François Pouliot: gaz de schiste, faudra-t-il une société d'État?

Publié le 20/10/2010 à 09:51, mis à jour le 20/10/2010 à 09:04

François Pouliot: gaz de schiste, faudra-t-il une société d'État?

Publié le 20/10/2010 à 09:51, mis à jour le 20/10/2010 à 09:04

Il ne s'agit pas de dire qu'assurément personne ne viendra forer. Mais il s'agit pour le Québec de se préparer à agir si personne ne vient forer.

Talisman a repoussé au printemps le forage de deux puits québécois, et Gastem devrait aussi y aller de trois puits à ce moment. Mais au-delà, force est de constater qu'il n'y a guère d'incitatif. Talisman vient d'ailleurs d'y aller d'une acquisition (en joint venture avec Statoil) de 1,3 G$ dans le secteur de Eagle Ford (Texas). Elle est déjà solidement présente dans les riches zones de Montney et Marcellus. En suivant la logique qui veut que l'on aille de ce qui coûte le moins cher vers ce qui coûte le plus cher, il pourrait bien s'écouler plusieurs années avant qu'elle ne soit vraiment intéressée par le Québec.

Que faire?

On peut toujours attendre à dans plusieurs années. Il y a le risque que l'on reste collé avec nos stocks de gaz si des énergies alternatives prennent le marché, mais, étant donné le bas prix auquel devrait demeurer la ressource, c'est peu probable (les énergies alternatives devraient se développer plus lentement). Les stocks seront toujours là et leur potentiel économique devrait s'améliorer.

Si l'on souhaite exploiter la ressource prochainement et éventuellement profiter d'une remontée de prix plus tard dans l'avenir, il faut dans ce cas bien réfléchir à notre politique de redevances et ne pas y aller trop fort (nous ne sommes pas dans la même situation que l'Ouest et les USA), ni surtout en promettre à tout le monde.

Dans son amalgamation d'Investissement-Québec et de la SGF, le gouvernement du Québec devrait peut-être penser à la création d'une véritable société d'État du gaz en donnant de l'envergure à Soquip, sa société québécoise d'exploration gazière et pétrolière.

Celle-ci pourrait alors développer son expertise, devenir partenaire des différentes sociétés privées québécoises à l'œuvre sur le territoire, faire un pont technique et scientifique entre elles, et contribuer au financement des forages nécessaires à l'atteinte d'une masse critique.

Il y a évidemment un important risque sur l'investissement et les premières années livreraient sans doute des états financiers marqués d'un rouge assez foncé. Comme en fait dans le minier et en biotech. Mais on pourrait rétribuer favorablement le risque couru en aiguillant vers Soquip une bonne partie des redevances à venir.

Jusqu'à ce qu'on ait récupéré les pertes initiales et assurer un fonds de roulement pour la poursuite du développement.

Après coup, si l'aventure est réellement porteuse économiquement, on pourra penser à rémunérer le communautaire par des redevances aux municipalités.

Faire l'inverse, c'est mettre la charrue devant les bœufs. Pour l'instant, l'argent potentiellement à venir du gaz de schiste devrait être réservé au développement du gaz de schiste.

 

À propos de ce blogue

Diplômé en droit de l'Université Laval, François Pouliot est avocat et commente depuis plusieurs années l'actualité économique et financière. Il a été chroniqueur au Journal Le Soleil, a collaboré au Globe and Mail et dirigé les sections économiques des différentes unités de Quebecor Media, notamment la chaîne Argent. Au cours de sa carrière, il a aussi fait du journalisme d'enquête ce qui lui a valu quelques distinctions, dont le prix Judith Jasmin. La Bourse Southam lui a notamment permis de parfaire son savoir économique à l'Université de Toronto. François a de même été administrateur de quelques organismes et fondation. Il est un mordu des marchés financiers et nous livre son analyse et son point de vue sur diverses sociétés cotées en bourse. Québec inc. sera particulièrement dans sa mire.

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