La magie des fonds spéculatifs a disparu

Publié le 22/09/2012 à 00:00, mis à jour le 20/09/2012 à 14:00

La magie des fonds spéculatifs a disparu

Publié le 22/09/2012 à 00:00, mis à jour le 20/09/2012 à 14:00

Ça devait être l'âge d'or des fonds spéculatifs, mieux connus sous le nom de hedge funds. Pourtant, leur performance en général est décevante.

Depuis l'éclatement de la bulle techno, les investisseurs sont à la recherche d'une solution magique. Ils ne veulent pas prendre de risque, mais tout de même avoir un bon rendement ; ils ne veulent pas non plus vivre des années de baisse suivies d'années de hausse. Ils veulent faire de l'argent, peu importe ce que font les marchés.

C'est un peu ce qui explique l'explosion des hedge funds depuis la fin des années 1990. Ces fonds secrets et exclusifs réservés aux plus riches ou aux plus grands investisseurs institutionnels, prétendument, ont la capacité de faire de l'argent, peu importe si la Bourse monte ou baisse. Comment ? Ils profitent au maximum de la volatilité du monde financier en achetant et en vendant n'importe quel actif (actions, obligations, denrées, devises, options, etc.) dans n'importe quel marché, partout sur la planète.

En théorie, c'est ce qui doit permettre à ces génies de la finance de réaliser des rendements élevés dans un monde condamné à de faibles rendements. Bien des institutions, y compris ici au Québec, ont acheté cette idée avec enthousiasme.

Des clients déçus

Sauf que les rendements ne sont pas vraiment au rendez-vous. Par exemple, la performance du hedge fund médian, en 2011, a été négative. Jusqu'à maintenant cette année, ce n'est guère mieux. Ce qui explique que, selon TrimTabs, l'industrie souffre de rachats nets. Plusieurs fonds plus petits ont fermé, et de plus en plus d'investisseurs sophistiqués remettent carrément en question ce type de placement. Selon certains observateurs, les événements de 2008 ont marqué un tournant. En effet, si vous promettez à vos clients un rendement absolu, vous devriez performer beaucoup mieux que le marché lorsqu'il y a des crises. Or, cela n'a pas été le cas. Les pertes ont fait fondre les profits des cinq années précédentes, laissant les clients perplexes.

De plus, depuis le creux de mars 2009, bien des fonds ont eu du mal à rattraper le terrain perdu. Cela dit, il y a des hedge funds exceptionnels, réalisant des rendements supérieurs avec moins de risques. Le problème, c'est qu'ils sont peu nombreux et que les déceler au préalable est aussi difficile que de nommer le gestionnaire de fonds communs qui se démarquera au cours des cinq prochaines années.

Un consultant mentionnait que l'institution qui veut investir dans un fonds spéculatif devrait se limiter à investir dans le premier ou le deuxième percentile des meilleurs fonds, parce que ces investisseurs sont vraiment capables de mieux performer que le marché sur des périodes allant de 5 à 10 ans. C'est bien beau, mais ça ne dit pas comment faire pour déceler ces fonds d'exception !

C'est à peu près comme si je vous disais que la clé de la réussite en Bourse, c'est d'acheter 1 à 2% des sociétés qui performeront le mieux dans les 10 prochaines années...

Selon la firme de recherche spécialisée eVestment Alliance, le hedge fund médian a réalisé un rendement de 23% pour les cinq années terminées à la fin de 2011 et de 104% sur 10 ans. Avant de déterminer si c'est bon ou non, vous devez tenir compte du fait que pendant cette période de nombreux fonds sont disparus de la carte, gonflant artificiellement les résultats des fonds survivants. eVestment souligne que, depuis cinq ans, 66% des fonds ont disparu de sa banque de données.

Rendements ordinaires

Malgré ces disparitions, la performance de ceux qui subsistent est ordinaire. Si vous la comparez à celle d'un portefeuille composé de trois fonds négociés en Bourse, de 60% en actions mondiales et de 40% en obligations, vous constaterez qu'il aurait mieux performé que près de la moitié des fonds pour les cinq ans terminés en 2011. Sur 10 ans, ce portefeuille aurait battu le hedge fund médian, évidemment à des coûts obscénément moins élevés.

La structure de ce fonds explique son taux d'extinction élevé. En effet, de nombreux gestionnaires suivent la formule de rémunération appelée 2/20 : le gestionnaire empoche des honoraires de 2% de l'actif en plus de 20% des profits réalisés. Ce qui signifie que, si vous gérez un fonds d'un milliard de dollars, vous recevrez 20 M$ en honoraires, peu importe votre performance. De plus, si vous avez un rendement de 50% la première année, soit 500 M$, vous en recevrez 20%, soit 100 M$.

Pour une année de travail, votre rémunération totale sera donc de... 120 M$ !

Ce genre de structure encourage de nombreux petits financiers ambitieux à se lancer et à essayer de frapper des coups de circuit, en spéculant de toutes les façons possibles. Pour eux, le risque n'est pas si élevé (le pire qui puisse arriver est que le fonds ferme), alors que les possibilités de gains sont illimitées.

Il n'y a pas vraiment de magie derrière les hedge funds. C'est d'abord et avant tout du bon marketing !

DE MON BLOGUE

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Après les données décevantes concernant la création d'emplois en août, experts et marchés sont convaincus que la Réserve fédérale des États-Unis annoncera des mesures supplémentaires pour stimuler l'économie. Or, à mon avis, la banque centrale américaine devrait attendre. De plus en plus de stratèges expriment ouvertement leur désir que la Fed passe à l'action. Il est clair que Wall Street met de la pression sur Ben Bernanke, président de la Fed. Toutefois, les autorités ne doivent pas se laisser impressionner par les demandes des financiers qui ne pensent qu'à leurs intérêts à court terme. Wall Street peut très bien tomber dans la dépendance face aux politiques monétaires expansionnistes, malgré leurs conséquences potentiellement négatives à long terme.

Vos réactions

« Le travail que fait la Fed est de fixer le marché obligataire pour maintenir des taux d'intérêt à moyen terme historiquement bas et ainsi encourager la circulation de l'argent. » - ww

« Ajouter de l'argent ne servira qu'aux spéculateurs. » - sceptique

bernard.mooney@tc.tc

blogue > www.lesaffaires.com/bernard-mooney

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