Un entrepreneur canadien produit l'anti Blood Diamond

Publié le 07/11/2017 à 11:29

Un entrepreneur canadien produit l'anti Blood Diamond

Publié le 07/11/2017 à 11:29

Par Diane Bérard

Image tirée de la bande-annonce du film Blood Diamond.

«Personne ne connaît l’origine des produits qu’il achète. Pas le fabricant ni le distributeur ni le consommateur. Et on ne peut pas assainir les chaînes d’approvisionnement existantes. Il faut toutes les faire sauter (blow them up) et repartir à zéro», Ryan Taylor, cofondateur de Fair Trade Jewellery, premier bijoutier nord-américain à utiliser de l’or certifié Fairtrade et producteur du film Kingdom of the Sun.

2006: sortie du film Blood Diamond qui raconte l’exploitation de mines de diamants au Sierra Leone pendant la guerre civile de 1999 pour financer les rebelles qui luttent contre le gouvernement. L’expression « minéraux du conflit» (conflict minerals) est entrée dans les mœurs pour évoquer toute exploitation et vente illégale de minéraux pour financer l’achat d’armes et de munition en zone de guerre.

2017: le joaillier canadien Ryan Taylor présente son film Kingdom of the Sun, qui raconte son odyssée pour s’approvisionner en or de façon responsable auprès de mines artisanales.

Ryan Taylor serait le premier bijoutier nord-américain à utiliser de l’or certifié Fairtrade. Il est de passage à Montréal, son film est présenté ce soir à La Gare. Kingdom of the Sun nous emmène dans les Andes, en Bolivie, pour faire connaissance avec les travailleurs de la coopérative minière 15 De Agosto.

Les entreprises doivent-elles se rendre au cœur de la jungle pour s’approvisionner de façon responsable?

«Quelqu’un doit y aller, c’est certain, répond Ryan. Mais je ne suis pas convaincu que c’est le rôle du fabricant ou du distributeur. On devrait plutôt déléguer cette validation à un tiers dont c’est le métier. Et pas un tiers occidental. Il faut travailler avec des organismes locaux qui savent naviguer le système. En Bolivie, par exemple, nous travaillons avec Alliance for Responsable Mining (ARM) et au Congo, avec IMPACT. »

 En mai dernier, Ryan Taylor a reçu une livraison très spéciale. Joanne Lebert, directrice d'IMPACT, a rapporté 238 grammes d’or responsable, acheté auprès de mines artisanales de la région de Mambasa, en République démocratique du Congo.

Ce serait la première exportation d’or congolais officiellement responsable.

Ce fut un travail de moine d’obtenir tous les documents démontrant que cet or ne provient pas de mines situées en zones de guerre contrôlées par des milices armées. Vous pouvez en lire plus dans cet article du Globe and Mail.

Ces 238 grammes d’or responsable constituent un projet pilote. «Avant de parler d’approvisionnement responsable, il faut bâtir de vrais réseaux de fournisseurs locaux, dit Ryan. Pour l’instant, c’est très mince. Tout est informel. Au Canada, les entrepreneurs ne sont pas laissés à eux-mêmes. Ils reçoivent de l’aide financière et technique. Les exploitants miniers et forestiers sud-américains et africains ne sont pas différents. Ils ont les mêmes besoins. On ne peut pas s’attendre à ce qu’ils émergent et soient pérennes s’ils ne sont pas accompagnés.»

Les certifications? C’est de l’information morte!

Les certifications sont souvent évoquées comme solution pour identifier les produits responsables. «Cette méthode me semble aujourd’hui dépassée, dit Ryan. Il y a surabondance de certifications. On observe une lassitude des logos.» Il poursuit: «Depuis que je tourne des films, ma pensée évolue. La certification c’est de l’information morte. Qu’est-ce qui nous prouve que le logo qui apparaît sur un produit est toujours valide? Une information «vivante » produirait davantage d’impact. Imaginez, par exemple, un code-barres sur l’article que vous contemplez. Au lieu d’un simple logo, on vous offre une mini-présentation dont les informations sont mises à jour régulièrement. C’est vivant et personnalisé.»

Les primes à l’achat responsable c’est tellement 2010!

«Exiger une prime pour un article parce qu’il est associé au commerce responsable ça ne sert personne, estime le cofondateur de Fair Trade Jewelry. Le consommateur est devenu cynique. Il y a trop de bruit pour qu’il s’y retrouve. Alors dans le doute, il s’abstient. Et il opte pour le produit le moins cher. Le fournisseur, quant à lui, ne reçoit qu’une partie de cette prime. Le fabricant ou le distributeur alloue généralement la majorité de cette prime au marketing du produit dit responsable. De plus, ce système donne du poisson au lieu de montrer à pêcher. Pour bâtir de vraies chaînes d’approvisionnement responsables, il faut des fournisseurs solides. Cela suppose une véritable collaboration entre l’entreprise et son fournisseur local pour comprendre ce dont il a besoin pour durer.» L’approvisionnement responsable repose sur une relation responsable.

Vous n’avez pas fini d’entendre parler de Ryan Taylor. Il est en train de pivoter. «Je veux prouver qu’on peut implanter l’approvisionnement responsable pour d’autres secteurs. Je travaille, entre autres, avec l’industrie du poisson, du homard et de la marijuana.»

Le mot de la fin

«Le consommateur ne veut plus se faire dire par une entreprise qu’elle fait le bien, dit le joaillier. Il veut qu’elle le démontre. Or, l’approvisionnement est une occasion d’impact positif sous-exploitée par la majorité des entreprises.»

 

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