La récession, tremplin des petits joueurs en TI

Publié le 15/02/2023 à 11:30

La récession, tremplin des petits joueurs en TI

Publié le 15/02/2023 à 11:30

Par Philippe Jean Poirier

« Depuis la vague de licenciements, je constate que ‘small is beautiful’», dit Nicole Martel, PDG de l’Association québécoise des technologies (AQT). (Photo: courtoisie)

INDUSTRIE DES TI. Aux États-Unis, la récession appréhendée a provoqué une cascade de licenciements au sein des géants du web – 18 000 chez Amazon, 12 000 chez Google, 11 000 chez Facebook et 10 000 chez Microsoft. De ce côté de la frontière, peu d’entreprises québécoises ont fait des annonces aussi grandiloquentes pour le moment. Il n’en demeure pas moins que le nouveau contexte économique aura de profondes répercussions sur l’industrie des TI. Voyons lesquelles. 

« Depuis la vague de licenciements, je constate que ‘small is beautiful’, dit Nicole Martel, PDG de l’Association québécoise des technologies (AQT), rappelant que le couperet tombe dans de grandes entreprises technologiques soumises aux règles du marché financier, désireuses de présenter des chiffres plus attrayants. « Le contexte économique profite aux petites entreprises technos qui avaient depuis longtemps de la difficulté à pourvoir leurs postes. Elles embauchent, embauchent, embauchent. En fait, plus les entreprises TI sont spécialisées dans un secteur donné et plus elles sont proches de leurs clients, mieux elles s’en sortent. » 

L’analyse est soutenue par un sondage de l’AQT mené l’automne dernier auprès de 243 dirigeants d’entreprises technos québécoises. Du nombre, 67 % se sont dit « peu » ou « pas concernés » par l’effet de la récession sur la gestion de leur entreprise, 42 % se sont réjouis que les mises à pied fassent augmenter le bassin de main-d’œuvre et 42 % s’attendent à ce que leurs clients profitent de la récession pour investir dans le numérique. 

Giovanni Sansalone, vice-président des produits et des services professionnels de Bell Canada, perçoit lui aussi une volonté des entreprises de poursuivre leur transformation technologique malgré un ralentissement économique. « La pandémie a changé l’attitude des entreprises face aux investissements technologiques. Ce que nous avons compris chez Bell, et c’est aussi ce que nous entendons de la part de nos clients, c’est que, pendant une période difficile, nous devons accélérer nos investissements technologiques pour maintenir notre avantage compétitif. »

L’entreprise de télécommunications prêche ici par l’exemple. En juin dernier, elle a amorcé une première campagne de recrutement visant à embaucher un millier d’employés, dans le but d’accélérer le déploiement de projets d’intelligence artificielle, d’infonuagique, d’internet des objets et de cybersécurité. « D’une part, nous cherchons des gens qui ont une expertise de pointe avec ces technologies. Mais nous faisons aussi beaucoup de prospection auprès des nouveaux diplômés. Nous pourrons les former dans un de nos nombreux programmes de développement et de parrainage en interne, incluant l’Université Bell. » Environ 400 embauches ont été effectuées jusqu’à présent, précise-t-il. Et une seconde campagne de recrutement se déroule de la mi-décembre à février, ce qui pourrait déboucher sur l’embauche de quelques chômeurs licenciés par les GAFA.

 

Des entreprises plus prudentes

Pour Madhavi Mantha, associée en technologie, stratégie et transformation de Deloitte Canada, la récession entraînera un filtre de « prudence » dans le processus de sélection des projets numériques. « Les entreprises n’arrêteront pas leurs dépenses, mais elles seront plus pragmatiques dans leurs investissements. Plutôt que de miser sur l’innovation pure, elles voudront privilégier des technologiques qui les aident à qui répondre à des besoins d’affaires concrets, tout en se concentrant sur la création de valeur pour chaque dollar investi. »

Paul Raymond abonde dans le même sens. Le PDG de la firme technologique Alithya voit un « avant » et un « après » la hausse d’intérêt dans l’attitude des entreprises. « Au cours des dernières années, plusieurs industries ont connu une croissance fulgurante. L’accent était alors mis sur les technologies permettant d’augmenter les ventes et de développer la chaîne d’approvisionnement. Depuis la hausse des taux d’intérêt, les entreprises se demandent comment la technologie leur permettra d’être plus efficaces et de réduire leurs coûts d’opération. »

Pour cette raison, le PDG d’Alithya croit que les projets d’automatisation robotisée des processus (désignés « RPA » ou « Robotic process automation » en anglais) auront le vent dans les voiles. Ce type de projet vise à programmer des « bots virtuels » pour accomplir des tâches ayant peu de valeur ajoutée. Le dirigeant cite un projet d’automatisation d’une salle de courriers en grande entreprise, où Alithya a établi un processus pour numériser, interpréter et distribuer le courrier par des canaux numériques. L’opération a permis de réaffecter 27 des 30 employés à d’autres tâches. « C’est le genre de projet qui améliore le service à la clientèle tout en réduisant les dépenses de l’entreprise », fait valoir le PDG. Un beau retour sur l’investissement.

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