Restructuration judiciaire d'AbitibiBowater: le Québec a payé le gros prix

Publié le 25/05/2010 à 17:54

Restructuration judiciaire d'AbitibiBowater: le Québec a payé le gros prix

Publié le 25/05/2010 à 17:54

Par La Presse Canadienne

Photo : lesaffaires.com

Ce sont les installations québécoises d'AbitibiBowater qui ont le plus souffert, et de loin, de la réorganisation de la forestière.

Depuis la fusion entre la montréalaise Abitibi-Consolidated et l'américaine Bowater, qui a pris effet en octobre 2007, l'entreprise regroupée a réduit de 3,17 millions de tonnes métriques sa capacité nord-américaine de production de papier.

De ce nombre, 2,45 millions de tonnes métriques ont été supprimées au Canada, soit 77,4 pour cent du total, et 1,38 million de tonnes métriques au Québec, ou 43,6 pour cent du total, selon les chiffres officiels d'AbitibiBowater.

En revanche, les réductions de production aux États-Unis, qui ont totalisé 717 millions de tonnes métriques, n'ont compté que pour 22,6 pour cent du total.

Deux usines québécoises, celle de Donnacona et la Belgo de Shawinigan, ont été fermées de façon définitive, alors que la production dans trois autres - Beaupré, Dolbeau et Gatineau - a été interrompue pour une durée indéterminée.

Dans le reste du Canada, trois usines ont été fermées de façon permanente (en Colombie-Britannique, au Nouveau-Brunswick et à Terre-Neuve-et-Labrador) et trois pour une période indéterminée (en Ontario). Aux États-Unis, une usine a été fermée de façon permanente et trois pour une durée indéterminée.

Depuis octobre 2007, AbitibiBowater a licencié environ 6000 employés, mais la compagnie refuse de préciser combien dans chaque pays.

Au terme de la réorganisation, le Canada se retrouve donc avec 55,3 pour cent de la capacité totale d'AbitibiBowater en Amérique du Nord (contre 59,8 pour cent à la fin 2007), comparativement à 44,7 pour cent pour les États-Unis (40,3 pour cent en 2007). La part du Québec est passée de 33,4 pour cent à 30,5 pour cent en deux ans et demi.

«Cet équilibre entre les installations canadiennes et américaines présente l'avantage d'offrir à l'entreprise qui émergera de la protection des tribunaux une protection contre les fluctuations des taux de change et une flexibilité sur les marchés», a expliqué un porte-parole d'AbitibiBowater, Xavier Van Chau.

«Il est malheureux que nous ayons eu à fermer des usines, mais celles que nous avons fermées étaient celles dont les coûts étaient les plus élevés, de sorte qu'il nous reste seulement les meilleures installations», a déclaré le président et chef de la direction de l'entreprise, David Paterson, au cours d'un entretien téléphonique, mardi.

M. Paterson a dit avoir bon espoir que les fermetures d'usines sont désormais chose du passé, à moins que la situation ne se détériore davantage.

«Aucun de ceux qui suivent l'industrie ne devrait penser que la demande pour le papier journal va reprendre», a-t-il reconnu.

«Nous croyons que le papier journal va continuer à être en recul et que nous devons faire face à cette baisse non pas en réduisant davantage la capacité, mais en développant de nouveaux produits à fabriquer sur ces machines», a ajouté le dirigeant.

Pour Dave Coles, président du Syndicat canadien des communications, de l'énergie et du papier (SCEP), David Paterson «prend ses rêves pour la réalité». Il craint de nouvelles mises à pied.

Nouveaux produits

AbitibiBowater compte retrouver le chemin de la croissance en perçant de nouveaux marchés d'exportation et en se tournant vers le papier destiné aux catalogues, circulaires, imprimantes à jet d'encre et emballages.

Depuis la fin 2007, l'entreprise a réduit de 36 pour cent sa capacité de production de papier journal, dont les ventes représentent aujourd'hui 38 pour cent du chiffre d'affaires total, contre 45 pour cent il y a deux ans.

La capacité de production du papier d'impression commerciale a fondu de 38 pour cent, alors que celle des produits du bois a diminué de 21 pour cent.

AbitibiBowater a déposé mardi, en Cour supérieure du Québec, son plan de réorganisation modifié dans le cadre de sa restructuration judiciaire, dont la version américaine a déjà obtenu l'appui du comité des créanciers non garantis des États-Unis. L'entreprise espère se dégager de la protection des tribunaux cet automne.

David Paterson a confié mardi qu'il avait trouvé le processus de restructuration judiciaire, amorcé en avril 2009, plus difficile que ce à quoi il s'attendait, en raison de la complexité de la structure financière de l'entreprise et des problèmes liés aux questions transfrontalières.

AbitibiBowater s'est départie d'actifs et de terres d'une valeur totale de 940 millions $ US, y compris sa participation de 60 pour cent dans la Compagnie hydroélectrique Manicouagan, cédée à Hydro-Québec pour 615 millions $. Lorsqu'elle émergera de la restructuration judiciaire, l'entreprise aura une dette d'environ 1,6 milliard $ US, contre 6,5 milliards $ US actuellement.

Les créanciers non garantis recevront généralement entre 0 et 48 pour cent de la valeur de leurs réclamations, selon la catégorie à laquelle ils appartiennent. Les employés licenciés depuis avril 2009 ne recevront pas d'indemnités de départ. Quant aux actionnaires, ils ont tout perdu.

Avant de renaître, AbitibiBowater devra obtenir un financement de sortie et obtenir le feu vert des autorités canadiennes en ce qui a trait à l'important déficit actuariel de ses régimes de retraite.

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