L'insatiable appétit de la Chine pour les ressources naturelles

Publié le 01/03/2014 à 00:00

L'insatiable appétit de la Chine pour les ressources naturelles

Publié le 01/03/2014 à 00:00

Par François Normand

La croissance des exportations québécoises de minerai de fer en Chine est phénoménale. En 2008, nos expéditions étaient de 6,7 millions de dollars canadiens. En 2012, elles avaient été multipliées par 119 pour atteindre 800 M$.

Libre-échange avec la Chine - Série 4de6 - Le Québec est un maillon clé dans la chaîne d’approvisionnement de la Chine. Des 25 principaux produits que nous exportons dans ce pays, les ressources naturelles ou les matières premières en forment la moitié. L’économie québécoise aurait donc tout à gagner d’un éventuel accord de libre-échange entre le Canada et le géant asiatique, disent les spécialistes.

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Même si la Chine est un important producteur de ressources (charbon, gaz, fer, terres rares, etc.), elle doit en importer pour répondre à ses gigantesques besoins. C’est pourquoi elle multiplie les accords de libre-échange. Le pays en a conclu un avec le Chili et 10 pays de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est. Des ententes qui visent à sécuriser et à garantir à moindre coûts les approvisionnements de l’industrie chinoise en ressources et en matières premières.

« C’est pourquoi un accord de libre-échange avec le Canada, un pays riche en ressources naturelles, représenterait un grand avantage pour la Chine », dit Ari Van Assche, professeur spécialiste de la Chine à HEC Montréal. Si les entreprises chinoises y trouvaient leur compte, les sociétés canadiennes en profiteraient autant sinon plus.

Car pour soutenir sa croissance économique et son urbanisation, la Chine a besoin de ressources et de matières premières dont le Canada regorge, des hydrocarbures de l’Ouest canadien aux minerais stratégiques du nord du Québec. C’est d’ailleurs pourquoi des entreprises chinoises, canadiennes et d’autres nationalités investissent dans la province pour exploiter nos ressources.

En 2012, près du tiers des exportations totales du Québec en Chine était d’ailleurs constitué de minerai de fer, produit en partie par le géant ArcelorMittal Mines Canada. La croissance des expéditions québécoises de minerai de fer en Chine est d’ailleurs faramineuse. En 2008, nos exportations s’élevaient à 6,7 millions de dollars canadiens. En 2012, elles avaient été multipliées par 119 pour atteindre 800 M$.

L’avantage de la stabilité

Le potentiel de croissance est encore immense en Chine pour les producteurs de ressources naturelles au Canada, confirme une étude conjointe publiée en 2012 par les gouvernements canadien et chinois (Étude sur les complémentarités économiques du Canada et de la Chine).

Dans l’énergie, par exemple, le Canada peut renforcer son rôle de fournisseur fiable, concurrentiel et politiquement stable. Une stabilité qui intéresse au plus haut point les autorités chinoises, selon Jie He, spécialiste de l’environnement et du commerce à l’Université de Sherbrooke. « La Chine préfère importer des ressources naturelles de pays où les risques politiques et économiques sont faibles », dit-elle.

Le Canada est un marché idéal, par rapport à des pays producteurs de pétrole comme le Nigeria ou l’Iraq. Mais pour l’instant, le manque d’infrastructures limite nos exportations de pétrole et de gaz naturel en Chine. L’éventuelle construction de nouveaux pipelines desservant la côte Ouest canadienne stimulerait nos exportations. Enbridge a par exemple un projet d’un oléoduc double (The Northern Gateway, gaz et pétrole), qui relierait l’Alberta à la côte de la Colombie-Britannique.

Une entente de libre-échange serait aussi favorable pour industrie forestière. Les producteurs de bois d’oeuvre de l’Ouest canadien, comme West Fraser Timber, de Vancouver, pourraient accroître leurs ventes, d’autant plus que le bois est de plus en plus utilisé dans la construction en Chine. Des occasions qui seraient toutefois plus difficiles à saisir pour les entreprises du Québec en raison des coûts de transport. En 2012, nous avons exporté du bois d’oeuvre en Chine pour une valeur de 10,4 M$, ce qui est peu.

Quant aux métaux et minerais, la Chine aura besoin d’une grande variété dans les prochaines années. Et beaucoup d’entre eux sont produits au Canada, comme le charbon métallurgique, l’aluminium, le minerai de fer, l’engrais potassique et le nickel. Les entreprises et les particuliers en Chine sont aussi friands d’or et de diamants.

Les retombées négatives

Une exploitation accrue de nos ressources aura toutefois des négatifs au pays, prévoient les analystes. Les producteurs pollueraient davantage, sans parler des émissions de gaz à effet de serre (GES). Un beau paradoxe, tandis que le Canada n’arrive pas à atteindre ses cibles de réduction de GES et que la Chine veut se doter de plafonds d’émission pour ses propres entreprises.

Le Canada risque aussi de souffrir du «mal hollandais» - qui affecterait déjà notre économie, selon une récente étude de l’Institut Pembina, un organisme de Calgary en environnement. La demande de nos ressources naturelles fait augmenter la valeur du dollar canadien, ce qui nuit aux manufacturiers exportateurs concentrés en Ontario et au Québec.

Enfin, brasser des affaires au pays avec des entreprises chinoises dans le secteur des ressources naturelles n’est pas sans risque. L’automne dernier, Les Affaires annonçait que la minière chinoise Canadian Royalties (CR), plongée en pleine restructuration, devait plus de 70 millions de dollars à des fournisseurs québécois et inuits. La minière avait été achetée par la société chinoise Jilin Jien Nickel à l’automne 2009, à la suite de la crise financière.

Certains actionnaires de CR et partenaires d’affaires ne mâchent pas leurs mots à l’égard de l’approche privilégiée par la minière chinoise. « Je me bats contre CR depuis 2002, disait Glen Erikson, président de la société d'exploration minière ontarienne Nearctic Nickel Mines. Ses dirigeants sont impitoyables et n'hésitent pas à jouer de sales tours en affaires.»

Selon lui, la direction chinoise de l'entreprise «n'a aucun respect pour les ententes légales et manque de transparence envers le public et les fournisseurs québécois».

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