Qui veut entrer en Bourse? Plus personne, pour l'instant

Publié le 31/03/2022 à 12:59, mis à jour le 01/04/2022 à 13:00

Qui veut entrer en Bourse? Plus personne, pour l'instant

Publié le 31/03/2022 à 12:59, mis à jour le 01/04/2022 à 13:00

Par AFP

«C'est très difficile de faire une "IPO" dans un marché aussi volatil», abonde Gregori Volokhine, président de Meeschaert Financiel Services. (Photo: Getty Images)

New York — La forte volatilité, l'incertitude et le durcissement monétaire aux États-Unis ont dissuadé quasiment toutes les entreprises de se lancer en Bourse dans l'immédiat, après une année faste pour les introductions.

Aucune introduction cette semaine à Wall Street. Une seule la semaine dernière. Sur l'ensemble du premier trimestre, New York n'aura connu que 18 «IPO» (initial public offering), avec une levée de fonds médiane de 27 millions de dollars américains, la plus faible depuis plus de vingt ans.

Pour Bill Smith, directeur général du cabinet Renaissance Capital, «le marché des introductions en Bourse est sous assistance respiratoire».

2021 avait pourtant été «la plus grande année jamais vue pour les introductions» dans le monde, selon le cabinet PricewaterhouseCoopers, avec 608 milliards $ US levés en 2 682 opérations.

«On a pas mal de dossiers en attente», explique Frank Sebag, associé du cabinet EY.

Premier responsable de ce coup de frein, la guerre en Ukraine, de l'avis général.

«À chaque fois qu'il y a des tensions internationales», détaille Frank Sebag, «cela influe fortement sur les introductions en Bourses et sur toute la gamme de financement.»

«C'est très difficile de faire une "IPO" dans un marché aussi volatil», abonde Gregori Volokhine, président de Meeschaert Financiel Services. Dans ce contexte, «les sociétés candidates à une cotation comme les investisseurs sont naturellement plus prudents», concède à l'AFP Euronext, qui gère sept places boursières européennes.

«Il suffit de tomber sur une journée avec de très mauvaises nouvelles sur l'Ukraine, et ton IPO est une catastrophe», dit Gregori Volokhine. «Donc les entreprises ou les banquiers ne sont pas à l'aise.»

L'indice de référence du Nasdaq, la Bourse prisée des entreprises technologiques, a ainsi enregistré depuis le début de l'année 8 des 20 plus importantes baisses quotidiennes de son histoire.

«Les premières séances donnent un peu la direction», insiste Gregori Volokhine. «Une fois qu'une compagnie a été rejetée par les institutionnels, après, c'est très difficile de réparer les dégâts.»

 

Beaucoup visent encore 2022

Le coup d'arrêt est aussi dû aux performances décevantes des sociétés qui ont rejoint la cote l'an dernier, selon Matthew Kennedy, de Renaissance Capital.

Arrivé en fanfare début novembre, le constructeur de véhicules Rivian a perdu plus de 70% de sa valeur depuis son pic.

Le tarif a été quasiment le même pour toutes les grandes introductions de 2021, de l'application de courtage prisée des petits porteurs Robinhood (-84% depuis juillet dernier) à la plateforme de jeux vidéo Roblox (-66%).

Pour Matthew Kennedy, c'est la Réserve fédérale américaine (Fed) qui a mis un terme à la fête.

«L'une des principales raisons du mauvais parcours de ces valeurs de croissance est la transition d'un environnement avec des taux d'intérêt à zéro vers un environnement plus normal», explique l'analyste.

En remontant ses taux, la Fed pénalise ces jeunes sociétés dont la croissance s'appuie notamment sur le crédit bon marché, elles qui ont besoin d'investir massivement. La banque centrale rend aussi moins attractifs les rendements promis par rapport aux taux d'intérêt moyens.

«Sans l'invasion de l'Ukraine, on aurait eu quelques introductions de plus», considère Matthew Kennedy, «mais ça aurait tout de même été relativement faible par rapport à l'an dernier ou même à une année moyenne.»

Le fabricant européen de bornes de recharge pour véhicules électriques Allego a lui choisi de faire tout de même le grand saut, le 17 mars, sur le New York Stock Exchange.

Il est néanmoins passé par une SPAC (special purpose acquisition company), un véhicule financier déjà coté qui fusionne avec une entreprise pour lui permettre d'entrer en Bourse plus facilement que via une introduction classique.

Grâce à un mécanisme spécifique, «on savait qu'on avait un minimum de fonds qui seraient levés dans le cadre de cette opération», explique le directeur général, Mathieu Bonnet. «C'est pour ça qu'on a souhaité y aller.»

«On ne connaît pas le futur marché», dit-il. «Peut-être que la fenêtre ne se serait pas ouverte avant plusieurs mois.»

À quelques exceptions près, le robinet s'est aussi refermé pour les SPAC, chouchous de 2021, en partie du fait d'un regain d'attention des régulateurs, en premier lieu le gendarme américain des marchés, la SEC, qui a annoncé mercredi un renforcement de la réglementation.

«Les perspectives pour le marché des introductions sont brouillées» à court terme, selon Bill Smith. Les grands noms qui étaient annoncés en 2022, comme la pépite de la conduite autonome Mobileye, le réseau social Reddit ou le géant des yaourts Chobani, vont sans doute encore devoir patienter.

«Mais beaucoup de sociétés visent encore 2022», assure Bill Smith. Selon Matthew Kennedy, «il y a au moins 100 groupes qui sont prêts pour une introduction (aux États-Unis) dès que les investisseurs seront prêts à les accueillir».

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