Une étude réalisée au Québec et en Europe déboulonne le mythe voulant que la protection de l'environnement coûte cher aux entreprises.
L'étude démontre que l'écoconception - la démarche qui consiste à réduire l'empreinte écologique d'un produit aux différentes étapes de sa fabrication - est profitable pour une entreprise : soit il en découle une augmentation des profits, soit l'impact financier est neutre, mais elle engendre toujours des gains environnementaux.
De plus, l'étude évalue que la marge bénéficiaire des produits écoconçus se situe, en moyenne, à 12 % au-dessus de la marge des produits conventionnels.
«Il y a plusieurs arguments pour convaincre une entreprise de faire de l'écoconception : sa responsabilité sociale, l'amélioration de son image, les attentes des consommateurs... Grâce à cette étude, nous pouvons ajouter l'argument de la rentabilité», commente Bertrand Derome, directeur général de l'Institut de développement de produits qui a commandité la partie québécoise de l'étude.
Le sondage a été réalisé par Paul Lanoie, de HEC Montréal, et Sylvain Plouffe, de l'Université de Montréal, en collaboration avec deux chercheurs de l'Université catholique de Lyon, en France. Il porte sur 119 entreprises actives en écoconception (44 québécoises, 49 françaises et 26 d'autres pays de l'Union européenne).
Presque tous les répondants (96 %) ont affirmé que l'écoconception avait eu un impact positif ou neutre sur leurs profits. Au Québec, le pourcentage s'élève à 93 % : selon 51 % des entreprises sondées, l'écoconception avait fait grimper leurs profits, tandis que pour 42 % d'entre elles, la démarche avait eu un impact neutre.
L'étude démontre aussi que plus l'entreprise prend en compte un grand nombre d'étapes du cycle de vie du produit dans son approche d'écoconception, plus sa rentabilité est élevée.
Un des participants à la recherche, Jonathan Hardy, travaille chez le fabricant de luminaires Philips Lumec, dont l'usine est à Boisbriand. «Nous avons été parmi les premiers à prendre le virage [de la] DEL, qui permet aux lampes de consommer 50 % moins d'énergie, explique-t-il. Nous sommes intervenus à deux étapes, l'utilisation et la fin de vie, et sur six niveaux, la consommation d'énergie, l'emballage, le recyclage, le poids, les substances dangereuses et la durée de vie. Nos marges ont augmenté de façon significative, tandis que le pourcentage de nos ventes issues de produits écoconçus est passé de 30 % en 2011 à 53 % en 2013.»
Plus de méthode et d'aide
Les chercheurs ont aussi observé que plus la démarche d'écoconception est méthodique, plus la rentabilité de l'écoconception est élevée. Et c'est là que le bât blesse pour les entreprises québécoises, estiment les chercheurs Lanoie et Plouffe. «Le sondage nous permet de constater qu'ici on procède davantage à tâtons. Ainsi, il y a des entreprises qui affichent des niveaux supérieurs de marges, mais d'autres qui enregistrent des niveaux supérieurs de pertes. Nous sommes plus forts dans les extrêmes. Le sondage démontre aussi que seulement 30 % de nos entreprises vont chercher de l'accompagnement d'organismes extérieurs, comparativement à 80 % en France.» C'est pourquoi les chercheurs québécois croient qu'un plus grand niveau d'accompagnement améliorerait la situation. Ils croient également que la réglementation pourrait être plus sévère, comme en Europe.
Cette étude énumère par ailleurs les nombreuses retombées positives non financières de l'écoconception. Une des particularités des résultats à cet égard au Québec, c'est que la démarche augmente aussi la fierté des employés de l'entreprise qui l'applique.
