Comment être encore là dans 25 ans

Publié le 20/10/2012 à 00:00, mis à jour le 18/10/2012 à 10:01

Comment être encore là dans 25 ans

Publié le 20/10/2012 à 00:00, mis à jour le 18/10/2012 à 10:01

Les 2 et 3 octobre dernier s'est tenu la 9e édition du World Business Forum. Plus de 4 000 cadres supérieurs venus de 50 pays ont convergé vers le Radio City Music Hall de New York pour la grand-messe annuelle de la gestion. Ils sont repartis avec six pistes. Objectif : donner un nouveau souffle à leur entreprise.

«La seule organisation qui peut créer de la richesse, c'est l'entreprise. Or, les entreprises sont plus souvent associées au problème qu'à la solution, constate le professeur Michael Porter de l'université Harvard. Il est temps d'avoir une discussion sérieuse à propos du rôle des entreprises dans la société. La philanthropie, c'est bien, mais on peut faire mieux.»

Michael Porter et les quinze conférenciers du World Business Forum ont sonné l'alarme. L'entreprise est nue. La crise économique l'a dépouillée de sa crédibilité. Les médias sociaux, de sa vie privée. Il est urgent de trouver de nouveaux habits. Une mission mieux ajustée aux pressions et aux attentes des parties prenantes. Un nouveau contrat avec les employés. Une relation moins conflictuelle avec la communauté.

1 Soyez constant

En octobre 1911, le Norvégien Roald Amundsen et le Britannique Robert Falcon Scott mettent le cap sur le pôle Sud avec leur équipe respective. Le 14 décembre de la même année, Roald Amundsen et ses collaborateurs deviennent les premiers humains à fouler le sol du pôle Sud. Robert Falcon Scott et les siens y parviennent cinq semaines plus tard. Et ils périssent tous lors du voyage de retour, alors qu'ils se trouvent à 11 milles d'un poste de ravitaillement.

Pourquoi le Norvégien a-t-il réussi là où le Britannique a échoué ? «Amundsen franchissait la même distance tous les jours, peu importe les conditions climatiques, explique le consultant américain Jim Collins, auteur de six titres à succès, dont Great by choice et Built to last. Scott s'est montré plus inconstant, parcourant d'énormes distances sous un ciel clément et demeurant à l'abri en cas d'intempéries. Collins recourt à l'épopée des deux explorateurs pour illustrer son concept de «20-mile march». Il s'agit de ce que vous devez accomplir, jour après jour, pour atteindre votre but - le but ultime de toute entreprise étant de durer. Pour certaines entreprises, le 20-mile march sera une croissance annuelle de 15 %. Pour d'autres, le lancement d'un nouveau produit tous les 18 mois.

Lorsque vous avez établi votre 20-mile march, il vous reste à consacrer les ressources nécessaires pour l'atteindre. Et à ne jamais ralentir ou accélérer le rythme, peu importe les circonstances.

2 Traitez vos employés en adultes

«Il n'y a pas que les banques qui traversent une crise de légitimité, prévient la professeure britannique Lynda Gratton, de la London Business School. La plupart d'entre nous estiment que les entreprises, peu importe le secteur, ne sont pas des lieux sains permettant de nous développer adéquatement.» La relation entre la direction et ses employés a longtemps ressemblé à celle qui est tissée entre un parent et son enfant, ajoute cette spécialiste du monde du travail. «L'entreprise prenait soin de son monde en lui fournissant salaire et emploi à vie contre loyauté et obéissance», dit Lynda Gratton.

L'emploi à vie est désormais chose du passé. Quant au salaire, il n'augmente plus systématiquement année après année. Le contrat ne tient donc plus. Comment alors susciter la loyauté de son personnel ? «Les employés pensaient : je serai fidèle à l'employeur qui s'occupe de moi. Aujourd'hui, ils déclarent plutôt : je resterai avec celui qui me stimule intellectuellement. Le jour où je cesserai de me développer, j'irai voir ailleurs», souligne celle que le Times a classée parmi les 15 penseurs les plus influents du monde des affaires.

