Transport Robert devient un partenaire logistique aux États-Unis

Publié le 15/09/2012 à 00:00, mis à jour le 28/09/2012 à 09:14

Transport Robert devient un partenaire logistique aux États-Unis

Publié le 15/09/2012 à 00:00, mis à jour le 28/09/2012 à 09:14

Par François Normand

Transport Robert compte aider davantage les exportateurs à réduire leurs coûts en s'attaquant aux processus inefficaces de leur chaîne logistique. Le transporteur fait le pari que cela les incitera à fabriquer au Canada les produits qu'ils vendent aux États-Unis.

« Cela fait 10 ans que nous nous impliquons dans la chaîne logistique de nos clients. Mais nous allons le faire davantage pour continuer à croître aux États-Unis », précise Jean-Robert Lessard, vice-président marketing et relations publiques chez Transport Robert, de Boucherville, qui réalise 35 % de ses revenus au sud de la frontière, surtout dans les États à l'est du Mississippi.

Depuis 10 ans, le dollar canadien s'est apprécié de 60 % par rapport au dollar américain, et le prix du baril de pétrole (le West Texas Intermediate) a été multiplié par trois, ce qui a fait bondir les frais de transport. Pas étonnant que des entreprises comme Cascades préfèrent produire davantage aux États-Unis.

« C'est inquiétant, admet Jean-Robert Lessard. C'est pourquoi il faut plus travailler avec nos clients qui exportent aux États-Unis afin de réduire leurs dépenses et rendre leur chaîne logistique plus efficace. »

Par exemple, au lieu d'expédier chaque semaine trois cargaisons par camion aux États-Unis, Transport Robert peut y envoyer des lots plus gros en deux déplacements seulement. L'entreprise peut aussi offrir des routes et des cargaisons communes à certains exportateurs, pour faire, si l'on veut, du transport en commun de marchandises.

Dans la région de Montréal, le transporteur livre la cargaison de ses clients en dehors des heures de pointe en raison des travaux de construction. Cela évite à l'expéditeur de payer la prime d'engorgement sur le réseau routier. Transport Robert pourrait appliquer cette stratégie si une telle situation se produisait dans une grande ville américaine.

L'avenir est dans les services intégrés

Toutes ces stratégies de logistique sont gagnant-gagnant. L'exportateur réduit ses coûts, et ses produits sont plus concurrentiels sur le marché américain. Transport Robert peut quant à lui offrir des tarifs de transport plus bas, évitant aux exportateurs d'avoir à transférer leur production (en totalité ou en partie) aux États-Unis.

Yvon Bigras, spécialiste en logistique et en transport à l'ESG UQAM, estime que Transport Robert a une excellente stratégie. « Ils ont toujours été à l'avant-garde, dit-il. En matière de transport, l'avenir est dans les services intégrés qu'un transporteur peut offrir à ses clients. »

André Tchokogué, spécialiste en gestion des opérations et de la logistique à HEC Montréal, souligne que la stratégie de Transport Robert est déjà utilisée par plusieurs transporteurs routiers en Europe et aux États-Unis ; le Canada traîne la patte. « Les entreprises de camionnage deviennent de plus en plus des partenaires logistiques. C'est l'approche de FedEx, qui est un maillon clé dans la chaîne logistique de plusieurs grandes entreprises aux États-Unis. »

Pour accroître ses revenus sur le marché américain, Transport Robert mise aussi sur le service d'entreposage et de distribution qu'il offre aux entreprises américaines qui exportent au Canada (les entreprises canadiennes y ont aussi accès). Cette stratégie s'inscrit également dans une approche de services intégrés dans la chaîne logistique de ses clients. Transport Robert se trouve ainsi à agir comme un grossiste.

Le transporteur de Boucherville livre ensuite aux clients canadiens les produits de cet exportateur américain. En stockant de la marchandise dans les entrepôts de Transport Robert, l'entreprise américaine peut de son côté acheminer plus rapidement ses produits à ses clients canadiens après une commande. De plus, elle n'a pas à investir pour construire et exploiter son propre entrepôt au Canada, qui représente un petit marché pour les exportateurs américains.

Ce service offert uniquement au Canada permet à Transport Robert de se démarquer de ses concurrents américains qui livrent au Canada, comme Schneider National, dont le magazine Forbes estime le chiffre d'affaires en 2011 à 3,1 milliards de dollars américains.

Enfin, pour accroître ses revenus aux États-Unis, Transport Robert mettra aussi davantage l'accent sur le transport de produits spécialisés (lourds, hauts, volumineux) tels que l'équipement minier ou les pièces d'éoliennes.

Transport Robert, c'est...

Deux activités principales (répartition sectorielle des revenus)

Entreposage et distribution 25 %

Transport 75 %

Le tiers de ses revenus réalisé aux États-Unis (répartition géographique des revenus)

Québec (30%)

Ontario (30%)

Autres provinces (5%)

65 %

35 %

300 M$

Des revenus supérieurs à 300 millions de dollars canadiens

4000

Une flotte de plus de 4 000 unités

Source : Transport Robert

LES ENJEUX DE TRANSPORT ROBERT

LE RISQUE

Commercial

Transport Robert se heurte à un risque commercial en s'engageant davantage dans la chaîne logistique de ses clients, selon Yvon Bigras et André Tchokogué, deux spécialistes en logistique.

Dans le cas d'un exportateur canadien, Transport Robert risque que ce client perde des parts de marché aux États-Unis et réduise la fréquence de ses livraisons.

Dans le cas d'une entreprise américaine, Transport Robert risque qu'elle diminue ses exportations au Canada. Le cas échéant, le transporteur se retrouverait avec des espaces vacants dans ses entrepôts canadiens.

LE DÉFI

Être plus concurrentiel

Transport Robert doit hausser sa productivité pour offrir des tarifs encore plus concurrentiels à ses clients canadiens et américains, selon Jean-Robert Lessard.

« Nous allons par exemple améliorer l'efficacité de notre propre chaîne logistique. » Le transporteur fonde aussi beaucoup d'espoir sur le développement d'un réseau de stations-service de gaz naturel liquéfié aux États-Unis au cours des trois prochaines années. L'entreprise réduirait ainsi sa facture de carburant et ses émissions de gaz à effet de serre.

LE CONSEIL

Mieux cibler vos marchés

« Les transporteurs voulant livrer et rapporter de la marchandise des États-Unis doivent bien cibler leurs marchés », dit Jean-Robert Lessard. Par exemple, si un transporteur veut offrir ses services dans l'axe Montréal-Atlanta, il doit avoir des « transports équilibrés ». Les exportations vers Atlanta doivent être sensiblement équivalentes aux importations à destination de Montréal.

30,6

Revenus réalisés, en milliards de dollars américains, par l'industrie du camionnage aux États-Unis en 2011 (LTL ou chargement partiel), soit une hausse de 11,6 %. | Sources :The Journal of Commerce, SJ Consulting Group

Dans cette série, nous décodons la stratégie internationale d'une entreprise canadienne et analysons ses risques. Sur le Web, Les Affaires s'associe à L'actualité, Canadian Business, The Report on Business, The Economist Intelligence Unit et à la banque HSBC pour offrir un site axé sur les exportations. À lire sur affairessansfrontieres.ca.

FRANÇOIS.NORMAND@TC.TC

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