Les églises québécoises à l'heure de la reconversion

Publié le 23/12/2013 à 15:31

Les églises québécoises à l'heure de la reconversion

Publié le 23/12/2013 à 15:31

Premier d'une série de cinq. Depuis une décennie, pas moins de 285 églises du Québec ont changé de vocation, sinon elles sont sur le point de le faire.

La majorité de ces églises ont été converties. Elles ont été mutées en centres communau­taires, en bibliothèques, en salles de spectacle ou même en im­meubles à logements abordables, d’après une compilation scrupuleuse du Conseil du patrimoine religieux du Québec (CPRQ), un organisme à but non lucratif qui veille à la mise en valeur des biens et des immeubles de l’Église.

Parfois, les nouvelles fonctions de ces églises sont multiples. Par exemple, l’église Sainte-Germaine-Cousin, dans l’arrondissement de Rivière-des-Pariries–Pointe-aux-Trembles, abritera sous peu une salle communautaire ainsi qu’un centre de la petite enfance. À la place de l’ancien presbytère, un immeuble à logements pour des personnes âgées sera construit.

Les activités de culte ne sont pas nécessairement écartées des projets. Plusieurs communautés religieuses ont d’ailleurs racheté ces églises. Dans d’autres cas, un espace plus restreint a été accordé aux religieux. À La Durantaye, dans Chaudières- Appalaches, l’église Saint-Gabriel a été trans­­formée en centre multifonctionnel. Les bancs ont été retirés. Le chœur y est toujours, mais il est dissimulé derrière un rideau lors des activités laïques.

Dans moins de 1 % des cas, les églises ont été modifiées pour abriter des condos. «Des projets de condos, ce n’est pas l’avenir, a indiqué le chargé de projet du CPRQ, Denis Boucher. Il y a toutes sortes de modifications qui doivent être faites et leur coût est énorme.»

D’après la professeure titulaire à la Faculté de théologie et des sciences de la religion à l’Université de Montréal, Solange Lefebvre, le Québec est en avance sur plusieurs pays, notamment européens, lorsqu’il est question de trouver un nouvel usage aux églises. «On est plus avancé dans la mesure où on en a déjà converties, a-t-elle dit. On a assumé déjà le fait qu’il fallait [convertir ces églises]».

Mme Lefebvre a notamment souligné la création de la Fondation du patrimoine religieux du Québec, en 1995, qui est devenue en 2007 le CPRQ, ainsi que du rapport de la Commission de la culture déposé en 2006, Croire au patrimoine religieux du Québec.

Le gouvernement du Québec a en plus consacré près de 275 M$ dans la restauration du patrimoine religieux depuis 1995.

Bien que le Québec ait fait un pas de plus, il est encore trop souvent en mode réaction, a déploré l’architecte Ron Rayside. «Il faudrait que l’archevêché, les églises, la Ville et peut-être même le gouvernement du Québec s’assoient ensemble pour voir quel sera le plan pour les 20 prochaines années. Il faut qu’on ait une grande réflexion et surtout le temps de la faire», a-t-il fait savoir.

En 2006, la Commission de la culture a demandé en vain au gouvernement du Québec de décréter un moratoire «sur l’aliénation et la modification des bâtiments religieux».

Ron Rayside regrette que trop souvent, les communautés cherchent à la va-vite un nouvel usage à leurs églises. Lorsque celles-ci sont fermées, elles se détériorent rapidement, faute d’entretien. Et le temps que les communautés, sinon les promoteurs, trouvent un projet réalisable et le financement nécessaire, la dégradation s’accélère.

«Quand on trouve un acquéreur, il y a une facture de mise à niveau qui est énorme, a rapporté M. Boucher. Et je ne parle pas de mise aux normes et de tout ce que le bâtiment peut exiger selon l’usage qu’on veut en faire.»

Histoire. Plus de 100 ans de changement

Depuis près d’un siècle, des églises du Québec sont vendues, transformées sinon démolies.

Elles ont laissé leur place dans un premier temps à des développements immobiliers ou même autoroutiers. Sinon, elles sont devenues inutiles en raison de la fusion de deux communautés religieuses.

À partir des années 1990, la désertion des églises, le vieillissement de la communauté religieuse et la baisse des vocations religieuses ont poussé les diocèses et les fabriques à commencer à se départir  de leurs bâtiments, dont l’entretien est onéreux. Une poignée d’églises changeaient alors de main à chaque année.

De 1900 à 2003, près de 250 églises ont été converties, selon l’évaluation de la Chaire de recherche en patrimoine urbain de l’Université du Québec à Montréal.

Au fil des ans, la cadence s’est accélérée. Tellement qu’aujourd’hui, près d’une église par semaine est fermée, vendue ou transformée. Au moins 50 églises délaissent annuellement en tout ou en partie leur fonction religieuse. Des travaux sont actuellement réalisés dans 13 d’entre elles.

Le financement, le nerf de la guerre

• Le ministère de la Culture dispose d’une enveloppe budgétaire, dont une partie est gérée par le CPRQ, pour protéger le patrimoine religieux.

• Le CPRQ accorde une aide financière à hauteur de 70 % des coûts des projets. Il évalue ceux-ci selon la valeur patrimoniale de l’église – un classement des églises cons­truites avant 1945 a été fait –, la teneur des travaux et la participation de la communauté.

• Du côté du ministère de la Culture, il finance en partie les projets situés sur des sites patrimoniaux, désignés par lui-même ou les municipalités.

• «Dans le cas de la basilique Notre-Dame, dans le Vieux-Montréal, il n’y a pas de problème, c’est une église reconnue qui est bien classée par le [CPQR]. Quand l’église n’est pas bien classée, elle n’est pas dans les "winners" qui ont accès à l’argent», a expliqué la professeure à la Faculté de théologie et des sciences de la religion à l’Université de Montréal et titulaire de la Chaire religion, culture et société, Solange Lefebvre.

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