«Vite, une politique nationale sur les infrastructures» - Saeed Mirza, professeur émérite à l'Université McGill

Publié le 24/08/2013 à 00:00

«Vite, une politique nationale sur les infrastructures» - Saeed Mirza, professeur émérite à l'Université McGill

Publié le 24/08/2013 à 00:00

La tragédie ferroviaire de Lac-Mégantic, les inondations monstres à Calgary, l'effondrement du viaduc de la Concorde à Laval, la chute d'un morceau de façade d'hôtel sur la rue Peel à Montréal : tous ces accidents mortels auraient pu être évités si les gouvernements accordaient plus de soins à leurs infrastructures, estime Saeed Mirza, professeur émérite à la Faculté de génie civil et de mécanique appliquée de l'Université McGill.

«Les gouvernements ne font que réagir aux catastrophes, ils ne font pas assez pour les prévenir, dit-il en entrevue. Évidemment, la prévention, cela ne garantit pas à un politicien qu'il aura sa photo dans les médias.»

Saeed Mirza a de quoi être amer : à plusieurs reprises, cet expert de renommée mondiale a sonné l'alerte sur la dégradation des infrastructures au Canada. D'abord dans les années 1980 et 1990, puis en 2007 dans un rapport volumineux commandé par la Fédération canadienne des municipalités, et plus récemment, en juin, lors du congrès annuel de la Société canadienne de génie civil, tenu à Montréal, où il a chiffré à plus de 1 billion de dollars (1 000 milliards) le coût de la mise à jour des infrastructures au pays.

M. Mirza réclame une politique nationale des infrastructures qui, selon lui, devrait être élaborée par un groupe de travail composé de fonctionnaires fédéraux, de représentants des provinces et des municipalités ainsi que d'universitaires.

Une banque pour financer l'entretien

Au coeur de la politique, M. Mirza prévoit la création d'une banque pour les infrastructures, dotée d'un conseil d'administration indépendant. Elle serait chargée de financer à long terme les projets approuvés. Les fonds viendraient des secteurs public et privé et le financement prendrait la forme de prêts, de subventions et d'obligations. Les donneurs d'ordres bénéficieraient d'incitatifs (taux d'intérêt inférieurs) pour réaliser les travaux. Et, chose certaine, le principe d'utilisateur-payeur prévaudrait, croit M. Mirza.

Selon lui, en raison de son étendue et de la variété de son climat, le Canada est particulièrement vulnérable aux catastrophes naturelles. Si on continue de négliger l'entretien de nos infrastructures, on va en payer le prix, avertit-il.

Des pipelines non sécuritaires ?

En entrevue, le professeur Mirza n'est pas tendre envers Ottawa dans le dossier de Lac-Mégantic. «C'est son erreur d'avoir autorisé MMA à n'avoir qu'un seul opérateur de train pour transporter les matières dangereuses, dit-il. Que faisait le Bureau de la sécurité des transports du Canada avant la tragédie ?»

M. Mirza sonne maintenant l'alarme concernant la dégradation des infrastructures d'énergie au Canada, dont le déficit s'élève à 500 milliards de dollars selon lui. «On parle beaucoup de pipelines ces temps-ci : or, ils ne sont pas sécuritaires dans leur état actuel», juge l'expert.

Et l'état des routes à Montréal ? Pour Saeed Mirza, deux problèmes se posent : un mauvais système de drainage de l'eau, et le fait que les donneurs d'ordres ne font pas de contrôle de qualité et imposent des exigences portant sur les matériaux plutôt que sur la performance dans la construction.

Expert en béton, il croit que bien des routes québécoise auraient pu être construites en béton, «un matériau qui coûte plus cher mais qui est plus performant». Toutefois, le lobby de l'asphalte est très fort au Québec, dit-il.

Dans l'industrie du génie, M. Mirza appelle à un changement des mentalités. «Il y a 15 ans, on faisait du design, build and forget (conception, construction et tant pis pour le reste). Aujourd'hui, il faut faire de la conception, de la construction et de l'entretien, dit-il. Même si cela n'est pas payant politiquement.»

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