François Pouliot: Dollarama, le loup entre dans la bergerie

Publié le 14/10/2010 à 06:55, mis à jour le 14/10/2010 à 08:06

François Pouliot: Dollarama, le loup entre dans la bergerie

Publié le 14/10/2010 à 06:55, mis à jour le 14/10/2010 à 08:06

À moyen terme, le coup porte un peu plus.

D'ici 12 à 18 mois on devrait voir apparaître une certaine guerre pour les meilleurs emplacements. RBC Marchés des capitaux indique que Dollarama a toujours été aimée des développeurs commerciaux. Normal, la bannière draine de l'achalandage. Avec un autre gros joueur, la compétition fera cependant sans doute monter les prix des baux de location. Ce qui viendra gruger la marge bénéficiaire des nouveaux établissements.

C'est à plus long terme que le coup porte toutefois réellement.

Les 900 ou 1000 magasins que la concurrente projette ouvrir représentent des occasions de revenus qui ne seront plus disponibles pour Dollarama. Ils signifient également une guerre qui ne se fera non seulement plus uniquement sur le prix des baux, mais aussi sur le prix des items et sur leur volume. Plus le nombre de magasins augmentera, plus ils se rapprocheront en effet géographiquement et cibleront le même consommateur.

L'ampleur du dommage

Entrave majeure à long terme, donc. La question est de savoir à quel moment celle-ci se manifestera réellement et si, d'ici là, il ne se trouve pas encore un significatif espace de croissance pour Dollarama.

CIBC Marchés mondiaux estime qu'il pourrait y avoir au pays de la place pour pas moins de 3000 magasins à 1 dollar, grosso modo le double du nombre actuel (autour de 1200-1500).

Le potentiel est tout simplement établi en fonction de celui des États-Unis où l'on retrouve 1 magasin du genre pour chaque tranche de 10-12 000 habitants. Au Canada, le ratio est actuellement de 1 pour 23-25 000.

L'analyste Perry Caicco croit même que le potentiel pourrait être plus important, les Canadiens semblant plus portés vers les magasins à escompte que leurs vis-à-vis, comme en fait foi un ratio supérieur dans le secteur de l'épicerie.

En postulant que le rythme d'expansion de Dollar Tree soit à peu près le même que celui de Dollarama, c'est-à-dire 40 nouveaux établissements par année, la société québécoise pourrait bien avoir encore entre 4 et 5 ans d'expansion avant que les deux adversaires ne se rencontrent réellement dans des face-à-face territoriaux rapprochés qui auront un important impact sur les prix et volumes.

Combien devrait valoir Dollarama dans ce contexte?

Le titre de la société se négocie actuellement à 16,9 fois le bénéfice anticipé par les analystes pour l'année en cours et à 14,5 fois la suivante.

La moyenne historique du marché est à 15 fois le bénéfice. Étant donnée son expansion, dans les quatre ou cinq années à venir, la compagnie devrait encore livrer une croissance de bénéfices supérieure à celle du marché. Dans le contexte, le multiple de 17 appliqué au bénéfice attendu apparaît raisonnable. D'autant que dans quelques années, on se mettra sans doute à spéculer que Dollar Tree pourrait acheter Dollarama. En appliquant ce multiple au bénéfice à venir, l'action se transigerait à 31$ (actuellement à 26,54$).

Constat: Dollarama n'est pas une aubaine, mais n'est pas non plus sans potentiel, malgré la concurrence. Un dollar à la fois…

 

À propos de ce blogue

Diplômé en droit de l'Université Laval, François Pouliot est avocat et commente depuis plusieurs années l'actualité économique et financière. Il a été chroniqueur au Journal Le Soleil, a collaboré au Globe and Mail et dirigé les sections économiques des différentes unités de Quebecor Media, notamment la chaîne Argent. Au cours de sa carrière, il a aussi fait du journalisme d'enquête ce qui lui a valu quelques distinctions, dont le prix Judith Jasmin. La Bourse Southam lui a notamment permis de parfaire son savoir économique à l'Université de Toronto. François a de même été administrateur de quelques organismes et fondation. Il est un mordu des marchés financiers et nous livre son analyse et son point de vue sur diverses sociétés cotées en bourse. Québec inc. sera particulièrement dans sa mire.

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