Un lien ferroviaire dans le Nord, prise 2

Publié le 26/10/2013 à 00:00, mis à jour le 24/10/2013 à 15:08

Un lien ferroviaire dans le Nord, prise 2

Publié le 26/10/2013 à 00:00, mis à jour le 24/10/2013 à 15:08

Après un an de stagnation, le gouvernement Marois redémarre le développement nordique, avec un budget d'immobilisations de 900 millions de dollars sur cinq ans. Il relance le projet de lien ferroviaire dans la Fosse du Labrador qui a échoué sous les libéraux. L'industrie du minerai de fer s'en réjouit.

Lors de sa première apparition publique devant l'industrie, à l'occasion de la Conférence Objectif Nord organisée par Les Affaires le 16 octobre à Montréal, le nouveau secrétaire général du Secrétariat du développement nordique, Bernard Lauzon, a précisé que l'approche serait différente : cette fois, le lien ferroviaire serait envisagé comme un centre de coûts - et non un centre de profit -, qu'il serait de propriété publique et multi-usager, et qu'il fonctionnerait sous le principe de l'utilisateur-payeur. «On ne cherche pas la rentabilité, a-t-il dit. Il s'agit juste de permettre aux petits comme aux grands d'utiliser le chemin de fer.»

Un appel d'offres pour une étude de préfaisabilité sera lancé sous peu, et elle sera entièrement financée par l'État, question d'obtenir un point de vue indépendant sur les enjeux.

«C'est une bonne nouvelle pour l'industrie, a souligné l'avocat Marc Dorion. On sait maintenant où on s'en va.» Son cabinet, McCarthy Tétrault, représente plusieurs minières, dont Adriana Resources, qui a un projet de 13 milliards de dollars au Nunavik pour 50 millions de tonnes par an (MTA) de concentré de fer.

«Un geste concret» qui aidera les minières à trouver du financement, a ajouté Jeff Hussey, responsable des affaires corporatives chez Champion Iron Mines, détentrice de gisements d'un potentiel de 20 MTA près de Fermont.

En 2012, le gouvernement Charest avait donné au Canadien National et à la Caisse de dépôt le mandat d'examiner le projet ferroviaire. Mais l'approche a fortement déplu aux compagnies minières concernées. Le CN refusait de mettre le projet sur son bilan financier et voulait en faire un centre de profit, plutôt que de se contenter de facturer aux minières l'équivalent du coût plus une marge raisonnable de profit.

Devant le refus des minières, et la difficulté de composer avec leurs échéanciers variés, le CN a abandonné le projet.

Longue de 1 000 kilomètres entre Sept-Îles et le Nunavik, la Fosse du Labrador héberge des milliards de tonnes de minerai de fer à basse teneur pouvant livrer près de 200 millions de tonnes de concentré de fer - à condition d'y avoir accès et d'avoir la capacité financière de l'exploiter.

Sans lien ferroviaire, les projets ne se réaliseront pas. Le transport est aussi leur deuxième centre de coûts.

L'étude se concentrera sur la partie sud d'un éventuel chemin de fer, longue d'environ 400 km. Il s'agira de valider à nouveau les besoins de chaque minière en matière de tonnage et de déterminer un coût réaliste. Selon nos informations, les coûts évoqués par le CN avoisinaient les 2 G$, alors qu'un acteur de l'industrie, qui avait fait sa propre étude, les avait évalués à 1 G$. L'étude examinera aussi s'il faut un troisième lien ou si on peut rénover les deux liens existants, celui de IOC (le chemin de fer QNS&L) et celui d'ArcelorMittal Mines Canada (AMMC).

Une troisième voie illusoire ?

Cette dernière option a été défendue par l'avocat Jean Clerk, lors de la conférence. En s'appuyant sur une étude faite par l'expert mondialement reconnu Réjean Bélanger, de Consultrail, il a indiqué que le gouvernement ferait des économies substantielles en obligeant ArcelorMittal Mines Canada à prêter son chemin de fer aux autres minières (ce qu'elle refuse de faire) et en soutenant des rénovations de QNS&L.

Selon lui, la loi actuelle le permet, quitte à passer par des arbitrages entre minières concurrentes. «C'est du gaspillage que d'ouvrir une troisième voie. Le coût est énorme, le territoire sera déchiré et il y aura des contraintes environnementales», a plaidé M. Clerk.

L'autre question à laquelle s'attellera l'étude sera celle du montage financier. Québec aurait signalé à l'industrie son refus de financer le projet, dont les coûts pour un nouveau chemin de fer dans toute sa longueur seraient supérieurs à 5 G$. Le gouvernement appuierait le projet en offrant un droit de passage sur un territoire de la Couronne (selon un système de concessions), un soutien sous forme de garanties de prêts et d'autres instruments avec ses bras financiers (CDP, Investissement Québec, Banque de développement, etc.).

Mais selon Michel K. Landry, partenaire chez Deloitte, Québec n'aura pas d'autre choix que de financer une partie d'un futur lien ferroviaire, en partenariat avec le privé et des fonds institutionnels. «Les minières ne voudront pas absorber 50 % des coûts, a-t-il déclaré à Les Affaires en marge de la conférence. On aura besoin de leviers. Sans participation du gouvernement, ce sera difficile de concrétiser les projets miniers. Québec aura ensuite les retombées en matière d'emplois et d'impôts.»

Chose certaine, plusieurs experts rencontrés à la conférence ont dit que le montage financier devra être innovateur.

Il faudra aussi que les minières soient disposées à s'entendre entre elles pour partager cette infrastructure. Pas si évident, dans un contexte où il est de moins en moins certain que le marché sera prêt, à partir de 2015, à absorber 200 MTA de fer du Québec, cher à produire. New Millenium, quant à elle, envisage une autre solution pour livrer son fer, un ferroduc.

SUZANNE. DANSEREAU@tc.tc

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