Comment une PME de Québec veut vendre des livres aux Chinois... en anglais

Publié le 17/09/2011 à 00:00

Comment une PME de Québec veut vendre des livres aux Chinois... en anglais

Publié le 17/09/2011 à 00:00

Par François Normand

Vendre des livres électroniques en anglais en Chine, c'est l'ambition de De Marque, distributeur d'ouvrages numériques pour le compte d'éditeurs.

La PME de Québec ne se lancera pas seule dans cette aventure audacieuse. Elle compte s'associer à un partenaire local pour créer une plateforme de distribution.

Son président, Marc Boutet, a déjà eu des contacts avec des partenaires potentiels. Comme certains de ces interlocuteurs souhaitent une forme de partenariat qui les engage davantage, les discussions pourraient aboutir à la création d'une coentreprise.

Selon Marc Boutet, il est préférable de s'attaquer au marché chinois en distribuant des livrels (terme désormais consacré pour désigner les livres électroniques) en anglais, car il y déjà une multitude de plateformes électroniques pour des livrels en mandarin. De Marque n'exclut toutefois pas la possibilité de distribuer en Chine des ouvrages en mandarin, ou dans une autre des langues parlées dans le pays, comme le cantonais.

Dans les cinq prochaines années, De Marque veut aussi distribuer des livrels dans d'autres marchés émergents : l'Inde et l'Amérique latine, dont le Mexique.

En Inde, elle distribuera des livres en anglais, un choix qui va de soi dans cette ancienne colonie britannique. En Amérique latine, ce sera l'espagnol et le portugais, au Brésil.

Si elle vise d'abord à conclure des partenariats de distribution dans les marchés émergents, la société envisage aussi la possibilité d'y vendre des licences sur sa technologie, c'est-à-dire une plateforme de distribution de livres électroniques, qu'on peut aussi comparer à un entrepôt numérique. "Nous percevrions alors des redevances pour notre propriété intellectuelle", dit Marc Boutet.

Les prévisions de ventes de l'entreprise dans les marchés émergents sont prometteuses. Pour la division de livres, De Marque prévoit une croissance annuelle de 40 % au cours des cinq prochaines années en Amérique du Nord et en Europe.

Mais pour les marchés émergents, cette croissance serait beaucoup plus élevée : 45, 50, 60 % ? Marc Boutet n'avance pas de chiffre précis. "Ce sera clairement plus élevé que dans l'ensemble du marché mondial", dit-il.

Pour sa division édition interactive, un secteur plus mature, dont les produits ne seront pas vendus dans les marchés émergents, De Marque s'attend à une croissance annuelle de ses revenus de 10 % par année d'ici 2016.

La technologie pour se démarquer

De Marque réalise 51 % de ses revenus hors du Canada, soit 2,5 millions de dollars. L'entreprise vend ses produits dans une douzaine de pays, dont les États-Unis, la France et l'Italie.

Ses principaux concurrents sont les américaines Ingram Content Group et OverDrive, deux importants distributeurs privés de livres numériques. OverDrive, qui est déjà passé à l'offensive en Chine, possède 300 000 titres de livres numériques et de livres audio.

Pour se démarquer, la PME mise sur la souplesse et la convivialité de ses produits. "Nous avons une approche à la Facebook ; un éditeur peut utiliser nos plateformes sans avoir à prendre contact avec notre équipe", dit Marc Boutet.

Un des critères de De Marque lorsqu'elle cherche un pays dans lequel entrer est le niveau de concurrence. Par exemple, elle a renoncé à distribuer des livres en Allemagne, où les éditeurs disposaient déjà de plusieurs plateformes.

À l'international, l'entreprise trouve aussi des clients en participant à deux foires incontournables : Francfort, en octobre, et Londres, en avril. Parfois, ce sont des groupes qui l'approchent pour conclure un partenariat, comme c'est le cas de Transcontinental (éditeur des Affaires). Transcontinental utilisera la plateforme de De Marque pour ses services de production et de distribution de livres numériques à ses clients au Canada anglais et aux États-Unis.

Les acquisitions sont une autre voie de croissance pour De Marque. En 2000, elle a acheté Septembre Média, qui comprenait son magazine Les Chroniques de l'Infobourg (devenu L'École branchée) et son site Infobourg.com. Cette acquisition élargissait la clientèle de sa division éducation.

Et l'an dernier, elle a acquis Prosemedia, qui avait été son partenaire technologique pour développer sa plateforme de distribution numérique. Cela lui a permis de posséder 100 % de la propriété intellectuelle sur la plateforme.

LES RISQUES DE DE MARQUE

Risque de concurrence

Tout va vite dans le secteur de l'édition et de la distribution de livres numériques. Comme dans plusieurs industries, de nouveaux produits arrivent rapidement sur le marché. De Marque doit être capable de livrer la marchandise des éditeurs et de répondre à la demande. "Nous sommes condamnés à innover et à ajouter constamment de nouveaux services pour que les éditeurs y trouvent leur bénéfice", dit le président de De Marque, Marc Boutet. Si l'entreprise n'est pas assez efficace, des éditeurs choisiront de faire affaire avec un autre distributeur numérique ou de livrer directement à leurs clientèles, sans intermédiaire.

Risque technologique

Dans la distribution de livres numériques, la vitesse d'exécution est importante, mais aussi la technologie. Des acteurs comme Apple, Amazon et Kobo élaborent souvent de nouvelles plateformes plus conviviales et plus flexibles, forçant De Marque à innover pour rester dans la course. La PME de Québec investit environ 20 % de son chiffre d'affaires - soit un million de dollars - pour développer de nouvelles plateformes et moderniser celles qui existent.

Risque d'accès aux marchés

Dans plusieurs pays, c'est souvent les premiers acteurs arrivés qui décrochent la part du lion des contrats accordés par les éditeurs aux distributeurs de livres numériques. "Il y a une course contre la montre pour occuper tôt les marchés prometteurs", explique Marc Boutet. Mais il faut avoir un bon partenaire pour ne pas se casser la gueule, surtout s'il s'agit de distribuer dans une langue autre que le français ou l'anglais, comme le finnois.

40% Croissance annuelle prévue de la distribution de livres numériques de De Marque dans le monde d'ici 2016. Source : De Marque

Dans cette série, nous décodons la stratégie internationale d'une entreprise québécoise et analysons ses risques.

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françois.normand@transcontinental.ca

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