Fintech : ce que vous devriez savoir avant d’investir

Publié le 02/10/2018 à 01:50

L’industrie de la technologie financière (fintech) est en pleine effervescence au Canada. Ces entreprises et solutions révolutionnent le secteur financier et rendent les produits et services plus accessibles que jamais. Toutefois, avant d’investir ou de développer une nouvelle offre de services en fintech, mieux vaut considérer les exigences réglementaires qui encadrent l’accès au marché.

Jusqu’à maintenant, les entreprises en fintech canadiennes auraient levé des fonds totalisant 263 millions de dollars, selon le plus récent rapport Pulse of Fintech de la firme KPMG, publié en juillet 2018. À Montréal seulement, cela représente environ 3 000 start-up et entreprises qui développent des applications dans le domaine des finances, multiplient les rondes de financement participatif et cognent à la porte de grandes institutions à la recherche de partenaires d’affaires.

Cela représente autant d’opportunités pour les banques, les anges investisseurs et les entrepreneurs qui désirent participer au déploiement de ces technologies. Toutefois, les entreprises en fintech ont adopté l’un des mantras des grands joueurs en nouvelles technologies : agir vite et prendre des risques (move fast and break things). Or, le terrain sur lequel elles s’avancent, soit l’univers de la finance, est hautement réglementé. Avant d’investir en technologie financière, il convient donc de se poser quelques questions de nature juridique.

Un modèle d’affaires juridiquement viable ?

« Parfois, ce qui pose problème, ce sont les normes propres à une industrie, explique Simon Chénard, avocat en droit commercial et en droit des technologies chez Langlois. La rigidité de ces normes peut être sous-estimée par de jeunes entrepreneurs qui ont créé une super solution et qui sont pressés de la mettre en marché. Ont-ils pris le temps de bien faire les choses ? »

La première question à se poser concerne donc la nature des services offerts par une application ou une solution. « Est-ce que la solution propose un produit financier ? Ce n’est pas toujours le cas, car certaines applications sont davantage des outils de mise en marché ou de communication. Mais à partir du moment où une solution touche au processus de vente ou de distribution d’un produit ou service, on doit analyser sa conformité », souligne Jean-François De Rico, avocat droit des technologies de l’information et de la propriété intellectuelle chez Langlois.

Une application de courtage en ligne devra se plier à la Loi sur les valeurs mobilières. De la même façon, une application offrant la possibilité de compléter des propositions d’assurance devra respecter la Loi sur la distribution de produits et services financiers. « Par exemple, plusieurs types de produits financiers demandent la validation de l’identité du client par un conseiller ou un représentant. Les institutions financières souhaitant intégrer une solution en fintech doivent donc se pencher sur les processus d’authentification des utilisateurs, d’enregistrement des transactions et de conservation des données », précise l’avocat.

Avant d’investir dans le développement de ce genre de solution, il est donc absolument nécessaire de s’intéresser à l’environnement juridique dans lequel elle s’inscrit, rappelle Simon Chénard : « Si une entreprise adopte un modèle d’affaires incompatible avec la réglementation en place, il peut être très difficile et très coûteux de revenir en arrière. »

La question des données personnelles

En tant qu’investisseur, la deuxième question à se poser porte sur le type de données qui transitent sur l’application. « En fintech, il est très rare que ces données ne comportent pas de renseignements personnels ou confidentiels. Habituellement, on retrouve les deux », dit Jean-François De Rico, rappelant que les données à caractère financier sont particulièrement sensibles, puisqu’en de mauvaises mains, elles peuvent servir au vol d’identité et à la fraude.

Les start-up qui détiennent ce genre de données doivent donc minimalement respecter les lois sur la protection des renseignements personnels applicables dans les juridictions où elles sont actives. Toutefois, les exigences sont beaucoup plus élevées pour les entreprises qui désirent conclure un partenariat avec une institution financière en particulier pour lui offrir des services réservés.

« Le Bureau du surintendant des institutions financières a émis des lignes directrices pour encadrer les banques faisant affaire avec des sous-traitants. Les entreprises en fintech doivent ainsi répondre à des exigences sécuritaires très strictes, portant entre autres sur la localisation des données et la continuité des services », indique Jean-François De Rico.

Entrevoir les complications futures

Enfin, plusieurs applications de fintech remplacent l’humain par un algorithme pour dispenser des services ou des conseils financiers à leurs clients. Cette utilisation grandissante d’une forme ou d’une autre d’intelligence artificielle devrait également susciter la réflexion chez les investisseurs, croit Jean-François De Rico.

« En tant qu’investisseur ou acquéreur d’une solution en technologie financière, on ne doit pas hésiter à remettre en question la manière dont l’algorithme a été éduqué. Quelles sont les sources des données ? Reflètent-elles la diversité du marché ou de l’activité concernée ? Ultimement, on veut s’assurer que l’algorithme ne contient pas de biais intrinsèques susceptibles de fausser les analyses ou d’induire de la discrimination envers un groupe de personnes », conclut l’avocat.

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