Et si on choisissait son patron...

Publié le 01/04/2009 à 00:00

Et si on choisissait son patron...

Publié le 01/04/2009 à 00:00

"Notre patron quitte l'entreprise, un nouveau dirigeant devrait être nommé d'ici deux mois. C'est le troisième en cinq ans. J'espère qu'on ne changera pas encore de mission. De toute façon, on ne peut prendre aucune décision tant qu'il ne sera pas en poste."

"Ils ont ouvert le concours, mais je suis certain que tout est "pipé". J'espère que ce ne sera pas Paul ! C'est juste un grand parleur ! Marie ne serait pas mieux. Elle est tellement politique ! Devrais-je tenter ma chance ? Je ne pourrais pas être pire que le dernier..."

Voilà tout le questionnement et l'insécurité engendrés par la nomination d'un nouveau patron. Que d'énergie gaspillée et d'intelligence perdue ! Pourtant, c'est ainsi quon procède depuis des années. Lorsque j'étais président du bureau canadien d'Adecco, c'était mon équipe du siège social et moi qui "couronnions" les nouveaux directeurs, en fonction de nos attentes. Et je subissais le même sort lorsqu'on nommait un nouveau vice-président pour l'Amérique du Nord. Je ne comprenais jamais leur choix, qui s'avérait d'ailleurs souvent mauvais.

Puis, j'ai eu un moment de lucidité. Je me suis dit que mes équipes devaient avoir les mêmes frustrations que moi face aux décisions du siège social. Nous avons donc décidé de leur laisser le choix de leur leader. En fonction du projet qu'elle porte, de sa dynamique d'équipe, de sa culture régionale et de ses clients, chaque équipe saurait élire le bon patron. Et ils se sont moins trompés que nous ! Cependant, il leur manquait la vision globale. Après réflexion, nous avons conclu qu'il serait préférable de faire le choix ensemble. Ce cheminement nous a demandé beaucoup de courage, car il ne correspondait à aucun modèle de gestion, et surtout pas à la vision de nos patrons.

En pratique, comment se choisit-on un nouveau patron ? D'abord, on définit en équipe le profil recherché en combinant des rencontres de groupe et des rencontres individuelles. Ensuite, on entreprend le processus qui se termine par un long dialogue entre l'équipe et le candidat. Dialogue au cours duquel l'aspirant patron doit faire preuve d'humilité devant les employés potentiels qui l'interrogent sur sa vision. Il nous est arrivé qu'une candidate refuse de se livrer à cet exercice. Elle nous a ainsi montré qu'elle n'était pas faite pour diriger une entreprise où les intelligences sont utilisées et où le pouvoir est quelque chose que l'on reçoit, et non quelque chose qui se prend ou qui est accordé par un titre.

Cette façon de faire exige une grande maturité de la part des membres de l'équipe, surtout quand un de ses membres, ou plusieurs, est pressenti ou postule pour le poste. Mais le jeu en vaut la chandelle. En trouvant "le" leader, nous sommes parvenus à mettre l'intelligence locale et la vision globale au service du bien commun. Les périodes de doute se sont estompées, et nos réussites se sont multipliées. Le temps requis pour trouver le bon leader n'est plus un problème, car l'ambiance est moins perturbée. On peut attendre, ensemble, la perle. Cette façon de procéder a transformé nos relations et nous a responsabilisés.

Vous l'aurez deviné : cette méthode facilite drôlement l'accueil et l'intégration du nouveau patron. Comme nous l'avons choisi ensemble, nous nous arrangeons tous pour que ça marche. Il n'y a pas 36 façons de réagir face à un nouveau patron : soit on l'aide à être bon, soit on le regarde manquer son coup !

Mais nous n'avons rien inventé, car c'est ainsi que sont nommés les abbés bénédictins depuis 1 480 ans. Ces leaders demeurent en place pendant des décennies et réalisent de grandes choses.

Définissez alors clairement votre projet et l'état d'esprit que vous valorisez et trouvez, ensemble, celui ou celle qui influencera par l'exemple.

remi.tremblay@esseleadership.ca

Rémi Tremblay a été président d'Adecco Québec et d'Adecco Canada. Il est l'auteur de deux ouvrages : Découvrez le bonheur au boulot et Les fous du roi. Depuis 2004, il accompagne les dirigeants qui souhaitent repousser les frontières de leur leadership.

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