Entrevue PQ: Lisée ciblerait PME, salaires des PDG et la Caisse

Publié le 13/09/2018 à 07:41

Entrevue PQ: Lisée ciblerait PME, salaires des PDG et la Caisse

Publié le 13/09/2018 à 07:41

Par Stéphane Rolland

Le chef du Parti québécois, Jean-François Lisée. (Photo: Martin Flamand)

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Le Parti québécois (PQ) veut devenir «le gouvernement des PME» en réduisant leur fardeau administratif et en les aidant à exporter. S’il devient premier ministre, Jean-François Lisée s’attribuera la responsabilité des PME pour forcer l’administration publique à développer de meilleures relations avec les entrepreneurs, promet-il en entrevue avec Les Affaires.

«Il y a eu des progrès, mais il reste que le fardeau administratif représente 8 G$ de coût pour l’ensemble des petites entreprises. Si on réduit ce fardeau du tiers ou de la moitié, on vient de réduire les coûts des entreprises sans avoir à alléger leur fardeau fiscal», affirme-t-il lors d’une entrevue aux bureaux du PQ à Montréal.

La culture au sein de l’administration publique doit changer en ce qui concerne les contacts avec les PME, juge celui qui était ministre des Relations internationales, de la Francophonie et du Commerce extérieur dans le gouvernement Marois. Plutôt que de chercher à pincer les entrepreneurs qui démarrent une entreprise, les organismes gouvernementaux devraient plutôt les aider à respecter les règles, qui peuvent être complexes pour quelqu’un qui se lance en affaires. La délivrance de permis et de certificats devrait aussi se faire plus rapidement, tout en s’assurant du respect des lois.

D’autres mesures s’adressent aux PME. Parmi elles, on veut contraindre les grandes entreprises à payer leurs fournisseurs (souvent de plus petites entreprises) dans un délai de 30 jours. On veut aussi adopter un crédit d’impôt pour encourager les entreprises québécoises à augmenter leurs revenus à l’étranger.

Immigration et pénurie de main-d’œuvre

L’immigration et la pénurie de main-d’œuvre se sont imposées comme un thème récurrent de la campagne. M. Lisée semble agacé lorsqu’on aborde le sujet. «Ce que j’ai dit, c’est que les libéraux en ont fait venir 50 000 par année et il y en a 15 000 qui sont partis, 15 000 dont le rêve québécois a été brisé. La réalité, c’est que le chiffre de 35 000 aurait été plus proche du succès, pour le passé. Pour l’avenir, je n’ai pas de chiffre. C’est faire de la numérologie politique que d’inventer un chiffre pour l’avenir.»

En entrevue avec Les Affaires, Philippe Couillard a dit que réduire le nombre d’immigrants admis empirerait la pénurie. La CAQ, pour sa part, propose de ramener ce seuil de 50 000 à 40 000.

Le PQ dit vouloir se baser «sur les faits». On demandera l’aide du Vérificateur général pour déterminer le seuil idéal selon les besoins de chaque région. On souhaite mieux arrimer l’immigration avec les besoins des employeurs et que les diplômes obtenus à l’étranger soient reconnus plus facilement. «On veut dépolitiser cette question», insiste M. Lisée.

Pour contrer la pénurie de main-d’œuvre, le PQ mise également sur l’incitation au travail des travailleurs d’expérience, l’aide à la robotisation et la rétention des étudiants étrangers venus faire leurs études au Québec.

Imposer la TVQ en ligne

Dans le commerce de détail, M. Lisée veut contraindre les commerçants en ligne à percevoir la taxe de vente provinciale (TVQ) sur les biens tangibles. Que des entreprises vendent leurs biens en ligne exempts de taxes est une injustice pour les petites entreprises qui respectent les lois fiscales, dénonce le candidat. Au pouvoir, le PQ en ferait une «urgence nationale» et dit souhaiter régler le dossier avant Noël 2019.

