SNC-Lavalin prend le risque de se passer d'intermédiaire

Publié le 02/02/2013 à 00:00

SNC-Lavalin prend le risque de se passer d'intermédiaire

Publié le 02/02/2013 à 00:00

SNC-Lavalin veut désormais brasser directement des affaires avec ses clients étrangers plutôt que de passer par des intermédiaires locaux. Objectif : mieux contrôler son offre de services en génie-conseil et réduire les risques d'être de nouveau soupçonnée ou accusée de corruption, disent les analystes. Mais la stratégie est risquée.

Dans un entretien avec Les Affaires, Christian Jacqui, vice-président et directeur du nouveau groupe Opérations monde, explique que cette approche vise à développer une relation client - une tendance mondiale - avec les donneurs d'ordres. «Nous voulons écouter ce que veulent nos clients, qu'ils soient publics ou privés. Nous n'aurons pas besoin d'agents extérieurs, seulement de notre organisation qui sera mature et bien formée.» Cette stratégie permettra aussi de mieux encadrer l'application du nouveau code d'éthique. En Libye, c'est SNC-Lavalin qui a versé près de 160 millions de dollars à l'ancien régime Khadafi, selon un rapport de la GRC. Cette somme aurait servi à obtenir des contrats.

Selon Christian Jacqui, cette approche directe permettra à la société d'offrir de meilleurs services et de se démarquer de la concurrence. Ella a été testée en Europe depuis le mois d'octobre, et elle aurait donné de bons résultats. «C'est pourquoi nous déployons ce projet-pilote dans le monde», dit Christian Jacqui, qui s'établira à Londres. Il n'anticipe pas non plus un ralentissement de la croissance des revenus de SNC-Lavalin.

Perte de contrats

Allain Jolly, spécialiste en management international à HEC Montréal, ne partage pas son optimisme. «Compte tenu des règles du jeu, de la concurrence féroce dans certains pays peu démocratiques, c'est certain que SNC-Lavalin va perdre des contrats !» Le recours aux intermédiaires locaux ouvre des portes aux multinationales à l'étranger, surtout dans les économies émergentes.

Soumaya Ben Letaifa, spécialiste en gestion à l'ESG UQAM, croit aussi que la nouvelle stratégie aura un impact à court terme. «SNC-Lavalin n'aura pas le rendement de l'investissement qu'elle aurait eu avec des intermédiaires locaux.» Toutefois, à long terme, cette stratégie est gagnante, car les employés locaux de l'entreprise développeront une expertise et une collaboration plus durable, «relationnelle et non pas transactionnelle», avec les clients de l'entreprise.

Yan Cimon, spécialiste en stratégie d'affaires à l'Université Laval, pense aussi que la firme d'ingénierie peut perdre certains contrats, mais reste optimiste à long terme. «Le fait d'être une entreprise éthique ayant une sensibilité locale est porteur. Quel bel avantage concurrentiel si SNC y parvient !»

Le recours aux employés locaux de SNC-Lavalin s'accompagnera aussi d'une plus grande cohérence dans l'offre de l'entreprise. Ainsi, au lieu de laisser les 10 divisions développer leur secteur et leurs marchés géographiques respectifs, la firme veut que leur offre de service soit proposée systématiquement partout, insiste Christian Jacqui. «Il faut se comporter comme SNC-Lavalin dans tous les pays.»

@la_monde @francoisnormand

LinkedIn: ow.ly/eydGl

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