Rio Tinto Alcan en a fini avec le paternalisme

Publié le 08/11/2008 à 00:00

Rio Tinto Alcan en a fini avec le paternalisme

Publié le 08/11/2008 à 00:00

Par Suzanne Dansereau

Dans le passé, quand une société minière débarquait dans un pays pauvre d'Afrique pour en exploiter les ressources, elle abordait les communautés locales de façon paternaliste : se substituant au gouvernement, elle répondait à sa façon aux besoins de base des communautés, construisant, par exemple, un puits d'eau. Quand la pompe était brisée, c'était elle qui la remplaçait. Mais quand la minière cessait ses exploitations, le puits fermait aussi. Car personne dans la communauté locale ne savait comment le faire fonctionner.

Ce vieux modèle disparaît. Les multinationales se rendent compte qu'elles ont intérêt à favoriser l'appropriation, par tous les acteurs des projets qu'elles financent, de leurs projets, afin qu'ils soient durables. Et elles préfèrent maintenant s'associer à d'autres bailleurs de fonds pour investir dans les communautés, créant ainsi un meilleur effet de levier.

Basée à Montréal, la multinationale Alcan a mis en place, fin 2006, un nouveau cadre de relations avec les communautés autochtones, lequel a été conservé lors de l'acquisition de l'entreprise par Rio Tinto.

" La nouvelle approche signifie que nous n'agissons plus en vase clos ", indique Claude Perras, directeur, développement durable et relations communautaires, de Rio Tinto Alcan (RTA), qui travaille notamment sur un important projet d'approvisionnement en eau au Ghana. Dans ce projet, RTA investit 300 000 $, auxquels s'ajoutent 800 000 $ venant de l'Union européenne.

S'assoir à la même table que d'autres intervenants plutôt que de jouer au père Noël représente un important changement organisationnel. Dans le jargon, on parle d'une " approche basée sur les enjeux " plutôt que d'une " approche basée sur l'organisation ".

Investissement stratégique

En Guinée, RTA est membre d'une table de concertation avec le gouvernement guinéen, l'organisme non gouvernemental CECI (Centre canadien d'étude et de coopération internationale), l'Agence française de développement et la Banque Mondiale, pour élaborer un plan de développement régional qui va permettre aux communautés de profiter au maximum des retombées économiques d'un projet minier.

" Il faut reconnaître qu'Alcan essaie vraiment de mieux travailler avec les communautés. Ce ne sont pas toutes les minières qui font un tel effort, indique Chantale-Sylvie Imbeau, directrice du CECI. Rien ne nous permet de croire que Rio Tinto ne poursuivra pas dans la même veine. "

Dans ce modèle, les relations entre les multinationales et les ONG - proches des populations locales - passent d'une dynamique de méfiance ou de confrontation à une dynamique de partenariat.

Cette nouvelle façon de faire n'est pas toujours facile à gérer, souligne M. Perras.

" Parfois, il n'y a pas de consensus. Les négociations sont longues. Nos ingénieurs n'aiment pas cela ! Mais réussir à collaborer sur un enjeu commun, c'est comme une fusée qui décolle ", ajoute-t-il. Signe des temps, Claude Perras travaillait dans le milieu des ONG avant de passer chez Alcan, voilà plus de trois ans.

Cette nouvelle approche permet aussi à RTA de se démarquer des ses concurrents chinois et indiens, souligne-t-il. " Notre soutien à la communauté devient un investissement stratégique plutôt que du graissage. "

Investissement stratégique, dites-vous ? De plus en plus, les entreprises réalisent que la maladie, l'analphabétisme et l'injustice créent des risques importants et peuvent occasionner des coûts pour l'entreprise. C'est dans leur intérêt d'avoir des populations locales en santé et éduquées. On parle ici d'avoir une " licence sociale d'exploitation ", explique M. Perras. Sans cette licence, les projets peuvent déraper et échouer. C'est ce qui s'est passé en Inde : la population n'a pas accepté un projet de mine de bauxite et en 2007, Alcan s'est retirée du projet.

Des gens d'affaires ont compris que s'engager dans les communautés où ils font des affaires est une bonne idée. Cette série présente des entreprises qui améliorent les choses autour de nous et qui y trouvent leur compte.

suzanne.dansereau@transcontinental.ca

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