Radisson, l'oubliée du Plan Nord

Publié le 27/10/2012 à 00:00

Radisson, l'oubliée du Plan Nord

Publié le 27/10/2012 à 00:00

Le boom minier et le Plan Nord du gouvernement Charest n'ont pas généré d'importantes retombées dans le seul village blanc (allochtone) au nord du 53e parallèle : Radisson.

La population y a décliné de 20 % depuis cinq ans, à moins de 250 habitants. Mis à part la réfection des groupes de turbines de la centrale LG2, il n'y a plus de travaux hydroélectriques prévus au complexe La Grande d'Hydro-Québec, qui a donné naissance à cette localité.

Les minières actives au nord passent au-dessus de Radisson avec leurs avions en vols directs de Rouyn-Noranda (Xstrata), Val-d'Or (Canadian Royalties) ou encore Montréal.

Air Creebec vient de fermer sa liaison à La Grande, situé tout près de la localité. Et la route qui mène à Radisson, la mythique route de la Baie-James, est si endommagée qu'elle représente un danger public, au dire de l'organisme qui la gère, la Société de développement de la Baie-James. De plus, il n'y a plus d'ambulance postée à mi-chemin de cette route de 710 kilomètres. Récemment, on a mis cinq heures pour se rendre sur les lieux d'un accident.

«Le gouvernement Charest n'a rien annoncé de bon pour le vrai Nord qui est ici, à Radisson, déplore l'entrepreneur local Alain Jean. Nous sommes les oubliés du Plan Nord», lance-t-il.

M. Jean exploite une pourvoirie et des motels. Depuis la diminution des permis de chasse au caribou et le changement de la réglementation, l'an dernier, il a observé une baisse de sa clientèle de 50 %, et s'attend à ce qu'elle atteigne 70 % cette année.

Un autre entrepreneur, Michel Desjardins, qui possède une société d'équipement et de services miniers, de même que deux restaurants et des services d'hébergement, dit qu'il n'a «jamais vu aussi mauvaise année que 2012 en 30 ans de carrière».

En outre, la main-d'oeuvre est difficile à trouver, et Radisson manque de logements et de terrains, explique Denis Dufour, directeur général de la localité.

Insatisfaction vis-à-vis d'Hydro-Québec

La plus grande récrimination des gens de Radisson s'adresse à Hydro-Québec, et elle est historique. La société d'État a bâti dans la localité un immense complexe résidentiel de 11 immeubles comprenant 475 chambres pour y loger ses quelque 200 travailleurs du complexe Robert-Bourassa et des visiteurs.

Or, la presque totalité de ces travailleurs fait ce qu'on appelle du fly-in, fly-out (FIFO), c'est-à-dire qu'ils ne vivent pas à Radisson. Ils n'y logent que pour le travail. Le complexe a sa propre cafétéria - qui ne s'approvisionne pas à Radisson - et un bar. Si bien que les employés d'Hydro-Québec consomment peu localement.

Cette formule de FIFO «va à l'encontre de l'esprit du développement durable» prôné dans le Plan Nord, plaide le président de la Corporation de développement économique de Radisson, Normand Lacour. Selon lui, «aucune communauté n'accepterait un projet minier qui n'embaucherait que 2 % de main-d'oeuvre locale. Pourquoi doit-on l'accepter à Radisson ?» Sans parler des coûts «énormes», selon lui, qu'occasionne le transport par avion de ses employés ; une organisation du travail où les employés travaillent 8 jours, ont 6 jours de congé plus 20 jours de repos toutes les cinq semaines ; de même qu'une disposition syndicale interdisant à Hydro-Québec d'installer un employé dans une chambre située directement à côté, en haut ou en bas d'une chambre déjà occupée.

À Radisson, ces conditions créent de la jalousie.

Diane Guillemette, conseillère des relations avec le milieu en est consciente. Mais la société fonctionne ainsi depuis 35 ans et ne peut pas «forcer ses employés» à vivre sur place, dit-elle.

Développer le tourisme

Radisson vit quand même d'espoir. Une étude de faisabilité est en cours au sujet de la construction d'une route menant de Radisson à Poste-de-la-Baleine (Kuujjuarapik, en inuit ou Whapmagoostui, en cri), où le gouvernement Charest envisageait de mettre en place un port en eau profonde dans le cadre de son Plan Nord. «La réalisation de cette route désenclaverait la région et ouvrirait la voie à plusieurs projets miniers», relate M. Lacour. Par exemple, celui de Duncan Lake, un dépôt de fer exploré par Century Iron Mines. Mais cela ne se fera pas avant 7 ou 10 ans.

La Corporation de développement économique a été remise sur pied en mars 2012, après six ans d'inactivité. Normand Lacour tente un rapprochement avec les communautés autochtones pour développer le tourisme et attirer des étudiants à l'école secondaire de Radisson. Il entend aussi convaincre les minières d'utiliser davantage la route et l'aéroport La Grande pour transporter leurs marchandises au Nunavik.

De son côté, Denis Dufour tente de convaincre Québec de faire passer le statut de Radisson de localité à municipalité, ce qui lui permettrait de gérer elle-même ses demandes de subvention et éventuellement d'élargir son assiette fiscale.

Au moins 75 M$ pour réparer la route

Pour gérer la route de la Baie-James, longue de 710 km, la Société de développement de la Baie-James dispose en 2012 du même budget qu'en 1997.

«Nous n'avons pas les moyens d'acheter du sel pour cet hiver», relate le pdg de la SDBJ, Raymond Thibault, qui a dû faire une demande de subvention spéciale au ministère des Transports.

La route n'a plus de lignes de séparation, ses panneaux de signalisation sont usés, et elle est carrément dangereuse dans les 200 premiers kilomètres, en partant de Matagami, dit-il. «La sécurité du public est remise en cause», affirme-t-il en entrevue à Les Affaires.

Pour réduire le danger, la SDBJ a besoin d'au moins 2 millions de dollars cette année. Mais pour une réfection minimale, il lui faut 75 M$ pour les cinq prochaines années.

La route est financée par Hydro- Québec, mais elle ne lui appartient pas. La société d'État ne veut plus investir d'argent supplémentaire, car elle n'est plus de facto la seule à s'en servir. La route dessert maintenant 11 000 habitants, dont certains de villages cris qui n'y étaient pas reliés auparavant, de même que des entreprises minières et leurs fournisseurs.

N'étant pas considérée comme une route selon la Loi sur la voirie et la Loi sur le ministère des Transports, la route n'est pas admissible aux fonds d'infrastructures fédéral-provincial.

Hydro-Québec compte «moins d'une dizaine» de résidents de Radisson sur un total de 1 000 employés aux différentes installations de la Grande Rivière, confirme la conseillère Diane Guillemette.

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