Quatre sociétés québécoises qui pourraient se faire acheter


Édition du 07 Avril 2018

Quatre sociétés québécoises qui pourraient se faire acheter


Édition du 07 Avril 2018

Cascades est un nom emblématique associé à la famille ­Lemaire. Un peu comme ­Bombardier à la famille ­Bombardier-Beaudoin. Une vente prochaine de la société serait étonnante. [Photo: cascades.com]

Quelles sont les sociétés du Québec qui pourraient tenter d'éventuels acquéreurs dans les prochains mois ? La question trotte dans la tête de plusieurs : ceux qui sont préoccupés par la présence des sièges sociaux ici, de même que ceux qui aimeraient bien améliorer rapidement le rendement de leur portefeuille.

Le hasard a voulu que l'on tombe, il y a quelques jours, sur un commentaire de la maison RBC Marchés des capitaux qui répond en partie à l'interrogation.

Depuis deux ans, RBC tente de repérer, dans un univers international, les petites et moyennes capitalisations (les grandes ne font pas partie de l'exercice) qui pourraient faire l'objet d'une acquisition dans l'année en cours.

Elle en retient près de 500, dans une quinzaine de secteurs. L'an dernier, 20 ont fait l'objet d'une acquisition.

La probabilité d'une offre demeure faible et, à vrai dire, les critères de définition de l'ensemble nous ont un peu déçu. Il s'agit d'avoir une capitalisation de 4 G$ US et moins, de ne pas être dans le 20 % des sociétés les plus chères de son secteur et d'afficher une marge d'exploitation positive. RBC précise ne pas porter un jugement spécifique sur chaque société.

Quand même, on a décidé de jeter un bref regard sur la probabilité d'acquisition des quatre sociétés québécoises les plus en vue qui font le classement, et leur potentiel en l'absence d'une offre.

CAE (CAE, 22,54 $)

Le titre du fabricant de simulateurs et formateur de pilotes (civils et militaires) est dans une situation embêtante.

Le carnet de commandes n'a jamais été aussi élevé, mais l'évaluation de l'action est aussi dans la haute fourchette par rapport à son historique. Elle se négocie à 10,3 fois le bénéfice avant intérêts, impôts et amortissement (BAIIA) de 2019 (mars), alors que sa moyenne historique est à 9 fois. Par contre, la moyenne des sociétés comparables du secteur aéronautique et de la défense est à 12-13 fois.

Surévalué par rapport à l'histoire, sous-évalué par rapport aux pairs.

Benoît Poirier, de Desjardins Marché des capitaux, voit en CAE une bonne cible d'acquisition. Il estime qu'elle a tous les attributs nécessaires et note que Boeing Global Services veut tripler ses revenus sur 5 à 10 ans, en les portant à 50 G$ US. M. Poirier croit cependant que la dispute actuelle avec Bombardier réduit peut-être l'intérêt de Boeing pour l'instant.

Verdict. Le titre semble bien évalué et les pairs surévalués, étant donné l'état plutôt avancé du cycle. Mais on n'écarterait pas une possible OPA de Boeing lorsque tout ce sera placé avec Embraer. Héroux-Devtek (HRX, 14,96 $)

Il peut paraître plutôt curieux de se demander si le troisième fabricant de trains d'atterrissage pourrait être acheté. Son plan stratégique est plutôt l'inverse : croître par acquisitions pour élargir la gamme de services offerts à l'industrie aérienne civile et militaire.

Il n'en reste pas moins que, tout comme pour CAE, la possibilité d'une offre d'acquisition est présente. Le titre se négocie en effet autour de 8,5 fois le BAIIA 2019 (mars) alors que, comme on l'a vu plus haut, le secteur est davantage autour de 12 à 13 fois. C'est un avantage de multiple qui peut permettre de la création de valeur.

