Faire obstacle à la faim en récupérant et en redistribuant des aliments


Édition du 16 Décembre 2017

Faire obstacle à la faim en récupérant et en redistribuant des aliments


Édition du 16 Décembre 2017

[Photo : 123RF]

C'est la période de l'année où, traditionnellement, on se penche sur le travail des organismes caritatifs. Dans un monde idéal, le regard devrait s'étendre tout au long de l'année. Il y a toutefois tant d'enjeux et si peu d'espace pour en parler... Cette année, qu'on me le permette, j'ai choisi de présenter le travail accompli par Moisson Montréal. J'en profite pour saluer le travail de tous les organismes du genre qui s'activent sur le terrain, et pour encourager nos lecteurs à être toujours plus généreux à leur égard.

Pour les gérants des supermarchés, c'est toujours une course contre la montre quant aux viandes offertes dans leurs comptoirs qu'il faut vendre rapidement avant qu'il ne soit trop tard. C'était avant que n'intervienne Moisson Montréal. Objectif : contrer l'insécurité alimentaire.

Vous avez noté que les emballages de ces viandes présentent une date où les produits ont été mis en marché sur les tablettes. Le délai de grâce est exactement de trois jours. Après coup, bonnes ou pas bonnes, elles sont retirées pour être détruites ou enfouies dans des dépotoirs selon les normes en vigueur, réglementation oblige. Trois jours est le maximum autorisé. Après, elles ne sont plus réputées saines pour les consommateurs. «Mais si nous pouvons récupérer au moment précis de la fermeture des magasins les viandes autrement condamnées en les congelant quasiment sur-le-champ, nous prolongeons leur vie utile, pour ensuite les transformer, et ensuite les redistribuer au organismes qui comptent sur nous.» Celui qui parle ainsi s'appelle Richard Blain. Dans la vie courante, il est maître d'enseignement et responsable du programme de certificat en gestion des ressources humaines à HEC Montréal. Il a aussi été président du conseil de l'Ordre des conseillers en ressources humaines agréés du Québec. Les questions liées à la main-d'oeuvre, c'est son domaine.

Dans ses temps libres, manifestement plutôt rares, il est de plus président du conseil de Moisson Montréal, la banque alimentaire qui desservait, au dernier décompte, 247 organismes communautaires sur l'île de Montréal.

«Tout le monde est gagnant avec notre intervention, dit-il. Les supermarchés n'ont pas le droit de simplement jeter ces viandes jugées périmées. Il leur faut payer pour s'en départir. Nous leur évitons ce coût, et nous pouvons en même temps prolonger la vie utile de ces protéines qui vont aider à améliorer la nutrition de bien des gens.»

Depuis octobre 2013, Moisson Montréal a ainsi récupéré 2 500 tonnes de viande, pour une valeur de 24 millions de dollars. Son initiative fait aussi tache d'huile. Toutes les autres «Moisson» québécoises s'en sont depuis inspirées.

Richard Blain n'est pas du genre à s'encombrer de grandes phrases creuses, mais il demeure fondamentalement expert en gestion à HEC, ce qui lui permet de dire : «Nous intégrons alors des efficacités dans le système là où sévissaient auparavant des inefficacités.» La bonne gestion de Moisson Montréal vient d'ailleurs d'être reconnue à l'échelle canadienne. L'organisme Charity Intelligence, qui s'intéresse à l'influence des interventions des actions dans le milieu, vient de le classer au 10e rang canadien pour l'impact réel par dollar recueilli, ce qu'on appelle le retour social sur l'investissement. Comme tout repose au départ sur les dons, c'est de nature à réconforter les donateurs, autant d'entreprises qu'individuels.

Moisson Montréal vient tout juste d'apprendre une bonne nouvelle qui va lui permettre d'étendre ses activités. Dans le cadre des activités liées au 375e anniversaire de la fondation de Montréal, l'organisme vient de recevoir une subvention de 350 000 $ pour l'acquisition d'équipements stratégiques. Au programme, on note de quoi récupérer et revaloriser plus de 1 000 kilos par jour de fruits et de légumes autrement périmés, ce qui permettra d'ajouter 2,3 millions de portions supplémentaires par année. S'ajoute, entre autres, l'achat d'un autre camion réfrigéré pour la collecte de 1,5 million de portions de viandes supplémentaires. Tant de nourriture autrement, et bêtement, perdue...

«Le visage de la faim a changé, dit Richard Blain. Avant, dans les organismes de soutien alimentaire, on voyait des gens sans revenu, des itinérants ou autres. Aujourd'hui, on y trouve des travailleurs à faible revenu, des retraités démunis, des artistes entre deux contrats et plein de gens qui peinent à joindre les deux bouts.»

De là l'importance de récupérer et de valoriser des aliments toujours comestibles, mais qui arrivent en fin de vie utile, et dont l'intérêt commercial s'est amenuisé. Les fruits et les légumes seront ainsi rapidement blanchis, puis surgelés et placés avant d'être redistribués aux organismes sur le terrain. C'est ce qui permet à Moisson Montréal de répondre à 60 % des besoins exprimés sur son territoire, besoins qui ne diminuent pas, au contraire.

«Depuis des années, la société s'enrichit et le niveau de vie général augmente... mais les disparités augmentent elles aussi, dit Richard Blain. Quand on est pauvre, on est portés vers des aliments peu coûteux à forte concentration de gras, de sucre et de sel, et apparemment nourrissants. À la longue, ils hypothèquent toutefois leur santé. Un projet comme le nôtre travaille sur la quantité et la qualité des produits offerts.» En autant que le financement et les dons suivent...

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