Nationale: les futurs gains seront plus difficiles à arracher


Édition du 09 Septembre 2020

Nationale: les futurs gains seront plus difficiles à arracher


Édition du 09 Septembre 2020

(Photo: 123RF)

ANALYSE. La Banque Nationale (NA, 71,50 $) n'est plus le mouton noir des plus grandes banques canadiennes depuis un petit moment.

Dans le passé, on lui a reproché sa portée trop régionale ou encore l'influence disproportionnée des activités volatiles des marchés des capitaux sur ses bénéfices. Cette fois, en pleine pandémie, l'institution québécoise est le refuge des amateurs de banques. Son action a explosé de 87 % depuis le creux du mois de mars et obtient en Bourse une plus-value par rapport à ses semblables. En fait, une appréciation de seulement 3,4 % serait nécessaire pour retrouver son sommet des 52 dernières semaines.

Auparavant, les analystes préféraient les banques ayant une présence aux États-Unis, telle la TD (TD, 64,92 $) ou encore la Scotia (BNS, 55,96 $) en tant que la plus internationale des banques canadiennes. Voilà que la sixième banque du pays regagne la faveur des analystes grâce à sa gestion prudente et, surtout, aux répercussions plus modérées de la COVID-19.

Moins de 4 % de l'encours des prêts de la Nationale est touché par la pandémie, indique Scott Chan, de Canaccord Genuity. Sa présence limitée aux États-Unis redevient un avantage, ajoute Mario Mendonca, de Valeurs mobilières TD.

En fait, son action avait aussi surpassé celles de son groupe repère en 2019, avec un gain de 19,1 % par rapport à 10,1 % pour l'ensemble des institutions financières canadiennes. Cette année, les investisseurs récompensent la Nationale parce qu'elle s'est rapidement constitué un bon coussin de réserves pour d'éventuelles pertes sur prêts.

Non seulement la banque a-t-elle comptabilisé des réserves supérieures à celles des autres banques pour les prêts encore performants, mais la proportion des emprunteurs ayant obtenu un report de leurs versements hypothécaire est de 5,6 % par rapport au ratio de 10 % pour ses rivales, signale Darko Mihelic, de RBC Marchés des Capitaux.

Autre fait d'armes : la Nationale a été la seule des grandes banques canadiennes à diminuer ses dépenses autres que celles d'intérêts en proportion des revenus, de 53,5 à 53,1 %, au troisième trimestre, ajoute-t-il. Résultat : le bénéfice inchangé du troisième trimestre est nettement mieux que la baisse moyenne de 18 % de son industrie.

Une évaluation à soutenir

Cette performance fait en sorte que la Banque Nationale s'échange à des multiples nettement plus élevés que la moyenne de son industrie. Son titre se négocie à un multiple de 11,8 fois les bénéfices prévus par rapport à celui de 10,9 fois pour ses rivales.

Son dividende procure aussi un rendement de 3,9 %, soit le plus modeste de l'industrie. À l'autre extrême, celui de la Banque Scotia offre un rendement de 6,4 %.

L'action de la Banque Nationale se négocie aussi à un multiple de 1,8 fois sa valeur comptable, soit 27 % de plus que la moyenne de 1,4 fois pour ses semblables, note Meny Grauman, de Banque Scotia. Ce ratio gagne en importance en période de crise parce que les estimations de bénéfices ont moins de valeur.

Il n'est donc pas étonnant que sept analystes recommandent désormais de conserver le titre au lieu de l'acheter, soit trois de plus qu'en mai. En fait, la banque a déjà franchi le cours cible moyen (71,27 $) de douze analystes, selon la compilation de Refinitiv. «Bien que la Nationale reste un choix prudent pendant la pandémie, aux côtés de la Royale, il lui sera plus difficile de rester en avance sur les autres étant donné que son évaluation est plus élevée, mais que son capital réglementaire est inférieur à celui d'autres institutions», soutient Scott Chan, de Canaccord Genuity.

Le deuxième trimestre marquera probablement la pointe des provisions globales pour les pertes sur prêts pour l'ensemble des banques, s'entendent pour dire les analystes. Par contre, les réserves constituées spécifiquement pour les mauvaises créances augmenteront encore au cours des prochains trimestres, prévoit Mario Mendonca, de TD Valeurs mobilières.

Un premier test de solidité viendra avant, croit Gabriel Dechaine, de Financière Banque Nationale, puisque le report de versements sur les prêts prendra fin au prochain trimestre. Même s'il relève de 9 à 11 fois le ratio cours/bénéfice qu'il accorde au titre, Darko Mihelic recadre le portrait dans son contexte. Les activités bancaires traditionnelles de l'institution québécoise ont mieux résisté que celles de ses rivales, au troisième trimestre, mais ses bénéfices ont tout de même reculé de 2,9 %. De plus, les bénéfices reculeront de 21 % en 2020 avant de rebondir de 13 % de cette nouvelle base, en 2021.

Comme c'est souvent le cas dans le petit monde bancaire, les banques se passent parfois le flambeau en tête de la performance selon que les attentes sont surpassées ou déçues. La Banque Nationale offre peut-être moins de chances de surprendre que les autres.

 

À propos de ce blogue

La Sentinelle de la Bourse se veut un blogue pour les investisseurs qui s¹intéressent aux rouages de la Bourse et aux marchés financiers. Son objectif : surveiller et débusquer des repères financiers pertinents pour prendre le pouls des Bourses et ainsi mieux aiguiller les décisions de placement de l¹investisseur.

Dominique Beauchamp
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