La recherche incessante du wow chez BRP

Publié le 28/09/2013 à 00:00, mis à jour le 26/09/2013 à 09:55

La recherche incessante du wow chez BRP

Publié le 28/09/2013 à 00:00, mis à jour le 26/09/2013 à 09:55

Le stationnement où sont garés plusieurs roadsters Spyder annonce les couleurs de l'entreprise : nous sommes bien au Centre Design & Innovation de BRP, à Valcourt, où quelque 70 spécialistes travaillent à concevoir les motoneiges, motomarines et autres véhicules récréatifs de demain.

Chez BRP, l'innovation et la croissance ne vont pas sans le design. La devise de l'entreprise : concevoir des produits à la fois innovants, fonctionnels et séduisants.

«Le facteur wow est essentiel. On travaille toujours en essayant de comprendre quels sont les éléments qui séduisent les consommateurs», assure Denys Lapointe, vice- président exécutif, design et innovation de BRP, ancienne division des produits récréatifs de Bombardier.

Objectif : insuffler une bonne dose d'émotion dans nos produits en travaillant sur les formes, les matériaux, les couleurs, les proportions. «Le design fait partie de l'équation pour qu'un produit devienne une réussite commerciale, pour qu'une entreprise continue de croître», estime M. Lapointe.

Les employés du Centre Design & Innovation travaillent donc sur toutes les différentes phases du développement de produit, de l'idéation à la modélisation, du prototypage à la chaîne de montage. Le travail de l'équipe repose sur une approche qui intègre le design, l'ingénierie et le marketing dans la création de ses produits. «Le design doit être pris en compte dès le départ, car si on veut juste habiller une patate, ça reste une patate», illustre M. Lapointe.

BRP s'assure aussi que le développement de ses véhicules respecte l'ADN de l'entreprise en matière de design. «Nos produits sont conçus de manière à offrir des courbes dynamiques. Même si les véhicules sont statiques dans la salle d'exposition du concessionnaire, leur apparence donne l'impression d'un animal sur le point de bondir», explique-t-il.

Un travail d'équipe

Construit au coût de 15 millions de dollars, le Centre de 5 000 mètres carrés a été érigé afin de rapatrier sous un seul toit les spécialistes en design et innovation qui étaient dispersés à Valcourt, à Sherbrooke et aux États-Unis. «Le Centre a permis de regrouper le pouvoir créatif. On ne travaille plus en silo.»

Ainsi, un designer planchant sur les motomarines peut proposer un concept qui permettra à BRP d'inventer la prochaine génération de motoneiges, et vice versa. C'est ce mélange des genres qui a d'ailleurs donné naissance au roadster Spyder.

Le Centre regroupe des designers, des ingénieurs, des dessinateurs de produits, des mécaniciens, des modélistes, des peintres ou encore des experts en ergonomie, qui sont tous appelés à imaginer et développer les futurs produits de BRP. Les dirigeants de l'entreprise de même que les employés de la chaîne de montage, les concessionnaires et les utilisateurs peuvent aussi y mettre leur grain de sel. «Les idées viennent de partout. L'important, c'est d'en avoir et de ne pas se restreindre», allègue M. Lapointe.

Les nombreuses idées qui partent de la table à dessin doivent cependant en cours de route se buter à certaines contraintes de coût et de fabrication. «Le défi est de garder l'aspect émotif et séducteur, de prendre en compte les différentes embûches en s'assurant que ça reste beau, que ça plaise aux clients.»

Une partie de l'équipe se consacre à la conception de véhicules, en continuité avec ceux qui existent déjà, dans un horizon de 0 à 5 ans. L'autre travaille à l'élaboration d'une nouvelle architecture de produits qui sort des sentiers battus.

Pour ce faire, BRP a réinventé le processus du stage gate, une démarche de lancement de produit qui décompose le processus d'innovation en cinq étapes majeures.

Dans ce modèle, «les meilleures idées sont souvent mises de côté, parce que le processus se heurte à une date butoir de production», affirme M. Lapointe. BRP s'est donc donné une période préparatoire, avant même le lancement d'un stage gate, qui lui donne plus de temps pour concevoir et valider des projets porteurs.

De meilleurs outils

Il arrive ainsi que BRP soit en avance sur son temps. L'entreprise a été la première, en 1968, à fabriquer et à mettre en marché une motomarine. Le manque d'engouement des consommateurs, jumelé à des problèmes techniques, en a fait un rendez-vous manqué. Mais 20 ans plus tard, lorsque Kawasaki a lancé le Jet Ski, BRP a répliqué en remettant au goût du jour son Sea Doo.

«Il y a toujours une part de risque dans la création, mais, aujourd'hui, nous avons de meilleurs outils pour valider la réponse des consommateurs avant de lancer de nouveaux produits», dit M. Lapointe. Le succès du Spyder peut en témoigner.

La réussite de BRP, qui a assemblé à la fin d'août sa trois millionième motoneige Ski-Doo, se mesure aussi en nombreux prix remportés au fil des ans par l'équipe de design. En 2012, l'entreprise a d'ailleurs ajouté deux prix Red Dot et trois prix Good Design à ses dizaines de récompenses, grâce entre autres à son Spyder RS 2012, son Sea-Doo GTI 130 et son Ski-Doo Skandic Tundra.

