Pourquoi Apple est injustement punie

Publié le 15/12/2012 à 00:00, mis à jour le 13/12/2012 à 10:39

Pourquoi Apple est injustement punie

Publié le 15/12/2012 à 00:00, mis à jour le 13/12/2012 à 10:39

L'histoire d'amour des investisseurs avec Apple semble terminée, ou du moins les noces sont remises à plus tard. Le titre a perdu plus de 24 % depuis son sommet de plus de 700 $ US atteint au milieu de septembre.

Pendant ce temps, le marché, représenté par l'indice S&P 500, a perdu moins de 3 %.

Cette sous-performance crée des remous parmi les experts et les stratèges, qui y vont chacun de leur analyse pour l'expliquer. J'ai lu, par exemple, qu'en raison de sa taille (une valeur boursière de 500 milliards de dollars [G$ US]), le titre était condamné. J'ai vu une comparaison entre Apple et les titres technos en 2000. Une autre laissant entendre que les investisseurs étaient aussi attirés par la société qu'ils l'étaient par Coca-Cola en 1998.

Si vous êtes intéressé par Apple, ne laissez pas ces explications vous décourager.

Plusieurs craignent Apple parce qu'ils se disent qu'il n'y a jamais eu de société avec une valeur boursière de 1 000 G$ US, ce qui est vrai. Or, qu'il n'y en ait jamais eu ne signifie pas qu'il n'y en aura jamais. Je crois que ce n'est qu'une question de temps avant qu'il y en ait une ou plusieurs. Je ne sais pas si ce sera Apple qui atteindra ce niveau la première, mais ses chances sont bonnes.

Faux argument

La taille est un faux argument, dans le sens où il s'écarte de la véritable question, à savoir est-ce qu'Apple mérite son évaluation actuelle ? En d'autres termes, sa valeur reflète-t-elle bien sa performance financière ?

Pendant l'euphorie Internet, de nombreux titres avaient des valeurs boursières de plus de 50 G$ US, sans avoir réalisé un seul dollar de bénéfices et, pire, sans avoir vraiment un modèle d'entreprise éprouvé. Vous conviendrez avec moi que c'est loin d'être le cas avec la géante de Cupertino, en Californie.

De plus, il est vrai que les investisseurs et les financiers aiment Apple. Et encore là, je vous dirais que c'est tout à fait normal dans le contexte de sa performance financière extraordinaire. Je n'ai jamais vu un tel accomplissement économique, une grande société croître si rapidement et être si rentable. Jamais.

En fait, la bonne question est : comment expliquer que les investisseurs ne l'aiment pas davantage. Malgré sa performance et sa notoriété planétaire, le titre ne s'est vraiment jamais négocié à plus de 20 fois les profits.

À court terme, la performance du titre s'explique d'abord et avant tout par le fait que la société a publié deux trimestres consécutifs des résultats inférieurs aux attentes. Pour cette raison, il est sur le banc de punition.

Je me demande d'ailleurs ce qui fait grincer des dents les investisseurs. À la fin de son plus récent trimestre, le quatrième de son exercice 2012 clos le 30 septembre, Apple a affiché des revenus en hausse de 26,8 % et des bénéfices nets en hausse de 24,1 %. Aux yeux de Wall Street, c'est cela un trimestre décevant, alors que la société typique du S&P 500 a eu, au mieux, des bénéfices stables. Et cette société typique a un ratio cours/bénéfice plus élevé.

La seule véritable déception, c'est de voir la rentabilité d'Apple fléchir un peu. Les marges nettes sont passées de 23,4 % à 22,8 %, mais elles demeurent exceptionnellement élevées.

Vous me direz que les attentes des investisseurs étaient élevées en raison du fait qu'Apple les a habitués à mieux. C'est vrai, mais il y a une dichotomie bizarre entre ces attentes supposément élevées et l'évaluation du titre.

Apple a également eu des problèmes d'approvisionnement et était incapable de répondre à la demande d'iPhone 5. Encore là, il y a certes lieu d'être déçu parce que cela nuira aux résultats du trimestre en cours, mais les entreprises qui aimeraient avoir ce genre de problèmes sont très nombreuses.

Attentes boursières nulles

La clé, c'est de constater qu'actuellement, il n'est pas vrai que les attentes des investisseurs sont élevées. Autant sur le plan boursier que sur le plan financier, le ballon des attentes concernant Apple est crevé. Par exemple, l'entreprise vient de terminer une année exceptionnelle : ses revenus ont explosé de 44 % et ses bénéfices, de 61 %. Personne ne s'attend à ce que ce rythme se poursuive, et le titre ne s'est jamais vendu sur cette base non plus.

Les analystes prévoient en moyenne des bénéfices par action de 49,26 $ US en 2013, soit une croissance de 11,6 % par rapport aux résultats de 2012. Pour le trimestre qui se terminera le 31 décembre, on prévoit une baisse des profits, ce qui ne s'est pas vu depuis belle lurette.

En fait, le titre se vend comme si la société n'allait plus croître, à 12 fois les bénéfices des quatre derniers trimestres. Si vous soustrayez l'encaisse de 121 G$ US de la valeur de la société, le titre se vend 9,1 fois ses profits.

Apple se vend moins de 11 fois ses bénéfices prévus cette année et 8,1 fois ses profits, excluant son encaisse. C'est l'évaluation que l'on réserve habituellement aux sociétés sans avenir ou en plein déclin.

L'évaluation n'est certes pas une raison d'éviter Apple !

DE MON BLOGUE

Placement

La Bourse, pas une question de «feeling»

«Je songe à vendre toutes mes actions pour regarder passer la prochaine année... j'ai le feeling que l'Europe et les États-Unis vont finir par plomber les marchés...» Je reçois périodiquement des messages semblables. En 2000, les investisseurs s'attendaient à ce que les actions procurent un rendement annuel composé de plus de 15 % pour les 10 prochaines années. Vous savez maintenant que ces investisseurs ont été déçus, la Bourse procurant un rendement plus proche de zéro ! S'ils étaient à ce point optimistes, c'est parce que l'expérience récente était si bonne qu'ils ne pouvaient que croire qu'elle se poursuivrait. En fait, ils n'en savaient rien, mais ces investisseurs avaient le feeling que ce serait bon à la Bourse. Cela vous indique qu'il ne faut pas se fier à ses feelings quand il s'agit de la Bourse...

Vos réactions

«Il ne faut pas être émotifs face à nos placements, mais la Bourse elle-même semble refléter beaucoup d'émotion et c'est difficile de garder la tête froide. Cependant, je crois que vous avez entièrement raison.»

- altamont

«Bravo pour cet excellent billet. Les investisseurs gagneraient sur tous les points à éviter de mêler «glandes» et investissements !»

- polangevin

blogue > www.lesaffaires.com/bernard-mooney

bernard.mooney@tc.tc

À la une

Jusqu'Ă  quel point faut-il ĂŞtre patient avec un titre perdant?

Il y a 49 minutes | Philippe Leblanc

EXPERT INVITÉ. Je n'aime pas appliquer de recette toute faite.

Ă€ surveiller: Rogers, Meta et Alphabet

Il y a 35 minutes | Charles Poulin

Que faire avec les titres Rogers, Meta et Alphabet? Voici des recommandations d’analystes.

Bourse: Wall Street ouvre en hausse, rassurée sur l'inflation et la tech

Mis à jour il y a 34 minutes | lesaffaires.com, AFP et Presse canadienne

REVUE DES MARCHÉS. La Bourse de Toronto ouvre en hausse.