Verdict. Après quelques imprévus en 2018, les perspectives semblent s'améliorer pour les prochains trimestres. Le multiple étant plus faible que celui de CAE, le potentiel boursier est probablement meilleur que pour CAE. Mais l'espérance de vie du cycle économique retient ici aussi nos espoirs. On n'exclurait cependant pas qu'une offre puisse se présenter.

Exfo (EXFO, 5,35 $)

On a été particulièrement surpris de voir Exfo apparaître dans la liste. Pour deux ou trois motifs.

Depuis quelques années, ses résultats sont en dents de scie. Ils ont l'habitude de surprendre le marché. Parfois positivement, mais aussi, malheureusement, parfois négativement. Un acquéreur cherche généralement à gober des sociétés qui ont un historique de constante création de valeur, mais qui viennent de frapper un écueil temporaire. Cet historique est à reconstruire chez Exfo.

Un autre motif tient à l'ADN d'Exfo et de son fondateur, Germain Lamonde. La culture en est une de construction. M. Lamonde a toujours donné l'impression d'être fier de ses origines et de ce qu'il avait bâti. Il a encore le contrôle d'Exfo et il serait surprenant qu'il accepte de vendre.

Verdict. Difficile à dire sur le potentiel boursier d'Exfo, son marché est complexe à saisir et on se demande parfois si les analystes qui suivent de près en ont vraiment une meilleure compréhension que la nôtre. Que la société soit acquise semble pendant ce temps fort peu probable.

Cascades (CAS, 13,16 $)

Une autre surprise que celle-là. Pour les mêmes motifs que pour Exfo, on la voit difficilement passer à d'autres mains.

La dernière fois qu'on a regardé la participation de la famille Lemaire, elle se situait autour de 25 %. Ce n'est pas en soi une position de contrôle, mais il ne manque pas grand-chose pour avoir une position de blocage. Cascades est un nom emblématique associé à la famille Lemaire. Un peu comme Bombardier à la famille Bombardier-Beaudoin. Une vente prochaine de la société serait étonnante.

Il ne serait pas surprenant, cependant, que sa participation de près de 58 % dans Reno De Medici, le fabricant de carton européen, soit prochainement vendue, croit Keith Howlett, de Desjardins. Les prix du carton sont élevés, et il y aurait apparemment une intéressante occasion de sortie.

Le titre est pendant ce temps sous pression. Les derniers résultats ont été inférieurs aux attentes, principalement en raison de la faiblesse des activités tissu. Et les dépenses en capital prévues pour 2018 sont nettement nettement plus élevées qu'en 2017 (de 200 M$ en 2017 à 335-380 M$), ce qui ne fait pas l'unanimité.

La valorisation du titre est cependant attrayante, fait remarquer Sean Steuart, de Valeurs mobilières TD. Cascades se négocie autour de 5,8 fois le BAIIA attendu pour les 12 prochains mois, alors que sa moyenne historique est à 6,5 fois. Pendant ce temps les pairs sont à 8,1 fois, alors que leur moyenne est à 6,6 fois.

Verdict. Pas de vente à anticiper, mais peut-être, effectivement, un petit rendement à espérer en 2018.

À propos de ce blogue

Diplômé en droit de l'Université Laval, François Pouliot est avocat et commente depuis plusieurs années l'actualité économique et financière. Il a été chroniqueur au Journal Le Soleil, a collaboré au Globe and Mail et dirigé les sections économiques des différentes unités de Quebecor Media, notamment la chaîne Argent. Au cours de sa carrière, il a aussi fait du journalisme d'enquête ce qui lui a valu quelques distinctions, dont le prix Judith Jasmin. La Bourse Southam lui a notamment permis de parfaire son savoir économique à l'Université de Toronto. François a de même été administrateur de quelques organismes et fondation. Il est un mordu des marchés financiers et nous livre son analyse et son point de vue sur diverses sociétés cotées en bourse. Québec inc. sera particulièrement dans sa mire.

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