Denys Lapointe est particulièrement fier du prix de la décennie décerné en 1999 pour l'ensemble des développements du Sea-Doo. «C'était le troisième prix, mais comme nous avons été devancés par la Beetle de Volkswagen et la série 3 de BMW, conçus par des géants de l'industrie de l'automobile, il y a de quoi se réjouir.»

Ces nombreuses reconnaissances expliquent aussi pourquoi BRP réussit à attirer, dans une petite ville de l'Estrie au Québec, des employés issus des meilleures écoles de design et d'ingénierie du monde, comme en témoigne la mosaïque de portraits d'employés avec les drapeaux de leurs pays d'origine, bien en vue dans le hall d'entrée.

L'ÉPOPÉE DU SPYDER

Chaque année, les membres de l'équipe du Centre Design & Innovation de BRP se réunissent pendant trois jours pour imaginer le futur. En 1996, cette vaste session de remue-méninges a permis de jeter les bases du roadster Spyder, ce véhicule à trois roues qui allait prendre la route 10 ans plus tard.

«Notre thème, cette année-là, était de concevoir un véhicule pour la route qui ne serait ni une auto, ni une motocyclette», se rappelle Denys Lapointe, vice-président exécutif, design et innovation de BRP.

L'exercice a donné lieu à des dizaines de croquis et d'esquisses, allant d'un unicycle à un véhicule côte à côte, en passant par divers types de véhicules à trois roues. «Il y a eu toutes sortes de concepts, mais on a rapidement penché pour une architecture en forme d'Y, avec deux roues en avant plutôt qu'à l'arrière», souligne M. Lapointe.

Il aura fallu attendre 2007 avant que le premier Spyder sorte de la chaîne de montage de BRP à Valcourt. Les ingénieurs ont d'abord eu à confirmer, par divers tests aérodynamiques, que le modèle était stable et qu'il avait une bonne tenue de route. Les concepteurs ont aussi longuement travaillé aux volets ergonomique et esthétique.

Le moteur, apparent dans le prototype, a été recouvert par la suite. «On craignait que la vue du moteur rebute les utilisateurs ciblés, soit les femmes et ceux qui ne font pas de moto.»

Finalement, en septembre 2007 et après la fabrication de quatre prototypes, BRP lançait un véhicule routier à mi-chemin entre la motocyclette et la voiture sport décapotable.

Le succès du Spyder a finalement incité BRP à transférer l'assemblage de ses motomarines vers son usine mexicaine afin de produire davantage de roadsters à Valcourt. P.T.

L'INNOVATION, DE PÈRE EN FILS

Au milieu des années 1960, Bombardier recrute Sam Lapointe, un jeune designer d'une trentaine d'années, diplômé de l'École des beaux-arts de Québec. Son mandat : donner du style aux Ski-Doo jaunes créés par Joseph-Armand Bombardier et dont la production en série avait été lancée en 1959.

Pendant plus de 30 ans, Sam Lapointe apposera sa signature sur la célèbre motoneige. Un talent récompensé par le prix Excellence de Design Canada en 1984.

Son fils Denys suit maintenant ses traces à la tête du Centre Design & Innovation de BRP à Valcourt.

Après des études en sciences pures, il s'inscrit en design de l'environnement à l'UQAM. Il fera deux stages chez Bombardier, qui l'embauchera dès la fin de ses études universitaires, en 1985. Deux ans plus tard, il gagne un concours interne portant sur le design de la motomarine que s'apprête à lancer Bombardier. L'entreprise lui confie alors le mandat de développer le design de la gamme de Sea-Doo, ce qui l'amènera à travailler en Floride.

En 1991, Bombardier le rapatrie au Québec. Pierre Beaudoin, qui venait d'être nommé vice-président au développement de produits de la division Sea-Doo/Ski-Doo, lui demande de prendre aussi les commandes du design des motoneiges.

Intégrer le design

«J'ai accepté à une condition. Je voulais travailler en implantant la même philosophie qui faisait le succès du Sea-Doo, soit d'intégrer le design dès le début du développement, pas juste à la fin pour simplement habiller le produit», se rappelle-t-il.

Un des premiers mandats de Denys Lapointe, nommé vice-président exécutif, design et innovation en 1995, sera de repenser l'architecture du Ski-Doo, dont les ventes battent de l'aile. Cinq ans plus tard, BRP révolutionnera l'industrie en introduisant le modèle REV, dont le design a entre autres permis d'améliorer le confort du conducteur et la maniabilité de la motoneige.

Le succès du modèle REV aura permis à Bombardier de reprendre son rôle de leader dans le marché des motoneiges, se targue l'entreprise. Bombardier a même déposé il y a deux ans une requête en justice contre son concurrent Arctic Cat, l'accusant d'avoir enfreint plusieurs brevets portant sur ce modèle. P.T.

pierre.theroux@tc.tc

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