Résolution 2020: marcher 1 km dans les souliers de ses employés

Publié le 16/01/2020 à 07:00

Résolution 2020: marcher 1 km dans les souliers de ses employés

Publié le 16/01/2020 à 07:00

Trois employés dans une usine.

(Photo: 123RF)

BLOGUE INVITÉ. Sujet d’importance cruciale en contexte de pénurie de main-d’oeuvre, l’expérience employé doit être LA priorité des entreprises pour 2020. Je rappelle que sans expérience employé, il ne saurait y avoir d’expérience client. Mais par où doit-on commencer pour améliorer l’expérience employé? Voici un premier billet d’une série de trois sur le sujet.

Pour accomplir son travail et bien servir la clientèle, l’employé doit minimalement être bien outillé, avoir reçu une formation adéquate et oeuvrer dans un environnement de travail approprié (voir mon précédent billet sur l’expérience employé).

Pour s’assurer que les trois besoins précédemment énoncés soient comblés, je suggère une démarche qui peut s’avérer inhabituelle pour certains gestionnaires: sortir du bureau/salle de réunion, et aller sur le terrain pour comprendre la réalité quotidienne des employés qui servent la clientèle. Voyons ça comme une immersion en entreprise, ce que les gens de la société californienne IDEO nomment de façon appropriée le Deep Dive. Je suis persuadé que certains patrons n'en croiront pas leurs yeux ni leurs oreilles.

Aller sur le terrain

C’est pourtant simple. Il suffit d’aller passer quelques heures, voire une journée dans les souliers de ses employés sur le plancher. Je ne dis pas de se déguiser comme dans l’émission télé Undercover Boss pour passer inaperçu. Je propose tout simplement d’aller sur le terrain, de regarder, d’observer ce que font les employés pour servir la clientèle, de constater comment les clients s’expriment et ce que les employés leur répondent.

On peut aussi faire de l’écoute passive dans un centre de contact, accompagner un livreur, un technicien ou un représentant sur la route, ou passer un peu de temps dans l’entrepôt. Attention: le but n’est pas de juger. Le but est d'apprendre, de comprendre, d’identifier des problèmes et de trouver des solutions.

La structure classique des entreprises n’aide pas

Difficile pour un gestionnaire de bien saisir toutes les facettes du travail réalisé par les différents employés. Et la structure classique des entreprises ne facilite pas les choses.

Pour des raisons évidentes d’organisation, les entreprises se sont dotées de différents départements : marketing, finances, juridique, création de produits, ventes, conformité, communications, informatique, opérations, ressources humaines, ressources matérielles, etc. C’est logique. Sauf que pour la plupart des compagnies, ces unités oeuvrent en silos.

Chaque unité a ses objectifs, ses processus, ses indicateurs de gestion et sa vision de l’entreprise. Malgré les bonnes intentions — augmenter le chiffre d’affaires, réduire les coûts, éviter les poursuites, optimiser les ressources existantes, uniformiser les façons de faire, etc. —, l’impact d’une décision ou d’une initiative sur le travail des employés sur le terrain est souvent méconnu.

Par exemple, un nouveau forfait peut avoir été élaboré par l’équipe du marketing et des ventes, mais l’employé au centre de relation client est plus ou moins outillé pour répondre à la demande. J’ai récemment modifié mon forfait cellulaire et je plains la pauvre employée — fort gentille et patiente — qui a dû effectuer de multiples recherches dans je ne sais trop combien de systèmes pour voir si j’étais admissible à une promotion et «inscrire le tout dans le système pour voir si ça passe». Durée de l’appel: 60 minutes. En quelle année est-on déjà?

De son côté, l’équipe de création peut imaginer un nouveau produit, mais ce dernier sera difficile à entreposer, disposer sur les tablettes, manipuler ou emballer.

De nouvelles règles plus strictes peuvent avoir été exigées par le département juridique pour éviter des poursuites, mais leur mise en oeuvre auprès du client est d’une telle complexité que les employés doivent prendre plus de temps pour l’appliquer et l’expliquer, rallongeant le temps de service.

Que doit-on observer?

Voici quelques éléments à observer (cela varie selon la nature de l’entreprise):

 

• Le degré de connaissances. Nul besoin de faire passer un examen. Il suffit d’écouter attentivement les conversations entre l’employé et le client pour évaluer la compréhension des produits, des services et des procédures/normes établies.

• Les systèmes informatiques. Ils doivent réellement soutenir la tâche de l’employé. J’ai déjà vu l’employé d’une entreprise de services devoir utiliser jusqu’à 10 systèmes différents pour pouvoir informer convenablement le client! (soupirs) Les systèmes doivent aussi être exempts de bogues (!), et intégrés entre eux.

• Les autres outils technologiques. Le terminal de commande, la caisse enregistreuse, le terminal de paiement, le scanneur de codes barres, etc. doivent communiquer entre eux afin d’éviter une recopie d’information d’un à l’autre, prévenir les erreurs et réduire les pertes de temps.

• Les outils analogiques. Qu’est-ce que l’employé utilise pour soutenir sa mémoire, communiquer avec des collègues ou compenser pour une faiblesse de l’informatique? On prête attention à l’utilisation du papier sous toutes ses formes: Post-It, calendrier, bloc notes, etc.

• Les déplacements. Que ce soit entre la boutique et l’arrière-boutique, la salle à manger et la cuisine, le magasin et l’entrepôt, etc., il est important d’observer les déplacements «inutiles» et fréquents qui pourraient être réduits par l’ajout d’un autre employé (p. ex. un «runner» qui apporte la marchandise de l’arrière-boutique au vendeur en magasin comme on le voit chez Aldo ou Apple) ou par un réaménagement physique.

• Les documents. Portez une attention particulière à la recopie d’information et à la pertinence des différents formulaires, bons de commande, factures, et autres documents, qu’ils soient remplis manuellement ou dans des systèmes.

• Les éléments de communication avec la clientèle. Les affiches, les prix, les mises en garde, les garanties, etc. doivent être cohérents avec les normes de l’entreprise, les promotions en cours, etc.

• Les procédures. Premièrement, il doit y en avoir. Deuxièmement, elles doivent être bien documentées, claires, à jour et facilement accessibles. Finalement, elles ne doivent pas être caduques ou inutilement complexes, rigides et strictes, limitant l’autonomie de l’employé.

 

Voilà! En comprenant bien le quotidien des employés, on sera en mesure d’identifier les problèmes qu’ils vivent et de trouver des solutions améliorant l’expérience employé et par conséquent l’expérience client.

 

À propos de ce blogue

De kessé l’expérience client se veut un blogue pour les dirigeants, responsables de l’expérience client, et toute personne qui est en contact direct, ou indirect avec la clientèle. Le but? Démystifier l’expérience client sous tous ses angles. Daniel Lafrenière est stratège en expérience client omnicanale. Oeuvrant depuis plus de 30 ans, il a aussi donné des conférences au Canada, aux États-Unis et en Europe. Il est l’auteur de 10 ouvrages en expérience client, expérience employé et transformation numérique.

Daniel Lafrenière