Un contrat plus exigeant pour l'entreprise, certes. Mais aussi, pour l'employé. «Devenir adulte comporte des défis, explique Lynda Gratton. Il faut exprimer clairement ses besoins. Il n'y a plus de parent pour les deviner. Et puis, on devient responsable de son bonheur. À chacun de développer son employabilité.»

3 Révisez votre vision des médias sociaux

«Facebook n'est pas l'ultime média social. Ce n'est même pas l'incarnation de ce qu'est un média social», prévient le Canadien Don Tapscott, une sommité en matière de technologie. Les médias sociaux ne sont pas des moyens de communication, insiste-t-il, c'est un nouvel outil de production. Il vous permet d'organiser le talent - à l'intérieur de votre entreprise aussi bien qu'à l'extérieur - pour produire des biens et des services.

Oubliez Facebook. Pensez plutôt plateformes collaboratives. «Considérez les médias sociaux comme le système d'exploitation de l'entreprise et les humains comme les applications qui nourrissent le système», ajoute-t-il.

Pour illustrer son propos, il cite le cas de l'IBM Jam. Il s'agit d'une technologie participative qui mobilise de 300 à plus de 100 000 participants. On profite de l'intelligence collective pour discuter d'enjeux, confronter des opinions et soumettre des projets.

4 Explorez la valeur partagée plutôt que la responsabilité sociale

«Le capitalisme n'est pas un vilain mot, insiste le professeur Michael Porter, de l'université Harvard. C'est l'outil le plus puissant pour régler les problèmes sociétaux.» L'essence du capitalisme consiste à cerner et à combler des besoins mal desservis. Or, après des décennies de philanthropie et de responsabilité sociale, les grands problèmes sociétaux ne sont toujours pas réglés. Là se trouve, selon Michael Porter, la plus grande occasion d'affaires du 21e siècle.

C'est le concept de valeur partagée. Vous tirez de la valeur d'un produit ou d'un service, votre communauté, vos clients et vos fournisseurs aussi. L'entreprise américaine Intuit l'a compris. Cette spécialiste des logiciels financiers pour la classe moyenne et les PME s'est attaquée à un marché non traditionnel : les familles à faible revenu. C'est-à-dire celles qui n'ont pas accès à leur remboursement d'impôt, parce que remplir une déclaration s'avère trop ardu. «Intuit aurait pu faire un don à un organisme de littératie financière, dit Michael Porter. Elle a plutôt créé Snap Tax qui permet d'expédier votre déclaration d'impôt en 15 minutes pour 15 dollars.»

5 Retrouvez votre candeur

Robert Gates a travaillé pour huit présidents des États-Unis (alors qu'il dirigeait la CIA, puis à titre de secrétaire de la Défense), «dont deux n'avaient aucun sens de l'humour, soit Jimmy Carter et Richard Nixon». Il a connu Thatcher, Sadate, Mitterand, Gorbatchev, Kohl, etc. La qualité qu'il valorise par-dessus tout chez un leader ? La candeur.

À la question «Les États-Unis gagnent-ils la guerre en Irak ?», Robert Gates a répondu «Non». Le vrai leader avoue qu'il est dans le pétrin, et il informe ses supérieurs de ce qu'il a entrepris pour tenter de s'en sortir. «Que voulez-vous qu'on nous réponde ? dit Robert Gates. Il n'y a rien à ajouter. Nos supérieurs ne peuvent que nous laisser faire notre travail en paix.»

Soyez candide et acceptez la candeur des autres. «Combien de leaders pensent plutôt : "Je veux que mes employés me disent la vérité... même si cela leur fait perdre leur emploi" ?» ironise Robert Gates, en paraphrasant un pdg de MGM.

6 Vendez votre entreprise

«Vos clients n'achètent pas vos produits. Ils achètent votre entreprise», révèle Ann Lewnes, vice-présidente principale, responsable du marketing mondial d'Abobe. Cessez de la camoufler, c'est elle la vedette dont vos clients veulent entendre parler. Le chemin vers le coeur de vos clients passe par ce que vous êtes, pas par ce que vous vendez. On veut connaître l'histoire de votre entreprise, rencontrer ses artisans. On veut la voir, la sentir, la comprendre. Pensez campagne de notoriété. Ne vendez pas, racontez. Le reste suivra.

diane.bérard@tc.tc

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