La proposition diffère de celle du gouvernement Couillard qui avait jugé que de récupérer ces sommes unilatéralement était trop complexe. Québec avait décidé de s’associer au fédéral, qui tente d’arrêter les colis aux douanes. Le nombre élevé de boutiques en ligne rend la contrainte par vendeur difficile à appliquer, faisait-on valoir au ministère des Finances. (Après la publication du texte, le PLQ a dévoilé son engagement de forcer les commerçants en ligne à collecter la taxe de vente sur les produits intangibles, NDLR)

M. Lisée assure, pour sa part, que c’est faisable. «Les Japonais, les Européens et les Australiens le font, répond-il. Ce qu’on peut faire, c’est de créer un registre des principaux vendeurs, on les contacte et on fait en sorte qu’ils perçoivent la taxe. Ensuite, on continue vers les plus petits.»

Une Caisse de dépôt plus interventionniste

Parce qu'il estime que le gouvernement Couillard a fait montre d'une « absence de réflexe national», M. Lisée veut remettre le développement économique du Québec au sein de la mission de la Caisse de dépôt et placement du Québec, au côté de la création de rendement pour ses déposants. La loi qui régit la Caisse serait modifiée pour que le développement national, régional et sectoriel fasse partie de sa mission.

Une clause touchant la protection des sièges sociaux sera également ajoutée. Pour les investissements dans du matériel roulant, on imposera à la Caisse de s’assurer qu’il y ait un minimum de 30% de contenu québécois dans le projet. M. Lisée déplore que ce n'ait pas été le cas pour le Réseau express métropolitain (REM). «Ça se fait partout ailleurs. Sur le contenu local, les libéraux sont les idiots de la classe, car tout le monde a compris.»

Malgré ces critères, la direction de la Caisse conservera son indépendance, assure M. Lisée. Elle pourra toujours décider en fonction des meilleurs investissements pour les déposants, mais elle devra tenir compte de sa nouvelle mission, précise le chef du PQ.

Les épargnants québécois devraient aussi pouvoir confier leurs épargnes personnelles à la Caisse. Ces épargnes à long terme ne seraient toutefois pas éligibles à un crédit d’impôt comparable à celui offert aux fonds de travailleurs (Fonds de solidarité FTQ et Fondaction CSN). «On sait qu’on introduit un concurrent dans le marché, mais ce n’est pas un concurrent au fonds de travailleurs, c’est un concurrent aux banques. Puis, ça nous fait plaisir d’avoir un concurrent de plus aux banques.»

Le Fonds des générations serait aussi appelé à contribuer au développement économique du Québec. M. Lisée n’a pas l’intention de changer la raison d’être du Fonds, qui est de contribuer à la réduction de la dette du Québec. Ses actifs et les versements prévus seront maintenus. Par contre, 10% des nouveaux versements devront être dirigés vers des projets «structurants» pour le Québec. N’est-ce pas une façon indirecte de puiser dans le Fonds des générations? «Non, on laisse l’argent-là, mais on le fait travailler plus pour la croissance québécoise», insiste M. Lisée.

Salaire des patrons

M. Lisée s’attaquerait enfin au salaire des hauts dirigeants des sociétés d’État et des entreprises cotées en Bourse. À l’exception de la Caisse, qui doit concurrencer les rémunérations du secteur financier, les nouvelles recrues à la tête des sociétés d’État «ne pourront plus gagner davantage que le premier ministre».

Un gouvernement péquiste punirait également les sociétés cotées en Bourse qui verseraient une rémunération «déraisonnable» à leurs cinq dirigeants les mieux payés. Une «taxe glouton» serait imposée à l’excédent des rémunérations qui dépassera le ratio de 30 fois le salaire médian. Les entreprises recevront un préavis de deux ans. À la troisième année, la taxe sera de 10% de l’excédent et grimpera à 25% à la quatrième année.

Le PQ sera-t-il capable d’imposer cette taxe aux entreprises à charte fédérale? Une hésitation est perceptible. Nicolas Marceau, l’ex-ministre des finances du gouvernement Marois, qui participe à l’entrevue, dit que ce serait « un peu plus complexe», mais qu’il y a «certainement» des façons de le faire, en changeant la loi sur l’impôt, notamment. «Puis dans un deuxième mandat, comme on sera indépendant, la question ne se posera plus», ajoute M. Lisée.

Manon Massé, de Québec solidaire

François Legault, de la Coalition avenir Québec

Philippe Couillard, du Parti libéral du Québec


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