Et si Trump devenait plus fort le 6 novembre?

Publié le 27/10/2018 à 09:45

Et si Trump devenait plus fort le 6 novembre?

Publié le 27/10/2018 à 09:45

Le président américain Donald Trump (Source photo: Getty Images)

ANALYSE GÉOPOLITIQUE - À moins d’une surprise, les républicains de Donald Trump devraient perdre des plumes lors des élections de mi-mandat, le 6 novembre. Et si les sondeurs mesuraient mal l’humeur des Américains, et que le parti du président renforçait son emprise sur le Congrès ?

Certes, la probabilité qu’un tel scénario se réalise est plutôt mince, disent la plupart des analystes. En revanche, sur le plan de la gestion du risque géopolitique, prévoir l’impensable est souvent la meilleure stratégie, en l’occurrence pour les exportateurs et les investisseurs actifs sur le marché américain.

Le Congrès est formé de deux assemblées : la Chambre des représentants (435 élus, au prorata de la population) et le Sénat (100 élus, soit deux par État). Le 6 novembre, tous les représentants (élus pour deux ans) défendront leurs sièges, alors qu’un tiers de ceux des sénateurs (élus pour six ans) seront en jeu.

Actuellement, les républicains de Donald Trump détiennent la majorité des sièges dans les deux chambres. Mais leur avance est mince. Ils contrôlent 54% des sièges à la Chambre des représentants et 51% au Sénat.

C’est pourquoi les démocrates mettent les bouchées doubles pour tenter de ravir l’une ou l’autre des assemblées, voire les deux.

Que disent les sondages?

Un récent sondage NBC-Wall Street Journal indique que les démocrates ont 9 points de pourcentage d’avance sur les républicains: 50% des répondants préféraient un Congrès contrôlé par les démocrates et 41% par les républicains.

Les élections de mi-mandat sont aussi devenues un référendum sur Donald Trump, soulignent des analystes. C’est pourquoi le niveau de popularité et d’impopularité du président est une donnée fondamentale.

Ainsi, le selon le site d’analyse de sondages FiveThirtyEight (une référence aux États-Unis), le niveau d’impopularité de Donald Trump n’est pas à un sommet. Par contre, il est beaucoup plus élevé (52,5%) par rapport à son investiture, en janvier 2017, comme on peut le voir sur ce graphique.

Quant au taux de popularité de Donald Trump, il est par conséquent en déclin à 42,4%. Mais c’est loin d’être un plancher depuis 1945, selon FiveThirtyEight.

Si on compare sa performance à d’autres présidents à la moitié de leur premier mandat (ou 645 jours), c’est inférieur à Bill Clinton (47,8%) et Barack Obama (46,6%), mais supérieur à Ronald Reagan (40,0%) et Harry Truman (35,2%).

Les conséquences des élections

Les élections de mi-mandat créent de l’incertitude économique.

La reprise du Congrès par les démocrates pourrait être une bonne nouvelle pour les entreprises et les investisseurs, car elle forcerait l’administration Trump à adoucir ses politiques en matière de commerce international.

Certes, historiquement, les démocrates sont traditionnellement plus protectionnistes que les républicains. Mais les choses ont bien changé depuis l’élection de Donald Trump.

Aujourd’hui, les républicains endossent les politiques de la Maison-Blanche qui ont mené à l’imposition de tarifs douaniers sur l’aluminium et l’acier, à la renégociation de l’ANÉNA et au déclenchement d’une guerre commerciale avec la Chine.

Aussi, un Congrès contrôlé par les démocrates pourrait exiger la fin des tarifs sur les importations d’acier et d’aluminium, qui visent entre autres un allié et un partenaire stratégique comme le Canada au nom de la sécurité nationale.

Le nouvel accord de libre-échange nord-américain ne serait pas rouvert, mais le ton changerait sans doute à l’égard du Canada.

Par contre, la vie des exportateurs et des investisseurs pourrait devenir plus compliquée si les républicains gardaient non seulement le contrôle du Congrès mais y faisaient des gains.

Le pouvoir de Donald Trump s’en trouverait de facto renforcé.

Et les sondages? Ne prédisent-ils pas une victoire démocrate le 6 novembre?

Oui, effectivement, comme ceux du reste qui prévoyaient une victoire de Hillary Clinton, en novembre 2016, ou la victoire du camp en faveur du maintien du Royaume-Uni dans l’Union européenne, en juin 2016.

Et ici, au Québec, les sondeurs n’avaient pas anticipé la vague caquiste.

Dans ce contexte, les entreprises et les investisseurs auraient tout intérêt à se préparer à une victoire des républicains aux élections de mi-mandat et à une administration Trump fortifiée et davantage protectionniste.

«Hope for the best, but prepare for the worst», dit l’adage.

 

À propos de ce blogue

Dans son analyse Zoom sur le monde, François Normand traite des enjeux géopolitiques qui sont trop souvent sous-estimés par les investisseurs et les exportateurs. Journaliste au journal Les Affaires depuis 2000 (il était au Devoir auparavant), François est spécialisé en commerce international, en entrepreneuriat, en énergie & ressources naturelles, de même qu'en analyse géopolitique. François est historien de formation, en plus de détenir un certificat en journalisme de l’Université Laval. Il a réussi le Cours sur le commerce des valeurs mobilières au Canada (CCVM) de l’Institut canadien des valeurs mobilières et il a fait des études de 2e cycle en gestion des risques financiers à l’Université de Sherbrooke durant 15 mois. Il détient aussi un MBA de l'Université de Sherbrooke. François a réalisé plusieurs stages de formation à l’étranger: à l’École supérieure de journalisme de Lille, en France (1996); auprès des institutions de l'Union européenne, à Bruxelles (2002); auprès des institutions de Hong Kong (2008); participation à l'International Visitor Leadership Program du State Department, aux États-Unis (2009). En 2007, il a remporté le 2e prix d'excellence Caisse de dépôt et placement du Québec - Merrill Lynch en journalisme économique et financier pour sa série « Exporter aux États-Unis ». En 2020, il a été finaliste au prix Judith-Jasmin (catégorie opinion) pour son analyse « Voulons-nous vraiment vivre dans ce monde? ».

François Normand