigeon, Stéphane Crevier, à toutes celles qui souhaitent verdir leurs emballages. «La matière peut être recyclable ou encore compostable dans un endroit donné sur la planète, mais elle ne l’est pas systématiquement dans les installations au Québec», précise cet expert qui évolue dans le domaine de la stratégie, du design et de la communication de marque depuis plus de 30 ans.

Le cas de Keurig Canada, sommé de verser une amende de 3 millions de dollars au Bureau de la concurrence en janvier dernier, figure parmi les plus récents exemples de fausses représentations à l’égard des consommateurs en la matière. Il y a trois ans, le fabricant de café avait modifié ses emballages de capsules K-Cup à usage unique pour utiliser une supposée matière plastique recyclable partout au pays.

Or, le commissaire du Bureau de la concurrence, Matthew Boswell, a conclu qu’en dehors des provinces de la Colombie-Britannique et du Québec, les capsules K-Cup ne sont pas largement acceptées par les programmes de recyclage municipaux au pays.

Le commissaire a tenu à rappeler que la Loi sur la concurrence interdit aux entreprises de donner des indications fausses ou trompeuses sur un produit ou un service afin de promouvoir leurs intérêts commerciaux. Ce qui inclut les allégations environnementales trompeuses, illégales au Canada depuis 2017.

 

Poser des questions

«Osez poser des questions sur le cycle de vie des matières qui vous sont suggérées par vos fournisseurs. Insistez pour demander qui recycle les matières et qui les compostent dans le ou les marchés où sont vendus les produits avant d’apposer quoi que ce soit sur vos étiquettes, avise Stéphane Crevier. Après tout, c’est le nom de votre entreprise qui figure sur les emballages.»

L’équipe de développement des affaires de Cascades peut d’ailleurs témoigner des demandes de plus en plus pointilleuses que font désormais les clients avant de signer un contrat. «Nous avons récemment conclu une entente avec une multinationale pour laquelle cet exercice de satisfaction aux requêtes a nécessité une cinquantaine d’heures de préparation, rapporte le directeur des communications du fabricant de papiers et de cartons, Hugo D’Amours. Plus d’une douzaine de nos professionnels ont été appelés en renfort pour répondre à ses demandes.»

 

Les pratiques de TerraCycle sèment le doute

TerraCycle, une entreprise américaine qui affirme depuis plus de 20 ans être en mesure de recycler de multiples matières plastiques rejetées par les centres de tri, doit elle aussi rendre des comptes. Depuis cinq ans, plusieurs militants et initiés en matière d’emballage remettent en question son programme permettant à de grandes marques d’étiqueter leur emballage «100 % recyclable » et d’y apposer le logo de TerraCycle. L’an dernier, l’entreprise a fait l’objet d’une poursuite en Californie pour allégations illégales et trompeuses concernant le recyclage. TerraCycle a préféré régler ce litige hors cour.

Elle n’est pas au bout de ses peines pour autant. Le documentaire allemand «The Recycling Myth» montre qu’une trentaine de tonnes de matières plastiques supposément recyclables récupérées en Grande-Bretagne par TerraCycle se sont retrouvées dans le four d’une cimenterie en Bulgarie.

L’entreprise du New Jersey plaide l’erreur humaine, mais le doute est semé, soutient Jan Dell, fondatrice de The Last Beach Cleanup, l’organisme américain qui a intenté la poursuite en Californie. «Au lieu de participer à des charades trompeuses nuisibles, les entreprises devraient repenser leurs produits pour qu’ils soient réutilisables ou réellement recyclables ou compostables par les programmes de collecte sélective qui existent au sein de leur communauté », insiste-t-elle.

 

Favoriser la réutilisation

Une avenue qu’a justement privilégiée l’entreprise Camellia Sinensis. Les nouveaux emballages de cette maison de thé montréalaise ne sont ni recyclables ni compostables. «Nous avons opté pour une formule réutilisable plus solide tout en utilisant 68% moins de matière», indique un des quatre copropriétaires, Hugo Américi.

Depuis plus de deux ans, lui et ses associés souhaitaient modifier leurs emballages pour les rendre plus écoresponsables. «Nous aurions tellement aimé adopter une matière compostable, affirme-t-il. Nos recherches nous ont toutefois montré que cette option n’était pas réaliste. De un, il n’existe actuellement aucune installation au Québec qui traite correctement ces emballages dits “compostables”. De deux, ces matières commencent à s’altérer après six mois, ce qui n’aidait pas du tout à la conservation du produit.»

Plutôt que d’induire sa clientèle dans l’erreur, la PME a donc fait le choix du sac multicouche. Et pour encourager ses clients à le réutiliser, elle leur offre une réduction de 0,50$ chaque fois qu’ils viennent remplir leur sac de thé en boutique

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