Des organismes demandent un «New Deal» vert canadien

Publié le 06/05/2019 à 13:29, mis à jour le 06/05/2019 à 16:14

Des organismes demandent un «New Deal» vert canadien

Publié le 06/05/2019 à 13:29, mis à jour le 06/05/2019 à 16:14

Par La Presse Canadienne
Une femme latino-américaine entourée d'un groupe de personne devant le Capitole de Washington.

Alexandria Ocasio-Cortez, la porte étendard du «Green New Deal» américain (Photo: Getty Images)

Le Québec a eu droit, lundi, à sa propre Greta Thunberg, cette adolescente suédoise qui a ébranlé les grands de ce monde avec son discours sur l’urgence de combattre le réchauffement climatique, en décembre dernier à la COP24 des Nations unies tenue à Katowice en Pologne.

À Montréal, c’est la jeune Kyana Prosper, 12 ans, qui a pris la parole, lundi, dans le cadre d’une conférence annonçant une proposition de « New Deal » vert dont l’objectif est d’affronter la situation d’urgence en matière d’environnement, alors que le matin même, un rapport de l’ONU faisait état d’une menace d’extinction pesant sur un million d’espèces de plantes et d’animaux.

« L’environnement, c’est un des sujets les plus importants pour notre génération, mais pas pour les gouvernements ; pour eux, c’est l’argent qui importe le plus. Est-ce le message qu’ils veulent nous transmettre aujourd’hui ? Tant pis la planète et vive l’argent ? », a-t-elle laissé tomber devant un public gagné d’avance.

Son père, le documentariste et activiste Will Prosper, était ému en présentant sa fille : « Aujourd’hui, c’est l’enjeu le plus important, pas de sa génération, pas de ma génération ou celle des baby-boomers, mais c’est le défi le plus important de toutes les générations. »

Urgence d’agir

Le père et la fille étaient parmi une demi-douzaine de porte-parole venus s’exprimer au nom d’une soixantaine de groupes d’horizons divers pour réaffirmer l’urgence d’agir afin de contrer la crise climatique et inviter les gouvernements à sortir de leur torpeur dans les plus brefs délais.

« Moi, je peux faire des petits gestes, mais le gouvernement doit faire des plus gros gestes immédiatement. On se donne le go pour l’environnement », a conclu Kyana Prosper, reprenant à son compte un ancien slogan de l’actuel premier ministre du Québec, François Legault.

Le message était relayé, lundi, dans une série de conférences de presse à travers le Canada, par ces organisations de scientifiques, d’Autochtones, de professionnels de la santé, d’étudiants, d’artistes, de syndicats et d’environnementalistes.

Celles-ci ont appelé à lancer un « New Deal » vert.

Selon ces intervenants, la question de l’urgence ne se pose plus ; les inondations, les incendies de forêt, les vagues de chaleur, la fonte du pergélisol en Arctique sont autant de signes de la catastrophe en devenir que l’humanité n’a plus les moyens d’ignorer.

Et qui de mieux qu’un urgentologue pour bien le faire comprendre, en l’occurrence le docteur Éric Notebaert, de l’hôpital Sacré-Cœur : « L’été, à cause des vagues de chaleur intense, des dizaines de personnes décèdent dans nos urgences. (...) Des centaines de personnes souffrent de problèmes multiples, surtout pulmonaires et cardiaques, et vont finir par en décéder des semaines plus tard. Ça n’existait pas il y a 30 ans, au début de ma pratique. »

Pour le spécialiste, il faut éviter les solutions simplistes à un problème aussi complexe que le climat.

« La solution n’est certainement pas de climatiser les résidences (pour personnes âgées) comme on a pu l’entendre récemment. C’est comme si on proposait un sparadrap à un polytraumatisé qui va décéder », a-t-il dit.

Faire entendre la science

Selon les porte-parole de cette mouvance, les constats scientifiques sont sans appel et ils affirment que tous les efforts doivent être mis en œuvre pour que le Canada réduise de moitié ses émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030, soit dans 11 ans.

Le metteur en scène et initiateur du Pacte pour la transition, Dominic Champagne, est toutefois bien conscient qu’il y a un effort de communication publique majeur à entreprendre.

« Le message de la science, il n’est pas entendu, visiblement ; c’est à peine si on a commencé à passer de la parole aux actes. On est toujours dans l’attente d’une volonté politique réelle qui puisse s’exprimer et faire en sorte qu’on puisse faire un effort similaire à l’effort de guerre », a-t-il martelé.

La coalition dénonce non seulement l’inertie des gouvernements, qui tardent à prendre des mesures musclées, mais aussi leur aveuglement face au développement économique qui les mène à soutenir, au Québec, des projets tels que le troisième lien entre Québec et sa Rive-Sud ou le gazoduc et l’usine de liquéfaction du gaz naturel à Saguenay.

« Le gaz naturel n’est certainement pas une énergie de transition, a soutenu le docteur Notebaert. Un taux de fuite de méthane à seulement 2 ou 3 % annule tout le bénéfice tant clamé par l’industrie. Or, aux États-Unis, on estime que les fuites dépassent facilement les 5 %. »

Au-delà de l’environnement

Le « New Deal » vert va toutefois bien au-delà de la bataille environnementale : il inclut également une lutte contre l’injustice sociale et économique et entend promouvoir en parallèle l’égalité économique, l’accessibilité au logement, la pérennité du travail et l’éradication du racisme.

Pour Will Prosper, les gouvernements sont passés maîtres dans l’art de la distraction. Prenant l’exemple du projet de loi sur la laïcité, il fait valoir que tout est mis en place pour faire croire à une menace inexistante provenant des religions ou même des migrants, alors que la menace réelle est dans l’air ambiant.

« On ne peut plus se permettre de tomber dans le panneau qui nous divise sur des enjeux préfabriqués de toutes pièces par nos politiciens tandis que notre planète nous indique des véritables signaux d’alarme », a-t-il dit.

L’image est reprise par le docteur Notebaert. « Dans les hôpitaux, quand quelqu’un fait un arrêt cardiaque, on parle d’un code bleu : tout le monde se mobilise pour aller sauver cette personne-là. On appelle maintenant à un code bleu planétaire », a lancé l’urgentologue.

La coalition d’organismes prévoit tenir dans les prochaines semaines une série d’assemblées citoyennes auxquelles le grand public est invité afin de jeter les bases de leurs revendications et préparer des propositions de politiques publiques.

McKenna : peu d’enthousiasme

La ministre canadienne de l’Environnement, Catherine McKenna, a accueilli plutôt froidement l’initiative.

« Nous sommes toujours heureux de recevoir de nouvelles idées, mais nous avons déjà un plan de lutte contre les changements climatiques qui a été négocié par des Canadiens pour les Canadiens », a-t-elle dit alors qu’elle se trouvait à Paris pour une rencontre des ministres de l’Environnement des pays du G7.

« Nous avons négocié durant un an avec les provinces, les territoires et les peuples autochtones et nous tenons les provinces responsables des engagements qu’elles ont pris », a fait valoir Mme McKenna.

La ministre a rappelé au passage que le plan fédéral contient tous les éléments-clés, incluant autant des gestes pour réduire les émissions de GES, telle l’élimination progressive du charbon, que de mesures de soutien aux travailleurs dont les emplois sont en jeu en marge d’une transition vers d’autres sources d’énergie que les combustibles fossiles.

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