Le secret d'une bonne gestion d’immeubles publics, documentez vos bâtiments

Publié le 19/02/2018 à 09:57

Le secret d'une bonne gestion d’immeubles publics, documentez vos bâtiments

Publié le 19/02/2018 à 09:57

Depuis l’effondrement du viaduc de la Concorde à Laval, une solide prise de conscience s’est installée au Québec : il faut entretenir les infrastructures publiques avant qu’elles ne se détériorent.

« Lorsqu’on parlait d’entretien d’actifs immobiliers dans les années 1970, on passait pour des missionnaires. On prêchait dans le désert. Aujourd’hui, le message passe beaucoup mieux. Mais il y a encore beaucoup de travail de conscientisation à faire », a soulevé Yvon Crevier, secrétaire exécutif et spécialiste en actifs immobiliers chez Admobilis. M. Crevier était l’un des invités lors de la conférence gestion d’immeubles publics, présentée par les Événements Les Affaires, le 13 février dernier, à Montréal.

Magali Crevier, présidente d’Admobilis, a présenté les résultats d’une étude effectuée auprès de quelque 900 centres de la petite enfance au Québec (CPE). Constat : Près de quatre garderies sur cinq ne détiennent aucun plan de gestion de leur immobilier. « On utilise encore la stratégie scotch tape. On attend que surviennent les bris pour les réparer au lieu de les prévenir », a-t-elle indiqué.

Comment adopter de bonnes pratiques ?

M. Crevier a cité en exemple le modèle de l’Université de Toronto, qui depuis 2003, a instauré une culture de maintien de ses actifs immobiliers. L’institution universitaire gère un complexe qui compte 209 bâtiments répartis sur trois campus. L’actif immobilier représente une valeur de 4G$, dont l’entretien coûte 22M$ par année. « Ce qui permet à l’université de préserver un indice de vétusté sous la barre des 15% », a mentionné Yvon Crevier.

« L’université a d’abord identifié et évalué ses actifs immobiliers pour ensuite établir un processus de priorisation. L’institution a documenté chacun de ses bâtiments dans les moindres détails (structure, échangeur d’air, l’emplacement, composante, etc…) afin d’établir clairement un bilan de santé, une planification préliminaire et une prévision budgétaire », a expliqué M. Crevier.

Documentez les bâtiments pour mieux convaincre

Yvon Crevier a souligné que les organisations font souvent l’erreur d’attendre l’annonce de subventions pour effectuer leur planification préliminaire. « Les gestionnaires ont avantage à avoir ces informations en main le jour même de l’annonce des subventions », a indiqué l’expert.

Ce processus de documentation des immeubles, a insisté M. Crevier, est très important pour vendre les projets d’entretien préventifs aux membres des conseils d’administration et autres bailleurs de fonds. « Ça prend des rapports de défaillance, des analyses, des rapports annuels d’entretien différé.  En étant très bien documenté, le modèle de l’Université de Toronto a gagné l’adhésion de la direction. Il s’est instauré une culture organisationnelle de la gestion des actifs immobiliers », a-t-il souligné.

Gestion des espaces de travail

Impliquez un partenaire privé

Le Centre hospitalier de l’Université McGill (CUSM) qui a coûté 1,3 G$ figure parmi les grands projets institutionnels du Québec qui ont développé un tout nouveau modèle de gestion et de partenariat pour l’entretien de leur nouveau complexe. La direction a confié la tâche a un partenaire privé, ProjetCo, formé entre autres par SNC-Lavalin et Innisfree, pour les 30 prochaines années.   

Deux personnes du CUSM, Imma Franco, directrice des services techniques, planification et immobilisation, et Pierre E. Major, directeur associé, planification et gestion de projet et contrat PPP, sont venus présentées ce modèle d’entretien PPP mis en place pour le nouveau campus Glen, inauguré en 2015.

Les deux conférenciers ont été discrets sur les chiffres. Mme Franco a néanmoins soutenu que ce nouveau modèle a contribué à réduire considérablement les durées de séjours des patients, en plus de réduire les risques d’infections.

Des critères pour mieux prévenir les défaillances

« ProjetCo doit satisfaire 220 critères pour l’entretien et le maintien du cycle de vie du complexe hospitalier », a indiqué M. Major. Ce partenaire doit s’assurer du bon fonctionnement de 78 aires fonctionnelles, dont les blocs opératoires qui sont les aires les plus critiques.

Selon un calcul mathématique, le montant mensuel qui est accordé au partenaire est ajusté en fonction de sa performance. Remarquez, a indiqué M. Major, s’il y a une défaillance en matière de disponibilité des locaux, de services et de qualité des installations, ProjetCo a jusqu’à 4 heures pour remédier à la situation afin d’éviter des pénalités. « Et si le partenaire atteint un seuil de défaillance trop élevé, le CUSM peut demander un remplacement de direction au sein du service », a mentionné M. Major.

Il est encore trop tôt pour donner une réelle évaluation du modèle, a conclu Pierre Major. Mais d’emblée, la collaboration entre les parties est excellente. « Ce sont des équipes avec qui on discute régulièrement. Ce qui assure, à mon avis, une meilleure fonctionnalité. Ce n’est pas toujours parfait, mais je demeure convaincu qu’il s’agit du bon modèle pour assurer la pérennité du complexe hospitalier. »